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Des lycéens manifestent à Bordeaux. (© by Nicolas Tucat/AFP)
La mobilisation des syndicats lycéens contre les réformes dans l’Éducation nationale avait jusqu’à présent peiné à réunir les foules. Mais porté par la contestation des “gilets jaunes”, le mouvement a semblé prendre de l’ampleur lundi 3 décembre avec des blocages, parfois marqués par des incidents, dans des dizaines de lycées en France.
Le ministère de l’Éducation a comptabilisé lundi matin une grosse centaine de lycées perturbés à travers la France, avec des blocages complets ou partiels. Parmi les académies les plus touchées figurent Toulouse (une quarantaine d’établissements perturbés), Versailles et Créteil (une vingtaine dans chacune de ces deux académies).
Dans l’académie de Créteil, près d’un lycée d’Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), environ 200 jeunes ont investi la rue, dont une poignée portait des gilets jaunes, a raconté une source policière. Une voiture et une poubelle ont été incendiées, du mobilier urbain dégradé et un magasin de téléphonie pillé. Des heurts ont impliqué des dizaines de jeunes qui scandaient “Macron démission”, selon des sources concordantes, alors que sept personnes ont été interpellées.
Des incidents dans plusieurs grandes villes
Des incidents (jets de projectiles sur les forces de l’ordre, incendies de poubelles…) ont aussi éclaté dans plusieurs villes en région comme à Bordeaux, Toulouse, Pau, Limoges, Dijon ou encore Lyon. Des interpellations ont également eu lieu.
À Paris, le rectorat relevait une dizaine de tentatives de blocage, la plupart ayant été levés rapidement. Aucun établissement n’est entièrement bloqué et six ou sept avaient mis en place un blocage filtrant, a ajouté le rectorat. Il n’y a pas eu d’incident.
Les mots d’ordre des syndicats lycéens (UNL, SGL, Fidl, etc.) qui appellent à ces blocages évoquent les réformes du bac et du lycée, ainsi que la plateforme d’accès aux études supérieures, Parcoursup, qu’ils contestent.
Les réformes du bac et du lycée, en cours de déploiement, vont selon eux renforcer la sélection sociale, tandis que le dispositif Parcoursup, mis en place il y a un an, a introduit un processus sélectif à l’entrée à l’université.
Autre désaccord avec les annonces du gouvernement, la création du service national universel (SNU), qui sera testé sur quelques centaines de jeunes volontaires dès le mois de juin, avant sa mise en œuvre pour tous les jeunes d’ici à 2026.
Des revendications communes
Mais jusqu’à présent, les appels à se mobiliser, l’an dernier contre Parcoursup ou cette année contre les réformes du lycée et le SNU, n’avaient rencontré que peu d’écho.
“On veut une révolte générale”, déclare à l’AFP Nabil Hedar, porte-parole du SGL, un des syndicats lycéens, appelant de ses vœux “un mouvement intergénérationnel, avec les ‘gilets jaunes'”. Il réclame des “impôts plus justes” et “une dissolution de l’Assemblée nationale”, rejoignant ainsi certaines revendications de “gilets jaunes”.
Louis Boyard, président de l’UNL, autre syndicat lycéen, dit se mobiliser contre les réformes du bac, de la voie professionnelle, Parcoursup et le SNU. Avec pour mot-clé sur les réseaux sociaux #RevancheLycéenne.
“Il n’y a pas de raison que la contestation des ‘gilets jaunes’ ait un impact sur les lycées”, dont la réforme a été conçue “en consultation avec de nombreux acteurs et plusieurs milliers de lycéens”, a répliqué le ministre de l’Éducation Jean-Michel Blanquer sur LCI. Le pourcentage de lycées bloqués est “très faible” au regard des 4 000 lycées sur le territoire, et les blocages sont le fait d’“une toute petite minorité”, a estimé le ministre.
Selon lui, “beaucoup de gens essayent de s’engouffrer dans la brèche de contestation des ‘gilets jaunes’ pour tout et n’importe quoi”. À Nice, la moitié des lycées ont été bloqués en tout début de matinée, selon le rectorat, avant qu’un millier de jeunes, dont certains avec un gilet jaune sur le dos, n’investissent les artères du centre ville.
“Il y a les classes surchargées mais on soutient aussi les ‘gilets jaunes’. Pour nous, dans un an ou deux, l’essence on va aussi devoir la payer. On fait des études pour ne rien gagner”, a déclaré un lycéen de 17 ans, élève au lycée des Eucalyptus.
L’ombre de mai 68 plane résolument sur la mobilisation.