Dans l’article 1 du projet de loi énergie, le gouvernement supprime l’objectif de réduction par quatre des émissions de gaz à effet de serre, et le remplace par celui de neutralité carbone.
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Philippe LOPEZ / AFP
En ratifiant l’Accord de Paris en 2015 lors de la COP21, la France s’était engagée à limiter l’élévation de la température à 1,5°C en réduisant ses émissions de gaz à effet de serre, entre autres mesures. Un engagement toujours pas respecté près de quatre ans plus tard, cependant.
Tout aussi alarmant, le récent projet de loi énergie du gouvernement, que Libération s’est procuré, prévoit en outre de supprimer l’objectif de division par quatre des émissions de gaz à effet de serre pour le remplacer par un objectif de “neutralité carbone” à atteindre à l’horizon 2050.
Que cache la “neutralité carbone” ?
Si ce projet de loi est adopté en l’état, l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre sera donc purement et simplement abandonné au profit de la neutralité carbone. Autrement dit, sera privilégié l’équilibre entre, d’un côté, les émissions de gaz à effet de serre, et de l’autre, leur absorption par l’écosystème ou des procédés industriels.
Problème : ces procédés seraient loin d’être au point. C’est du moins ce qu’explique Valérie Masson-Delmotte, paléoclimatologue française et co-présidente du groupe de travail sur les sciences du climat du GIEC, interrogée par Le Monde :
“Il faut être lucide. Le recours à des émissions négatives ne repose pour l’instant que sur des scénarios théoriques, avec des interrogations majeures en termes de faisabilité et de risques. Notre message n’est pas qu’il est possible d’attendre sans rien faire, au motif que nous saurions extraire du CO2 de l’atmosphère, mais au contraire qu’il faut agir plus vite pour faire baisser les émissions.”
En faisant miroiter l’idée d’une absorption massive du CO2, ce projet de loi risque par conséquent d’inciter à la diminution des efforts en matière de réduction réelle des émissions.
L’indispensable réduction des émissions de gaz à effet de serre
Dans les conclusions de son cinquième rapport, le GIEC confirmait les intentions inscrites dans ce projet de loi, à savoir atteindre l’objectif de “neutralité carbone” en 2050 pour contenir l’élévation de la température. Néanmoins, pour le groupe de recherche, la limitation du réchauffement climatique ne peut être réalisée sans une réduction rapide des émissions de gaz à effet de serre.
D’après le rapport, sans une baisse de 45 % de ces émissions d’ici à 2030, l’objectif de l’Accord de Paris ne sera pas atteint. Et avec ce projet de loi, encore susceptible d’être modifié toutefois, la limitation du réchauffement à 1,5°C semble être un horizon bien lointain.