Ah, Gucci. Ses mocassins, sa bande à trois couleurs, son logo iconique et… Ses atrocités. Car oui, derrière le vernis glam’ de la maison de luxe se cache une tragédie macabre. Plusieurs coups bas, une bonne louche de faux-semblants. Des arrière cuisines peu ragoûtantes, sur lesquelles Ridley Scott s’est penché avec House of Gucci. Un biopic révélé en 2021, qui exhume le passé méconnu du clan italien – celui d’une ascension vertigineuse, vite rattrapée par des jeux de trahisons, de jalousies rapaces et de rivalités larvées qui se clôtureront par un drame aux accents shakespeariens. Mais le film retrace-t-il fidèlement la décadence du fleuron de la mode qui, aujourd’hui encore, compte parmi les marques les plus influentes du monde ? Focus.
1. Les Gucci s’opposait-ils au mariage de Maurizio et Patrizia ?
Remontons la bobine. Au début des 70’s, la marque italienne est aux mains de Rodolfo Gucci (Jeremy Irons) et de son frère, Aldo (Al Pacino). Le premier a un fils : Maurizio (Adam Driver). Alors qu’il étudie encore le droit, ce fringant jeune homme s’amourache d’une certaine Patrizia, secrétaire dans la boîte de transport routier détenue par son paternel. On est loin des sphères bourgeoises auprès desquelles les Gucci ont l’habitude de frayer. Aussi papà Rodolfo, persuadé que Patrizia en a seulement après la fortune familiale, interdit-il à sa progéniture chérie de passer la bague au doigt de la signora. De sorte qu’au moment du mariage, en 1972, les Gucci “boycottent” l’heureux évènement – pire encore, “Rodolpho est allée jusqu’à contacter le cardinal de Milan pour annuler le mariage”, révèle Sara Gay Forden dans son livre qui a inspiré le film : The House of Gucci: A Sensational Story of Murder, Madness, Glamour, and Greed.
2. Paolo Gucci était-il le mouton noir de la famille ?
Incarné par un Jared Leto méconnaissable, Paolo Gucci, fils d’Aldo, est présenté comme un looser farcesque aux costumes d’un excentrisme criard, pas franchement raccord avec l’élégance soft de la griffe qu’il est censé représenter. On le trouve, ici et là, toujours affairé à concevoir des costumes… Dont personne ne veut. Dans les faits, les initiatives de Paolo ont effectivement été méprisées par la famille, puisque Aldo et Alfredo ont refusé qu’il lance sa propre ligne Gucci. Ce qui ne l’empêchera pas de révéler publiquement une collection en 1980 – sans l’aval ni de son père, ni de son oncle, donc. Un coup d’audace qui lui vaut d’être tout bonnement renvoyé. Le mal-aimé n’aurait-il été qu’un “bon à rien” ? Pas tout à fait. En quittant son poste, il laisse derrière lui un insigne héritage : le célèbre logo au double “G”, dont il a participé à la confection en cheville ouvrière.
3. Aldo Gucci est-il allé en prison à cause de son fils ?
Les déchirements de la famille Gucci, déjà gangrenée par plusieurs querelles de pouvoir, prend une autre dimension avec cette trahison du père par l’enfant. Vexé d’avoir été mit à la porte par son géniteur suite au show non-autorisé sus-cité, Paolo déclenche une vendetta en révélant à l’International Revenue Service (IRS) des protifs non-déclarés. Résultat : Aldo est pêché pour une évasion fiscale estimée à 7 millions de dollars, puis condamné en 1986 à un an de prison ferme. Au moment d’être confiné derrière les barreaux, il a 81 ans.
4. La “sorcière noire” Pina Auriemma a-t-elle existé ?
Dans House of Gucci, Patrizia, mortifiée de voir son compagnon s’éloigner, cherche conseil auprès d’une prétendue voyante, repérée sur une publicité télévisée : Pina Auriemma. Les deux femmes se sont bel et bien rencontrées, mais dans un SPA, nous apprend Sara Gay Forden. Bon. Et celle qui, selon les termes de l’auteure, était devenue la “meilleure confidente” de Patrizia versait-elle vraiment dans la sorcellerie ? “La presse italienne l’a surnommée “la sorcière noire”, mais elle n’était pas une vraie sorcière – simplement elle lisait le tarot de temps à autre, par amusement”. Pas de quoi crier au mauvais sort, donc.
5. Patrizia a-t-elle ordonné l’assassinat de Maurizio ?
C’est une affaire dont le macabre entache encore le monde de la mode. Le 27 mars 1995, Maurizio Gucci reçoit quatre balles en pleine rue, à proximité de ses bureaux milanais. Tous les regards se tournent alors vers Patrizia. Chacun sait la rancœur qu’elle cultivait contre son ex-mari. Celui qui l’avait peu à peu mise de côté, qui avait poussé à un divorce conclut en 1994 – celui, surtout, qui s’était engagé dans une nouvelle relation auprès de Paola Franchi. En 1997, Patrizia et Pina sont condamnées pour avoir commandité l’assassinat de Maurizio auprès d’un tueur à gage, Benedetto Ceraulo. En 2016, et après 18 années d’emprisonnement, l’inculpée est libérée. Celle qui, lorsqu’on lui faisait remarquer qu’elle n’avait plus le droit d’emprunter le nom de Gucci après son divorce, avait un jour rétorqué “je me sens toujours comme une Gucci – la plus Gucci de tous, à vrai dire” porte désormais un bien funeste surnom : “la veuve noire de la mode”.