Tabliers bleus, chemises blanches immaculées, mâchoires serrées et plateaux en équilibre, des dizaines de serveuses et serveurs se sont affronté·e·s ce dimanche 24 mars dans les rues de Paris pour remporter la “course des garçons de café”, en amont des Jeux olympiques. Des centaines de Parisien·ne·s, touristes interloqué·e·s et familles en promenade se sont retrouvé·e·s sur la place de l’hôtel de ville pour assister à la résurrection de cette course atypique, qui trouve ses racines au début du XXe siècle, et dont Londres et la capitale française se disputent la paternité. Faute de sponsors, la dernière édition parisienne avait eu lieu en 2011.
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“Pour me préparer, je suis venu hier faire un peu de repérage”, raconte Thierry Petit, qui fête le jour même ses quarante ans comme serveur de brasserie à Paris. “Après, j’ai mangé une andouillette et bu une bière, c’est à peu près tout”, s’esclaffe ce colosse proche de la soixantaine, à l’accent des faubourgs. “Mais fêter ça ici, avec tous ces gens, en plus une année d’olympisme, ça me donne des ailes !”
Les professionnel·le·s de l’hôtellerie-restauration, hommes et femmes, et de tout âge, souvent venu·e·s entre collègues, se massent au départ. Un café, un verre d’eau et un croissant : voilà la charge qu’ils doivent porter, d’une main et avec élégance, sur deux kilomètres au cœur du quartier du Marais. Un jury les attend à l’arrivée pour contrôler leur temps mais aussi les niveaux des breuvages.
“Question de concentration”
La maire de Paris Anne Hidalgo coupe le ruban, le top est donné, les participant·e·s s’élancent. Interdiction de courir, la course prend des allures de compétition de marche nordique, l’ambiance en plus. Concentré·e·s mais souriant·e·s, les serveurs défilent sous les acclamations, trouvent même le temps d’échanger des vannes, tout en lançant des regards vers les tasses de café qui roulent de gauche à droite au rythme des foulées.
“Mais on fait ça pendant douze heures tous les jours, week-ends et jours fériés compris”, rappelle Pauline Van Wymeersch, serveuse au café Le Petit Pont, à Paris, et première dans la catégorie des femmes. Son secret ? “Vingt ans de métier et de bonnes jambes.”
Les serveur·se·s se bousculent dans l’étroite rue Saint-Martin, réalisent d’acrobatiques mouvements de plateau pour se dépasser, sous les yeux des client·e·s des terrasses qui se lèvent pour les encourager. La course est terminée en une bonne vingtaine de minutes. C’est Samy Lamrous, 26 ans, qui l’emporte, avec le meilleur temps et un plateau intact. Comme la plupart des participant·e·s, ce maître d’hôtel au restaurant parisien La Contrescarpe n’a pas spécialement préparé la compétition. “J’ai suivi le mouvement et j’ai fait ce qu’on m’a dit, comme d’hab”, rigole-t-il. “Ça tire un peu sur les cuisses mais c’est surtout une question de concentration : il faut garder l’équilibre alors qu’il y a tous ces gens qui t’acclament… mais, finalement, j’ai pu faire ma remontada ‘à la parisienne !’ et ravir la première place.”
“L’âme de Paris”
Pari réussi pour la mairie, qui a organisé la manifestation avec Eau de Paris (qui gère l’eau potable dans la ville) et les professionnel·le·s du secteur. “C’était une façon de mettre en avant la culture de notre ville”, commente Pierre Rabadan, adjoint chargé du Sport, des Jeux olympiques et paralympiques à la mairie de Paris, qui a lui-même participé à la course. “Le garçon de café, de restaurant, c’est un marqueur très fort de la culture française.” Le fait que l’événement ait pu renaître de ses cendres en 2024 ne doit rien au hasard : “On sait qu’il y a beaucoup d’attentes des visiteurs autour du patrimoine français, de la table française, et organiser cette course est une manière de les accueillir, eux aussi”.
“Les cafés, c’est l’âme de Paris !”, ajoute Dan Lert, adjoint chargé de la Transition écologique et président d’Eau de Paris. “La course est une espèce de ‘teasing’ pour tous ceux qui vont venir, qu’ils puissent voir ce qui les attend.” Et d’ajouter que la compétition sera reconduite l’année prochaine. Les gagnant·e·s de cette édition sont invité·e·s à la cérémonie d’ouverture des JO le 26 juillet.