Argentine : les députés votent la légalisation de l’avortement

Argentine : les députés votent la légalisation de l’avortement

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© RONALDO SCHEMIDT / AFP

Les députés argentins ont voté vendredi la légalisation de l'avortement, mais le projet doit encore être approuvé par le Sénat.

En 2018 déjà, les députés avaient voté la loi autorisant l’interruption volontaire de grossesse (IVG), avant que le Sénat ne la rejette quelques jours plus tard.

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Le projet de loi autorisant l’avortement jusqu’à la 14e semaine de grossesse, déposé par le président péroniste de centre gauche, Alberto Fernandez, a obtenu le soutien de 131 députés, 117 se sont prononcés contre et six se sont abstenus. La différence est plus importante qu’en 2018, où le projet était passé de justesse à l’Assemblée, avec 129 voix pour, 125 contre et une abstention.

“Cette fois, nous avons une chance de faire adopter le projet de loi au Sénat” bien qu'”il y ait des indécis”, a déclaré à la radio la sénatrice péroniste Norma Durango, annonçant un vote prévu à la Chambre haute le 29 décembre.

“L’avortement est légal dans les pays occidentaux et dans d’autres pays développés à forte religiosité, comme l’Italie, l’Espagne et l’Irlande. Enfin nous avançons en Argentine”, a déclaré à la télévision le ministre de la Santé, Ginés Gonzalez Garcia.

Dans ce pays de 45 millions d’habitants majoritairement catholiques et terre natale du pape François, l’avortement n’est légal qu’en cas de viol ou de danger pour la vie de la mère, selon une loi en vigueur depuis les années 1920.

Pionnière pour la promulgation de lois sur le mariage homosexuel et l’identité de genre en Amérique latine, l’Argentine pourrait, si le texte est adopté par le Sénat, rejoindre Cuba, l’Uruguay, le Guyana et la province de Mexico, les seuls pays à autoriser l’IVG sans conditions dans la région.

“Je suis catholique mais je dois légiférer pour tout le monde. C’est un problème de santé publique très grave”, avait déclaré le président Alberto Fernandez, évoquant les 3 000 femmes décédées depuis 1983 des suites d’avortements clandestins.

Lors de l’annonce du dépôt de sa proposition de loi mi-novembre, le président péroniste avait estimé que “la criminalisation de l’avortement n’a servi à rien. Chaque année quelque 38 000 femmes sont hospitalisées pour complications lors d’avortements clandestins”.

Selon le gouvernement, entre 370 000 et 520 000 avortements clandestins sont pratiqués chaque année dans le pays.

“Décider de leur corps”

Au cours de la session parlementaire extraordinaire entamée jeudi, la députée du parti gouvernemental Ana Carolina Gaillard a estimé que “le débat n’est pas pour ou contre l’avortement mais pour un avortement avec ou sans conditions sanitaires de sécurité”.

Le député d’opposition Martin Maquieyra (droite) a lui appelé à “choisir la voie difficile de l’éducation sexuelle et de la contraception”.

Massées devant le parlement, des manifestantes pro-IVG, portant un foulard vert symbole de leur lutte, réclamaient “avortement légal maintenant, gratuit et à l’hôpital”. “C’est une question de santé publique, de justice sociale et de droits humains”, a dit à l’AFP Valeria Bonetto, médecin de 48 ans.

“Les femmes ont le droit de décider de leur corps, l’État doit les protéger. Que les législateurs qui votent contre sachent qu’ils porteront sur leurs mains le sang des femmes qui meurent d’avortements clandestins”, a déclaré Melisa Ramos, 21 ans.

De l’autre côté de barrières les séparant, les adversaires de la loi, arborant des foulards bleu ciel, exhibaient des poupées représentant des bébés en sang. Une de leurs banderoles clamait : “Toute vie vaut la peine.”

C’est la neuvième fois qu’un projet de loi sur l’IVG est déposé devant le parlement, mais c’est la première fois que l’initiative provient de l’exécutif.

Il prévoit une “objection de conscience” pour des professionnels de santé refusant de le pratiquer mais les oblige à “orienter le patient vers des soins” appropriés.

Parallèlement, un “Plan des mille jours” entend également “renforcer l’accès aux soins pendant la grossesse et lors des premières années de vie d’un enfant” pour les familles en situation de vulnérabilité financière.

Konbini News avec AFP