Le freestyle a toujours été une discipline à part dans le monde du rap. Très identifié dans le milieu des radios au départ, il était aussi une façon simple de se faire un nom, avant que le rappeur sorte un disque. Dans les années 1980, les deals en maison de disques étaient difficiles à débloquer donc le freestyle en radio pour rapper sur des instrumentaux étaient la première porte d’entrée pour vraiment se faire connaître. Des radios comme Nova étaient précurseuses dans ce domaine en France, notamment avec l’émission Deenastyle où Dee Nasty enchaînait les disques pour les rappeurs pendant que Lionel D passait le micro tout en improvisation.
À voir aussi sur Konbini
Car c’était aussi la base du freestyle, l’improvisation. Ne faire que des rimes en rythme mais non écrites. Une discipline très prisée au départ qui s’est transformée en style libre : adapter un texte sur n’importe quelle instru. Et là, c’est la performance qui marque les esprits, la longueur du freestyle et la versatilité suivant les instrumentaux. C’est là qu’entre en jeu l’émission avec la longévité la plus légendaire sur le sujet : Planète Rap.
Chaque année, un freestyle Grünt, Planète Rap ou autre marque durablement les esprits et fait réagir. Pourquoi ? Sûrement parce que la performance reste importante dans le rap, on pense aux grandes années des battles End Of The Weak puis Rap Contenders. Ce côté technique revient régulièrement sur la table car le rap reste une musique toujours en quête d’authenticité. Régulièrement, par vagues, la musique rap a besoin de revenir à ses bases de performance technique.
Mais est-ce qu’on n’en fait pas trop quand même ? Bien sûr, le freestyle de 10 minutes d’Oli est une belle performance. Mais ne l’a-t-on pas déjà vu des dizaines voire des centaines de fois ? Est-ce que son succès n’est pas plutôt un aveu d’échec de performance du rap actuel ? Car au final, ce type de freestyle était la norme des années 1980 et 1990, il n’y avait même que ça pendant un moment, si on repense aux émissions de Générations comme Original Bombattak ou encore Sang D’Encre. Des dizaines d’artistes se sont fait leur réputation sur des freestyles de ce type. On pense notamment à Ill des X Men et toute la clique Time Bomb au milieu des années 1990.
Donc OK, les freestyles, c’est cool, ça fait toujours plaisir de voir des rappeurs actuels se motiver pour de la performance au long cours comme chez Grünt toujours. Mais on n’est pas obligés de crier au génie à chaque fois que ça arrive. Il s’agit juste d’une arlésienne du rap qui revient régulièrement sur le devant de la scène. Et parfois, un constat un peu alarmant sur la vivacité du mouvement rap du moment.
Le 5 majeur de la semaine
Hamza – Codéine 19
Comme tout le monde, j’écoute l’album d’Hamza et je suis bien content qu’il ait clippé “Codéine 19”, sûrement mon titre préféré de l’album. En boucle.
Polo G & Future – No Time Wasted
Polo G, c’est toujours un succès. En plus là, il y a du Foot US en mode Super Bowl et Future avec une toque de trappeur d’exception. Forcément haute rotation.
Jey Brownie & Tiakola – Cadenacer
Le projet de Jey Brownie et Flem KGB, Faits Divers, est vraiment inclassable et profond. Le chanteur a vraiment une vibe à part, parfois proche d’un Chily, très bien mise en valeur par les productions sombres de Flem. Bien sûr, la collaboration avec Tiakola est celle qui met tout le monde d’accord, moi y compris. Elle est peut-être même un cran au-dessus de la suite tant attendue de “Atasanté” sur l’album d’Hamza.
8ruki & Bushi
J’ai bien aimé aussi le projet de 8ruki avec Binks Beatz avec beaucoup de sonorités à la Playboi Carti ou Lil Uzi Vert et un flow Plugg. Bien sûr, le morceau avec Bushi a attiré mon attention, comme d’hab.
PBL & Chanceko – Avec le cœur
Superbe ambiance bossa-nova sur ce morceau enivrant de PBL avec Chanceko. J’ai adoré l’ambiance du titre et la façon dont Chanceko aborde la mélo. Le projet de PBL L’heure Bleue est un beau petit voyage très bien produit, je recommande. Et il y a Beeby dessus en plus. C’est validé, ça.
Ligne nostalgique
Je suis retombé sur “94” de Rohff il y a quelques jours et je me suis vraiment dit que le rap français il y a 20 ans, c’était vraiment un truc de performance. Le rap brut, l’instru si efficace de Denaun Porter, l’Américain de l’équipe D12 et Aftermath. On sent un peu le côté 50 Cent / The Game avec un délire si français en plus. C’est mon époque préférée.