Réalisé en 1995 par le talentueux Paul Verhoeven, dont on ne compte plus les films mythiques, Showgirls s’annonçait comme une bonne nouvelle pour le cinéma. Mais dès sa sortie, il est massacré par la critique comme par le public, au point de devenir l’une des films les plus moqués d’Internet. Pire encore, son actrice principale, Elizabeth Berkley, a reçu quatre Razzies Awards pour son jeu dans ce film : pire nouvelle star, pire actrice, pire actrice de la décennie et pire actrice du siècle. Pourtant 27 ans plus tard, à la lumière d’une époque très différente des années 1990, il prend une dimension très différente. Konbini et Prime Vidéo vous expliquent donc le parcours improbable de ce film. Après avoir été classé dans la catégorie des nanars, ces mauvais films qu’on prend plaisir à mater pour se marrer entre potes ou sous sa couette en lendemain de teuf, il est en effet devenu culte.
Un pitch un peu facile mais pertinent
Tout d’abord, il y a eu des critiques sur le pitch du film. Celui-ci raconte en effet l’histoire de la jeune Nomi qui arrive à Las Vegas avec des rêves plein la tête pour devenir showgirl. Mais, secouée par la violence de la capitale mondiale du jeu, elle se retrouve à écumer les clubs de striptease pour gagner sa vie. Heureusement, sa ténacité et l’aide de ses amies vont lui permettre d’échapper à ce monde un peu sombre pour devenir une star. Bref, une énième version de la fille qui arrive de la campagne pour réussir dans la grande ville. Sauf que dans Showgirls, tous les problèmes (ou presque) que rencontrent les héroïnes sont dus au comportement violent, cupide et dominateur des hommes. Ce qui fait brutalement échos aux combats féministes et anticapitalistes de notre temps, tout en se moquant de l’American Dream.
Une liberté et une nudité incomprises
Il suffit de regarder quelques minutes de Showgirls pour comprendre un truc : il y a beaucoup de femmes nues dedans. Ce qui a valu de nombreuses critiques au film, comme le fait qu’il donnait plus de places à des plastiques parfaites qu’à de véritables actrices. Il s’agissait pourtant d’une volonté de qui souhaitait en faire un film interdit au moins de 17 ans, dans lequel il serait possible de montrer librement le sexe et les corps nus. Mais si l’idée est mal reçue à la sortie du film, elle est vue autrement de nos jours. Pour beaucoup, les personnages de Showgirls sont au contraire des femmes libres de faire ce qu’elles veulent de leurs corps, de le montrer ou pas et d’en faire un outil de travail si elles le souhaitent.
Un féminisme et une ouverture en avance sur leur temps
Le rapport à la liberté du corps n’est pas le seul élément progressiste du film. En effet, celui-ci présente plusieurs des personnages principaux comme ouvertement bisexuels. Mais tandis que Basic Instinct a été acclamé pour la même raison, personne n’y a vu de progressisme dans Showgirls. Et ce bien que les curseurs soient poussés bien plus loin qu’avec le célèbre personnage joué par Sharon Stone et que l’arc narratif de Nomi Malone ne dépende d’aucun homme. De plus, l’intrigue du film de Paul Verhoeven repose sur l’histoire de femmes qui se débattent pour s’en sortir, qui se serrent les coudes et qui se défendent les unes les autres. C’est notamment le cas de la mythique scène où – attention spoiler – Nomi fracasse le violeur de sa meilleure amie en one-to-one. Du lourd donc.
La reconnaissance des chercheurs
Au fil des années, ces différents éléments ont quand même fini par faire évoluer le statut de Showgirls. Le premier signe de ce changement date de 2003 quand le magazine Fim Quarterly consacre un numéro au réalisateur Paul Verhoeven. A cette occasion, plusieurs universitaires prestigieux proposent un autre regard sur le film et expliquent en fait que le film pose de très intéressantes questions sur le genre, le féminisme et la sexploitation. Une véritable consécration pour ce film qui est ensuite devenu de plus en plus culte parmi les communautés concernées, mais pas que.
Bref, vous l’aurez compris, si vous avez passé les 27 dernières années à penser que Showgirls est un nanar, il est largement temps de vous raviser. Pour ça, rien de mieux que de le mater ou de le remater sur la plateforme Prime Video. Et quand vous aurez fini, il vous restera encore les milliers de films et de séries du catalogue sur lesquels vous pourrez vous faire votre propre opinion.