Ce mardi 14 octobre, entre 5 000 et 10 000 sapeurs-pompiers professionnels (SPP) ont manifesté à Paris, selon les syndicats. Un nombre important, surtout si on le rapporte au nombre total de SPP dans l’Hexagone : environ 40 000, selon leurs propres chiffres, sur 248 000 sapeurs-pompiers.
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La manifestation, qui est partie à 14 heures de la place de la République pour rejoindre la place de la Bastille, a été marquée par des affrontements entre les sapeurs-pompiers et les forces de l’ordre. Ils auraient fait un peu moins d’une dizaine de blessés de chaque côté.
Des images de ces affrontements ont été particulièrement relayées sur Twitter. En effet, on a plutôt l’habitude de voir ces deux corps de métiers travailler ensemble, d’autant plus que leurs revendications se rejoignent souvent : sous-effectif, épuisement, manque de reconnaissance…
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Si les affrontements ont été minoritaires, ils sont le fait de la stratégie répressive du gouvernement, selon Timothée Jaillet, 30 ans. Ce dernier est sapeur-pompier depuis 10 ans en région parisienne. Il a assisté aux débordements en marge de la manifestation hier après-midi. Il se souvient :
“Au départ, l’ambiance était festive. Il y avait beaucoup de fumigènes, beaucoup de pétards, beaucoup de sirènes de pompiers. On suivait le trajet prévu, jusqu’à ce qu’un groupe d’une centaine de personnes commence à dévier du trajet.”
En coulisses, des représentants syndicaux sont alors en train d’essayer de négocier place Beauvau, mais ça n’aboutit pas. Lorsque certains manifestants l’apprennent, ils décident de “changer d’itinéraire pour essayer de se faire entendre”, analyse Timothée Jaillet. C’est ce revirement qui met le feu aux poudres.
Tout se passait pourtant bien jusque-là, selon lui. Il explique : “Ça se passait très bien avec la police avec qui on a toujours des très bons contacts. Avec la compagnie de gendarmes mobiles qui nous escortait, il y avait un peu de rigolade.”
Mais l’ambiance change. “À partir de là, on a eu une répression policière ferme. C’était les consignes. On n’en veut absolument pas aux CRS de terrain. Les ordres dans les oreillettes étaient clairs : de la fermeté, des lacrymogènes…”, explique le pompier, qui insiste sur l’entente qui règne habituellement avec ses “collègues”.
“Les choses se sont envenimées et on a été gazés immédiatement, alors que nous étions très peu à changer d’itinéraire”, ajoute-t-il, tout en reconnaissant qu’il y a eu des manifestations de violences physiques et verbales de la part de quelques manifestants. “On condamne les violences, mais on les comprend quand on a des pompiers qui sont à bout”, ajoute-t-il.
Des pompiers gazés “à bout portant”
Cet évènement entache les relations entre pompiers et policiers pour le reste de la manifestation. Les manifestants sont bloqués place de la Nation par les CRS. Mais le cortège ayant 2 heures d’avance, de nombreux pompiers sont contraints d’attendre les autobus ou les TGV censés les ramener en province.
“Je comprends que certains soient à bout et en viennent aux mains quand il y a une répression qui est extrêmement forte en face de nous, en plus par nos collègues avec qui on intervient tous les jours”, déplore le trentenaire. Il ajoute, revenant sur les évènements dont il a été témoin :
“Il y a énormément de pompiers, même pacifistes, qui ont été gazés à bout portant par nos collègues CRS, encore une fois à cause des ordres qu’ils avaient eus. On a reçu énormément de gaz lacrymogènes, énormément de canons à eau. J’ai déjà fait des manifestations de pompiers, et c’est la première fois que je vois l’usage du canon à eau sur nos collègues.”
Des scènes similaires se sont produites sur le périphérique, qu’une dizaine de pompiers ont tenté de bloquer. “Les CRS ont fait les avertissements d’usage, mais la répression qu’on avait en face de nous était d’une fermeté rare. Quelques compagnies de CRS ont toutefois fait preuve de clémence, on les remercie”, raconte le jeune homme.
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Ces débordements auraient fait une dizaine de blessés des deux côtés. “Côté pompier, on m’a remonté plusieurs blessés à la jambe, au moins un blessé à la tête”, estime le soldat du feu. Ces blessures seraient dues à des grenades de désencerclement et aux gaz lacrymogènes, selon Timothée Jaillet : “Quand on lance des gaz lacrymogènes en hauteur, la cartouche peut heurter en redescendant.”
Selon BFM TV, trois membres des forces de l’ordre ont été blessés et six personnes ont été interpellées pour violences et jets de projectiles.