Lorsqu’il débarquait en France, il y a quelques années, le chef Gianmarco Gorni ne s’imaginait peut-être pas atterrir à la tête d’une des tables les plus courues des gourmets et des curieux de la capitale, et l’une des plus saluées dès son ouverture. Peut-être encore moins en proposant une partition culinaire italo-américaine, à rebours des codes traditionnels de la véritable gastronomie italienne. Pourtant, c’est littéralement ce qu’il vit actuellement au restaurant Vecchio, culminant sur les hauteurs du Perchoir Ménilmontant, qu’il pilote en cuisine, épaulé de son élégant acolyte Hubert Niveleau, aux petits soins en salle. Un petit bout de New York à Paris — dont on vous a déjà parlé en détail –, dans une salle aux faux airs de loft, plongée dans une lumière enveloppante et tamisée à la bougie. Un pari audacieux, mais brillamment relevé, surtout dans une rentrée automnale où les ouvertures de restaurants ambitieux se bousculent et se succèdent (Faubourg Daimant, Datil, Oktobre…).
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Alors, ça donne quoi ? Une cuisine festive, réjouissante, généreuse et décomplexée. Mais, attention, succéder à des résidences de chefs qui ont marqué l’esprit des Parisiens qui s’attablent, celle (expérimentale) d’Adrien Cachot, celle (végétale) de Manon Fleury et celle (iodée) d’Alice Arnoux, est un exercice à la fois flatteur, mais aussi sacrément intimidant. À ce jeu-là, le moins que l’on puisse dire, c’est que Vecchio s’en sort haut la main. Complet et full house à presque chaque service, le restaurant et Gianmarco Gorni — repéré dans l’inoubliable Goguette, puis dans Top Chef — déroulent une cuisine maîtrisée et assumée, qui s’appuie déjà sur de solides classiques. On pense ici à l’arancino au cheddar et à la mayo épicée et aux meatballs juteuses, plongées dans une sauce tomate réduite pendant des heures : deux incontournables de la carte.
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Mais ce que l’on attend surtout ce soir-là, et depuis un moment déjà, c’est la pasta. On dit souvent qu’un plat de pâtes, que l’on pense toujours très simple d’apparence et de préparation, serait le meilleur moyen de jauger et d’évaluer la qualité d’une cuisine italienne et, par extension, d’un chef. Alors on se lance dans le grand bain en commandant toutes les pasta disponibles à la carte. All in, avanti !
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D’abord, les pâtes au citron et à la poutargue, des bucatini ici, al dente, enrobées et généreuses, entament le début d’une belle trilogie. La seconde assiette à atterrir sur notre table est, sans aucun doute, le plat que l’on attendait le plus – et celui que le restaurant sert le plus depuis l’ouverture – : les linguine Alfredo au romarin, recouvertes d’un déluge de truffe fraîche râpée minute et à table (en option). L’Alfredo, un classique de la gastronomie italo-américaine est ici maîtrisé à la perfection. Crémeux et dorlotant, avec le charme de pâtes à la limite du fondant, conformément à ce que l’on espère se voir servir dans une version newyorkisée de l’Italie. Les fusilli alla vodka, eux, font largement le boulot, mais doivent se contenter de vivre dans l’ombre de leurs deux congénères qui, sur la carte, attirent tous les feux des projecteurs.
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Aperçus sur la table voisine : une salade César et un chicken parm qui nous donnent déjà envie de revenir. Quant à nous, pour clôturer le repas, un sorbetto glacé, façon granité, parfait pour faire glisser le tout, un impeccable Negroni au mezcal choisi parmi une grande proposition de cocktails, et deux desserts : une coupelle de tiramisù très aérien (et peu sucré), et le déjà célèbre bombolone au chocolat. Un beignet qui aura le pouvoir de réveiller en vous toute la nostalgie des churros au Nutella des fêtes foraines de votre jeunesse.
Un petit mot, enfin, pour la salle. Un sommelier, poétique et sûr de son affaire, qui fait renouveler la cave à vin tous les quatre matins et qui conte et récite sur le bout des doigts toutes les rocambolesques histoires des vins naturels qu’il propose. Puis une équipe en salle bienveillante, chaleureuse, qui nous offre enfin une vraie parenthèse dans notre automne et une expérience que l’on ne vit qu’une fois… ou plusieurs, à condition de revenir. Le restaurant est au sixième étage (avec ascenseur) et se cache derrière un dédale de couloirs, mais l’aventure et l’ascension valent le coup. Après tout, ce n’est pas tous les jours qu’on a la chance d’aller croquer New York pour si peu d’efforts, le temps d’une soirée et sans vol long-courrier.
On s’habille comment ? Il n’y a pas de règle, mais pour une expérience totale, optez pour une petite chemise bien repassée, votre pantalon préféré ou un petit apparat classe. Ce soir, on met les petits plats dans les grands et on sort les jolis souliers du placard.
On y mange quoi ? Quelques antipasti pour se mettre en jambes, des pâtes, sans hésiter, et on n’oublie pas de garder une place pour le dessert.
On (re)commande quoi ? L’arancino, les meatballs et les pâtes Alfredo.
On y va quand ? Du mardi au samedi, le soir, mais quand vous voulez : il y a un service unique de 19 heures à 23 heures qui vous permet de rester à table pour refaire le monde… sans risquer d’être poussé vers la sortie pour la libérer pour d’autres convives.
On y va avec qui ? En couple, avec quelques amis, ou beaucoup d’amis — et vous aurez ainsi droit à la table d’hôtes secrète, à l’écart de la salle.
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Vecchio au Perchoir Ménilmontant
14 Rue Crespin du Gast (Paris 11e)
Du mardi au vendredi, de 19 heures à 23 heures
Infos et réservations ici.