Avant Pat Cleveland, Naomi Sims, Beverly Johnson et Naomi Campbell, il y a eu Donyale Luna, it girl des années 1960. Décédée à l’âge de 33 ans, on connaît trop peu le parcours de cette star qui a marqué son époque et ouvert la voie aux beautés noires dans l’industrie de la mode. Le film, réalisé par Nailah Jefferson, restitue l’aura éthérée de la mannequin et artiste, et raconte un parcours marqué par le racisme.
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Donyale Luna est née Peggy Ann Freeman en 1945, à Detroit, dans une famille modeste. Ses parents ont migré du sud des États-Unis pour trouver du travail. Le couple se sépare plusieurs fois et la famille est marquée par des épisodes de violences conjugales. Donyale Luna est une fille à part, une “weirdo” comme on dirait aujourd’hui. Très tôt, elle s’invente un univers et des origines multiples. Elle adopte son nom d’artiste au lycée, quand elle fait ses premières scènes de théâtre. Toute sa vie, elle entretiendra le mystère (et une certaine ambiguïté) sur son identité raciale.
En 1963, le photographe David McCabe est en reportage dans les usines de Detroit quand il la repère et lui conseille de se lancer dans le mannequinat. Elle arrive à New York deux ans plus tard et connaît rapidement le succès. Richard Avedon, pape de la photo de mode, lui fait même signer un contrat d’exclusivité d’un an. Ses accomplissements sont toutefois sans cesse accompagnés d’un backlash. En janvier 1965, un dessin d’elle fait la couverture de Harper’s Bazaar mais sa couleur de peau est éclaircie. Malgré cela, le lectorat raciste de Bazaar se plaint de sa présence. Cette même année, sa mère tue son père violent et Donyale ne se rend pas aux obsèques.
Elle quitte vite l’Amérique pour Londres, et elle trouve parfaitement sa place dans le bouillonnement de la capitale. C’est là qu’elle fait la couverture de Vogue UK, grâce au photographe David Bailey. Elle connaît vraiment la consécration, le Time consacre même l’année 1966 comme la Luna Year ! Malgré cela, le racisme de l’industrie de la mode entrave son parcours et elle n’aura jamais les opportunités qu’elle méritait. Qu’à cela ne tienne, Luna prend ses distances progressivement et cherche à développer sa carrière d’actrice. Elle joue notamment dans un film de Federico Fellini, Satyricon. Surtout, Donyale Luna rencontre l’amour au début des années 1970 : il s’appelle Luigi Cazzaniga et il est Italien et photographe. Ensemble, ils ont une petite fille, nommée Dream. Dans le documentaire, elle lit les nombreuses notes de sa mère. Les deux femmes se sont malheureusement peu connues, car Donyale Luna meurt d’une overdose alors que Dream n’a que 18 mois. Avec des images d’archives inédites et des dessins de Luna, le documentaire permet une plongée sensible dans la réalité de cette pionnière.