“Lalalalalalala Tibo Pinooot” : lorsque l’idole du cyclisme français a enfin descendu les quelques marches du bus, dans lequel il s’était “remis la tête à l’endroit” pendant près d’une heure après l’arrivée à Bergame, les chants ont repris de plus belle pour célébrer la fin d’une trajectoire singulière, faite de hauts puissants et de bas tragiques. Le Franc-Comtois de 33 ans, dont les victoires mais surtout les échecs déchirants ont cimenté une popularité unique, a été acclamé toute la journée sur une course qu’il a remportée en 2018 et dont il était le héros, ce samedi.
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Par les organisateurs qui lui ont fait livrer à domicile, à Mélisey en Haute-Saône, une chèvre baptisée Vittoria et qui l’ont fait s’élancer en première ligne à Côme sous les applaudissements de ses désormais ex-collègues. Par les coureurs ensuite qui, à l’image de Remco Evenepoel, sont venus un par un lui taper sur l’épaule pendant la course pour l’accompagner vers sa nouvelle vie. Et par ses supporters évidemment qui, après la folie du dernier Tour de France, ont monté de toutes pièces un nouveau “virage Pinot”, à l’entrée de la vieille ville de Bergame, transformée en stade de foot, noyée sous les chants et les fumigènes.
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Balle de flipper
Dès la matinée, ce kop, inédit dans l’histoire du cyclisme, a envahi les rues de la cité lombarde pour chanter à la gloire de son héros. Ils ont été rejoints dans le virage par la famille du coureur et son manager Marc Madiot, haranguant la foule. “Je ne m’attendais pas à ce qu’il y ait autant de monde. C’était un vrai chaos, un vrai bordel comme j’aime, c’était fou, un moment intense”, a raconté Pinot qui, en passant dans le virage à son nom, a rebondi comme une balle de flipper entre les rangées de supporters.
“Il laisse quelque chose en héritage que personne n’avait fait avant lui, un public festif au bord de la route tout en étant respectueux des coureurs”, a commenté Marc Madiot, moins ému que sur le Tour de France où il avait complètement craqué, mais fier du parcours et de l’empreinte laissée par son coureur. À l’arrivée, ralliée en 37e position au côté de ses équipiers Quentin Pacher et Rudy Molard, Pinot a claqué la bise à tout l’encadrement de l’équipe, vêtus de T-shirts avec son nom floqué dans le dos, avant de s’engouffrer dans le bus où on faisait monter des pizzas. “C’est une belle histoire qui se termine dans un décor magnifique”, a glissé son père Régis, au bord des larmes devant la ferveur déclenchée par son fils.
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“Par la grande porte”
“Il y a toute la famille, il sort vraiment par la grande porte”, ajoutait Julien, le frère et l’entraîneur de Pinot. Lorsque le grimpeur de Mélisey est redescendu du bus, ils étaient des dizaines à l’acclamer, lui et ses équipiers, dans une ambiance extatique. “J’avais beaucoup d’interrogations avant de venir ici mais je ne regrette pas. C’était une belle fête et je m’en souviendrai toute ma vie”, a lâché le triple vainqueur d’étape sur le Tour de France qui avait accumulé les pépins de santé ces dernières semaines.
Terminer dans le décor magnifique de Lombardie, théâtre de son plus bel exploit, est “grandiose forcément”, a-t-il ajouté. “L’avoir emporté ici est ma plus grande fierté. Pendant la course, je me suis dit : aujourd’hui je suis incapable de gagner mais je l’ai gagnée celle-là et beaucoup de coureurs aimeraient en dire autant”, a-t-il dit. Il va désormais retrouver ses animaux dans sa ferme de Mélisey, goûter au silence et prendre du recul avec un sport dont il a souvent détesté les contraintes, lui qui “n’aime pas être au centre de l’attention”. “Ça y est, c’est fini, c’était un truc de fou, je ne suis pas champion du monde mais j’ai le meilleur public du monde”, a-t-il conclu.
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