Un an avant les JO 2024 à Paris, le chef du village olympique Charles Guilloy travaille d’arrache-pied à la confection des menus qui seront servis à quelque 15 000 athlètes aux origines, goûts et besoins nutritionnels très variés, et sent monter “la pression” face à l’ampleur de la tâche.“Il faut qu’ils se sentent comme à la maison”, dit-il à l’AFP. Son objectif ? “Participer à la performance des athlètes par la nutrition et respecter leurs habitudes alimentaires en couvrant leurs besoins nutritionnels.” Employé par Sodexo Live !, filiale du géant de la restauration collective Sodexo qui assure la restauration de grands évènements sportifs (Super Bowl, Roland-Garros, Tour de France…), il supervisera la fourniture des 40 000 repas servis au quotidien au village des athlètes situé à Saint-Denis lors des Jeux olympiques (26 juillet-11 août) et paralympiques (28 août-8 septembre). Les menus devront “offrir un éventail de prestations suffisamment large pour que tous les athlètes s’y retrouvent”, complète Carole Galissant, directrice de la nutrition pour Sodexo France, en répondant aux “attentes d’un monde multiculturel et multicultuel“. “Certains produits sont plus acceptés dans certains pays que dans d’autres : vous mettez tout ça dans le shaker et… vous vous arrachez les cheveux !”, admet-elle en souriant. Il faut ainsi prévoir du riz gluant pour les athlètes asiatiques, des haricots rouges pour les Sud-Américains, des haricots noirs pour les Nord-Américains aux délégations fournies. Avec toujours trois types de cuissons pour les légumes : vapeur, rôtis, sautés. Les restaurants du village olympique, installés dans la Cité du cinéma de Saint-Denis, au nord de Paris, auront quatre thématiques distinctes, dans des “quartiers” dédiés à la cuisine française, asiatique, mais aussi à celles des Amériques et d’Afrique, des Caraïbes et du Moyen-Orient. Il faut “répondre à des demandes d’athlètes très variées : on ne nourrit pas une petite gymnaste de 35 kilos comme le judoka Teddy Riner…”, dit Mme Galissant. Certains sont des sportifs professionnels qui viennent avec leur propre coach en nutrition, d’autres peuvent “être plombiers zingueurs” en dehors de leur vie de sportif de haut niveau et ne pas s’alimenter de manière aussi rigoureuse pendant les compétions, ajoute-t-elle.
“500 recettes d’ici octobre”
En outre, les besoins nutritionnels d’un même athlète varient avant, pendant et après la compétition : “S’il a perdu, il voudra peut-être se remonter le moral avec un burger”, interdit pendant sa préparation physique, remarque encore la nutritionniste. Les plats servis au village des athlètes afficheront en français et en anglais leur valeur nutritionnelle et leur quantité de protéines, glucides et lipides, afin que chacun puisse manger conformément à ses besoins.
La cuisine, “c’est aussi un moment de partage”, rappelle Charles Guilloy, et il s’agira aussi de faire honneur à la gastronomie française, en vedette au village des athlètes : les attentes sont fortes car l’évènement offre une vitrine exceptionnelle au plan international. Épaulé par les nutritionnistes de l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (INSEP) et par Hélène Defrance, médaillée de bronze en voile aux JO 2016 et nutritionniste, Sodexo a soumis sa sixième version des menus au Comité d’organisation des JO de Paris 2024, qui les a à son tour transmis au CIO.
Puis, les équipes de Sodexo affineront les questions d’approvisionnement, le chiffrage des coûts, les enjeux logistiques conformément au cahier des charges qui impose 80 % d’aliments produits en France (et même 100 % pour la viande et les produits laitiers) dont 30 % de bio et un quart venant de “moins de 250 kilomètres”.
Le chef Charles Guilloy doit “écrire 500 recettes d’ici le mois d’octobre”, explique-t-il à l’AFP, avant de prendre possession en janvier de ses quartiers dans la Cité du cinéma. À partir du 10 juillet 2024, quelque 200 cuisiniers et un millier de personnes (serveurs, logisticiens, etc.) commenceront à travailler pour nourrir les premiers athlètes arrivés quelques jours avant le début des épreuves. “La pression est déjà là… mais c’est une bonne pression”, confie le chef.