Il est 3 h 45, je marche accompagnée de Jonathan, le vent se lève, il fait froid… J’ai froid ! Nous marchons en direction de la maison, silencieux. Aucun bruit ne se fait entendre, sauf la respiration (énervée ?) de Jonathan. Il n’y a pas de raison particulière, il s’énerve toujours pour rien.
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Plus on s’approche de la maison, plus ma respiration s’accélère et mon souffle devient fébrile. Jonathan me demande ce qui se passe. Impossible de lui répondre tellement l’angoisse m’envahit. Il répète une deuxième fois la question qui reste, elle aussi, sans réponse. Et là… le premier coup fuse, c’est une claque. Avec ces paroles-là : “Oh, tu n’entends pas que je te parle ?” Puis, sans réponse de ma part, les coups se multiplient…
Rouée de coups, personne ne m’aide
Je ne peux pas me retenir de hurler de douleur car les coups deviennent insupportables. Il est presque 4 heures, les rues de Paris se font désertes, quelques oiseaux nous survolent… Et là, j’aperçois au loin un couple s’approcher lentement de nous, moi, allongée au sol en sanglots, et lui, me ruant de coups et criant à tue-tête. Je me dis que le couple va s’arrêter afin de me porter secours, je prie dans ma tête pour que cela arrive. Mais cela ne se produit pas. Il nous dépasse en accélérant le pas et en détournant la tête du côté opposé. Je comprends qu’il ne s’arrêtera pas…
Je suis désespérée, je suis au sol, ensanglantée, et personne ne daigne me venir en aide. Je vais sûrement mourir sur ce bout de trottoir qui pue la pisse. Un peu après, je sens quelqu’un au-dessus de moi. Je relève mes yeux, mais sans oser bouger, pour regarder qui c’est. C’est un passant, pour qui je dois gêner le passage, qui m’enjambe pour pouvoir passer.
J’ai fini par porter plainte
C’est à ce moment précis que j’ai compris que je n’ai que moi-même sur qui compter, pour puiser le peu de forces qui me restent pour me relever et aller à l’hôpital panser toutes ces blessures.
À l’hôpital, ils me soignent, dans un premier temps. Ensuite, ils me demandent ce qui m’est arrivé et si je souhaite porter plainte. Je leur explique et leur dis que je ne souhaite pas porter plainte. Ils respectent ce choix, à contrecœur, mais comme je suis majeure et que les faits ne sont pas assez “graves”, ils ne peuvent pas le signaler sans mon accord.
Je n’ai pas porté plainte, au début. Il y avait ce sentiment de loyauté mélangé à cette peur qu’il exécute ses multiples menaces proférées à mon encontre. Jusqu’au jour où ma vie a été en danger. J’ai dû le faire, car sinon je mourrais. Aujourd’hui, je suis en plein processus de reconstruction.
Pas la peine de jouer les héros, appelez la police
Ce n’était pas la première fois que ça arrivait, que ce soit en espace public ou clos. Et comme à chaque fois, personne n’a rien fait. Je reproche au couple et au passant de ne pas être intervenus, de ne pas avoir tenté quelque chose, ne serait-ce qu’appeler la police. Ils ne l’ont pas fait, peut-être par manque de considération, par peur, par égoïsme… Je suis assez partagée, mais le premier sentiment qui me vient, c’est de la colère, mélangée à de l’incompréhension.
Je ne suis jamais intervenue de manière directe car je n’ai pas encore eu à le faire dans ma vie. Mais je suis intervenue en aval pour conseiller, essayer d’orienter mes connaissances grâce à mon expérience sur ce sujet.
Peu importe ce qu’une femme a fait, elle ne mérite en AUCUN cas les coups portés à son encontre. Si vous êtes témoins d’une scène de ce type dans la rue, pas la peine de jouer les héros ! Mettez-vous dans un coin et appelez la police, vous serez beaucoup plus utile ainsi et vous sauverez des vies !
Zora, 23 ans, en formation, Paris
Ce témoignage provient des ateliers d’écriture menés par la ZEP (la zone d’expression prioritaire), un média d’accompagnement à l’expression des jeunes de 15 à 25 ans, qui témoignent de leur quotidien comme de toute l’actualité qui les concerne.