À 25 ans, Marion a deux passions : le rap et la bouffe. Ces deux fils rouges, ces deux “obsessions”, ont guidé son parcours de vie et se mélangent aujourd’hui dans une petite aventure numérique qui a retenu notre attention : un compte Instagram dédié aux punchlines et paroles de rappeurs et rappeuses qui évoquent la nourriture. Pour en savoir plus sur ce projet, on est allés lui poser quelques questions.
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Salut, Marion, comment as-tu eu l’idée de ce compte ?
J’écoute beaucoup de rap, et j’avais le réflexe de mettre de côté les lyrics food que j’entendais dans les sons rap français. J’en avais tellement dans mon téléphone qu’un soir, je me suis dit : “Et si je les publiais sur Twitter ?”. Ça a donc commencé comme ça, en 2021, puis je me suis lancée sur Instagram, avec des extraits de clips. Ça a mieux pris que sur Twitter mais sans pour autant décoller. J’ai continué plus ou moins assidûment parce que j’étais toujours en veille sur le rap de manière générale et que c’était un réflexe de noter les lyrics. Dernièrement, j’ai lancé le compte sur TikTok.
Comment est-ce que tu travailles et mets de côté les paroles ?
J’écoute majoritairement du rap et dès que j’en entend une, j’ai gardé le réflexe de noter. C’est un genre de veille constante. J’en ai énormément sur mon téléphone. Je pourrais être beaucoup plus régulière qu’actuellement.
Tu as beaucoup de suggestions des internautes ?
Pas vraiment, c’est un petit compte. Et puis, je pense qu’une grande majorité de gens n’écoutent pas vraiment les paroles, la plupart du temps. Une fois, on m’a demandé comment je faisais pour repérer ces lyrics-là, et j’ai simplement répondu que je les notais dès que j’en entendais. On m’a dit “Mais tu écoutes vraiment tout ?”. C’est ce qui me fait dire ça. Je pense que beaucoup entendent la musique plus qu’ils ne l’écoutent. Mais sinon, il est déjà arrivé que, dans mon entourage, on me fasse des suggestions.
“Ramène l’assiette, j’nourris des bouches et j’suis même pas mama”, Shay
C’est quoi, les plats ou les nourritures qui reviennent le plus dans les paroles que tu sélectionnes ?
Je ne sais pas vraiment (elle rit). Le peu que j’ai pu repérer et noter n’est pas exhaustif sur ce qui existe, puis je ne privilégie pas spécialement tel aliment ou tel plat. Après, c’est vrai qu’il y a certains mots/groupe de phrases récurrents et qui reviennent parce qu’ils font partie des expressions courantes : “être dans la sauce” ; “boire la concurrence” ; “j’ai la dalle”. Le rap est un genre où les artistes sont hyper-créatif·ve·s.
C’est-à-dire ?
Il y a des lyrics qui sont simples mais efficaces dans les métaphores qu’elles renvoient : exemple : “J’suis dans une sacrée salade, il m’faut 2 avocats.” de Maes. Après, parfois, c’est simplement juste pour la rime (ou pour du pur descriptif) et ça me convient très bien aussi ! Exemple : “Ils ont grave le seum, posé j’bois mon Capri-Sun” d’Oboy. Et puis parfois c’est un peu plus poussé dans les jeux de mots ou références, parfois ça fait passer des messages plus forts que simplement imager une situation. Cela permet aussi de partager des émotions. Quand Dinos dit : “On a grandi comme au bled, nos parents ils s’excusent pas, Quand ils ont tort, ils nous font à manger”. Je la trouve hyper-touchante parce qu’il partage quelque chose sur le langage émotionnel de ses propres parents, quelque chose qui est culturel.
“On a grandi comme au bled, nos parents ils s’excusent pas, Quand ils ont tort, ils nous font à manger”, Dinos
Ce sont des paroles qui font écho à ton parcours personnel ?
J’ai des origines d’Asie du Sud-Est et celle-là m’avait particulièrement parlé parce que c’est souvent l’observation que je fais des parents asiatiques, les moins expressifs transmettent leur amour par des attentions et les plats qu’ils préparent en font partie. L’alimentation porte une forte dimension culturelle et sociologique. Et puis les phases sur la nourriture permettent de parler de tous les sujets de fond, l’ascension sociale (Shay : “Ramène l’assiette, j’nourris des bouches et j’suis même pas mama” dans “Cocorico”), la double culture (Médine & Massoud : “Mi rebeu-mi asiat comme un Malabar bi-goût” dans “Barbapapa”)…
C’est qui, le rappeur ou la rappeuse qui fait les meilleures références culinaires ?
Question trop difficile ! Joker !
C’est quoi, ta punchline de bouffe préférée ?
“Vive la part, nique la miette” d’Alpha Wann dans le titre “Louvre”, parce qu’elle m’inspire la détermination. C’est un cran au-dessus en termes de finesse qu’un assez explicite : “Je veux ma part du gâteau”. Et puis Doria pour son : “La place d’la femme, c’est dans la cuisine, hein ? J’t’envoie du monde histoire d’te cuisiner.”
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