La mer Méditerranée reste cette année encore la voie maritime la plus meurtrière pour les migrants.
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Côtes libyennes, août 2018. © Guglielmo Mangiapane / SOS MEDITERRANEE / AFP
Des arrivées en baisse, mais plus de 2 260 morts en Méditerranée : c’est le triste bilan de l’année 2018. La Méditerranée est restée l’an dernier la voie maritime la plus meurtrière pour les migrants, selon le Haut-Commissariat aux Réfugiés (HCR), qui a appelé les pays européens à “sortir de l’impasse”.
Un total de 2 262 migrants sont “morts ou portés disparus” en tentant de traverser la Méditerranée en 2018, contre 3 139 l’année précédente, selon les chiffres publiés par le HCR sur son site internet.
Du côté des arrivées, 113 482 personnes ont traversé la mer pour gagner les côtes des pays méditerranéens en 2018, soit une baisse par rapport à l’année précédente, où 172 301 personnes avaient fait le chemin. À ces chiffres, il faut ajouter quelque 6 700 personnes enregistrées dans les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla en territoire africain, mais qui n’ont pas traversé la mer : au total, 120 200 migrants sont arrivés en Europe l’an dernier.
Ces chiffres marquent une chute drastique par rapport au “pic” de 1,015 million d’arrivées en 2015, au cœur de la crise des réfugiés. Mais pour les décès, la baisse est moins marquée : il y avait alors eu près de 3 800 morts. En proportion, la mortalité a d’ailleurs un peu augmenté en 2018 par rapport à l’année précédente.
“La Méditerranée est depuis plusieurs années la voie maritime la plus meurtrière au monde pour les réfugiés et les migrants, avec un taux de mortalité qui a fortement augmenté”, s’est inquiétée la porte-parole du HCR en France Céline Schmitt.
“En 2019, il est essentiel de sortir de l’impasse actuelle et de mettre fin à des approches au cas par cas, c’est-à-dire bateau par bateau, pour savoir où débarquer les passagers secourus”, a-t-elle ajouté, en plaidant pour un “mécanisme régional de débarquement”.
L’année 2018 a été marquée par une crise diplomatique entre pays européens autour de l’accueil des réfugiés, notamment après que le gouvernement italien, au fort discours anti-migrants, a fermé les ports aux bateaux humanitaires cet été.
L’Espagne en première ligne
Alors que la voie principale de migration passait jusque-là par la Libye et l’Italie, l’Espagne est ainsi redevenue l’an dernier la première porte d’entrée en Europe, avec 55 756 arrivées par la mer, contre 22 103 en 2017. Cette tendance pourrait se poursuivre puisque les garde-côtes espagnols ont indiqué mercredi avoir porté secours à 401 migrants au cours des deux premiers jours de 2019.
De son côté, l’Italie a enregistré 23 371 arrivées, en chute libre par rapport au chiffre de 2017 : 119 369. Quant à la Grèce, elle a compté 32 497 arrivée. En 2018, le premier pays d’origine des migrants était la Guinée avec 13 068 ressortissants, suivi du Maroc, avec 12 745, et du Mali, avec un chiffre de 10 347. La Syrie n’était que le quatrième pays d’origine des arrivants, suivie de l’Afghanistan et de l’Irak.
Autre conséquence, plusieurs navires humanitaires ont été contraints d’errer en Méditerranée depuis l’été, faute de savoir où accoster. Chaque situation s’était débloquée avec un accord trouvé dans l’urgence entre pays européens pour la répartition des réfugiés.
En ce début 2019, deux navires d’ONG allemandes transportant 49 migrants ont reçu l’autorisation de s’“abriter” dans les eaux maltaises. Les Pays-Bas se sont dits prêts à accueillir une partie d’entre eux, “à condition que d’autres pays européens fassent de même”.
Mais les navires humanitaires, qui dénoncent des entraves croissantes à leur action, sont de moins en moins nombreux : début décembre, Médecins sans frontières et SOS Méditerranée ont dû mettre un terme aux opérations de l’Aquarius, devenu un symbole de la crise européenne sur l’accueil des migrants, à bord duquel Konbini avait embarqué pendant deux semaines :
MSF avait alors pointé la responsabilité des gouvernements européens dans les décès en Méditerranée, “en soutenant les garde-côtes libyens pour intercepter les personnes en mer”.
Au large de la Libye, une vaste zone est aujourd’hui placée sous la responsabilité de garde-côtes libyens, dont le niveau de formation et d’équipement est régulièrement dénoncé côté ONG.
“Nous réitérons notre appel à la communauté internationale pour qu’elle lutte contre les causes profondes des déplacements et les facteurs qui forcent les gens à entreprendre des voyages de plus en plus dangereux et périlleux”, a rappelé Mme Schmitt.
Konbini avec AFP