La cuisine a cela de magique qu’elle peut nous faire rêver, voyager, nous bousculer et nous remuer, mais aussi parfois nous duper. À Paris, on connaît évidemment les trompe-l’œil viraux et sucrés de Cédric Grolet, mais les vraies boss en la matière opèrent dans un restaurant que les connaisseurs et les curieux s’arrachent dans la capitale, Privé de dessert.
À voir aussi sur Konbini
Il y a quelques semaines, les fondatrices du restaurant, Sephora Nahon et Sophie Journo, ont publié un livre rassemblant plus de cinquante recettes à refaire facilement à la maison, qui nous offre ainsi la possibilité d’accéder à cette science culinaire ludique et déroutante. On voulait en savoir plus, alors on est allés leur poser quelques questions.
© Guillaume Belvèze
Konbini | Quelle était l’idée derrière ce livre de recettes unique en son genre ?
Sophie Journo | Ça répondait à plusieurs objectifs : fêter les 10 ans de Privé de dessert et marquer le coup avec la publication de nos recettes les plus iconiques, mais aussi répondre en images et en recettes à la question qu’on nous pose tout le temps : “C’est pas trop dur à faire, les trompe-l’œil ?” Tout ça avec des recettes faciles à refaire à la maison, donc.
On voulait un livre illustré avec des photos hyper esthétiques et à la fois décalées. On était hyper fans de l’univers de Guillaume Belvèze et on a été ravies qu’il accepte de bosser avec nous.
© Guillaume Belvèze
Pourquoi avoir pensé votre restaurant entièrement autour des trompe-l’œil ?
En ouvrant le resto en septembre 2013, l’idée originelle était juste de proposer de la cuisine de bistrot, savoureuse et simple, à base de produits frais et 100 % faite maison, dans un cadre hyper chaleureux, avec un accueil qui te fasse sentir comme un habitué dès la première visite, tout en restant très pro. Sauf qu’on s’est vite rendu compte que, sans concept, il y avait peu de chances qu’on parle de nous.
C’est là que mon associée, Sephora, a eu l’idée de plats en trompe-l’œil avec une carte complètement inversée (des entrées et des plats qui portent le nom de desserts et en prennent l’aspect, et vice versa). Le gros challenge : que le concept ne soit pas juste un gimmick et que la priorité reste le goût des plats et l’accueil des clients.
Au moment de l’ouverture, les émissions de cuisine ont commencé à proposer des épreuves de plats en trompe-l’œil et, contrairement à ce qu’on pourrait penser, ça a été un vrai plus : ça a familiarisé le public au principe de trompe-l’œil culinaire. C’est pour ça aussi qu’on a pu être full dès l’ouverture.
© Guillaume Belvèze
Les trompe-l’œil, c’est vraiment facile à reproduire à la maison ?
Easy-peasy! Le mot d’ordre : pas d’ingrédients/d’ustensiles/de techniques compliqués. Tu vas juste avoir certaines recettes plus longues que d’autres à réaliser mais c’est tout.
L’idée était vraiment de reprendre les plats les plus emblématiques du resto en les adaptant à ce qu’on a à la maison. Pour nous, c’était un no-go de te dire de prendre ta Microplane pour zester des citrons caviar de chez Bachès (j’ai bossé cinq ans chez Ducasse donc je sais de quoi je parle [rires]).
Et on a profité du shooting pour retester nous-mêmes les recettes. Pour les choses un peu plus “techniques” (usage du siphon, pâte à chou…), on a carrément fait des recettes à part, hyper détaillées, en début de livre. Et on a également fait deux pages avec diverses astuces sur les ingrédients, le dressage, les arts de la table…
Comment tu expliques la “mode” du trompe-l’œil ?
D’abord, une appétence croissante pour les dressages, au-delà du simple goût, mais aussi l’envie d’une vraie “expériencialisation” de la sortie au resto : tu ne vas pas juste dîner quelque part, tu cherches le truc en plus. Puis les émissions de cuisine qui ont mis les trompe-l’œil sur le devant de la scène depuis une dizaine d’années, et clairement l’influence des réseaux sociaux qui en sont assez friands.
© Guillaume Belvèze
C’est quoi ton trompe-l’œil préféré ?
Le cookie et verre de lait qui est, en fait, une tartiflette ! Vraie dinguerie comfort food.
Et le plus facile ?
Le brownie (épaule d’agneau confite, brunoise de légumes) qui a un ratio facilité/wow effect assez incroyable. Et l’avantage est que tu peux le faire avec à peu près toutes les viandes à cuisson longue, même une conserve de confit de canard les jours de grosse flemme.
Et le plus bluffant ?
L’éponge (aka deux couches de financier amande/pistache). D’autant plus qu’elle est servie avec du liquide vaisselle (coulis orange-passion) et de la mousse (appareil à meringue au citron). Et en plus c’est méga bon, ce qui ne gâche rien.
Cuisine en trompe-l’œil (éditions Marie Claire), par Sephora Nahon & Sophie Journo, fondatrices de Privé de dessert.