Appel à candidature, au féminin : l’écurie franco-anglaise Alpine lance un programme visant à accroître la place des femmes ingénieures et pilotes, avec pour objectif de trouver la future championne du monde de Formule 1 dès 2030. La F1 est un sport mixte. Sur le papier. Dans les faits, en 72 ans, seules deux femmes ont pris le départ d’un Grand Prix, Maria Teresa de Filippis en 1958 et Lella Lombardi de 1974 à 1976.
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Face à ce déséquilibre total, les écuries commencent à bouger. Avant Alpine, Ferrari a notamment accueilli en 2021 la première jeune femme dans sa prestigieuse académie, la Néerlando-Belge Maya Weug, rejointe en 2022 par l’Espagnole Laura Camps Torras.
Avec son programme “Rac(H)er”, traduction mêlée de “pilote” et de “elle”, Alpine veut “faire tomber les barrières sociétales et les clichés” qui empêchent les femmes d’accéder à l’élite du sport automobile, explique à l’AFP son PDG, Laurent Rossi.
Concrètement, l’écurie va lancer dans les prochaines semaines un appel à candidature pour recruter quatre ou cinq adolescentes de dix à douze ans, douées pour le karting, où tous les pilotes font leurs classes. L’objectif, en mener au moins une à faire partie des 20 de la F1 d’ici huit ans, le temps estimé pour les former et grimper les échelons.
Suivre les femmes astronautes
“Il faut vraiment qu’on puisse dès le plus jeune âge pouvoir détecter le potentiel et suivre le programme d’entraînement”, explique Claire Mesnier, directrice ressources humaines d’Alpine. Mais d’abord, la marque dieppoise veut démonter une vieille croyance. Montrer que “les femmes sont au moins aussi capables que les hommes de conduire des F1”, explique Rossi.
“Le critère numéro 1 n’est pas la puissance physique, loin de là. La preuve en est, Fernando Alonso continue à piloter très bien, et si un homme de 40 ans peut piloter une Formule 1 alors une femme au sommet de sa forme à 28 ans en est tout à fait aussi capable”, estime-t-il, faisant appel au pilote espagnol de son écurie, aux côtés du Français Esteban Ocon. Il prend aussi l’exemple des “femmes qui pilotent des avions de chasse, qui sont astronautes, qui encaissent des G autrement plus violents ; certes potentiellement un peu différents”.
Alpine va travailler avec “l’Institut du cerveau sur la partie cognitive, des physiothérapeutes et kinés sur la partie physique, un thésard sur la partie émotionnelle”, abonde Claire Mesnier, pour “rechercher si sur ces différentes composantes il y a des différences ou pas” entre hommes et femmes. Les résultats serviront à affiner l’entraînement, à le rendre plus spécifique.
La marque sportive du groupe Renault promet aussi le lancement d’un fonds pour financer les talents féminins, s’impliquera directement financièrement et s’engage à trouver des sponsors extérieurs.
Passer de 12 % à 30 % d’ingénieures Alpine
“La société évolue dans le bon sens de ce point de vue-là, de plus en plus de marques embrassent cette cause, donc on devrait assez facilement en trouver qui pensent que ça serait une bonne idée de rééquilibrer les choses”, avance Rossi.
Mais au-delà des aspects physique et financier, le plafond de verre serait surtout culturel. La sous-représentation féminine en sport automobile découle de celle du secteur de l’ingénierie. En France comme en Angleterre, où se situent les deux usines moteur et châssis de l’écurie, ces filières comptent respectivement 32 % et 23 % d’étudiantes, pour encore moins d’ingénieures diplômées, contextualise Claire Mesnier.
“Et dans des écoles très pointues, spécialisées, comme l’Estaca (École supérieure des techniques aéronautiques et de construction automobile, ndlr), qui est une des écoles cibles, il n’y a que 8 % d’étudiantes”, regrette-t-elle encore. Alpine, qui ne compte que 12 % d’ingénieures, se fixe pour objectif d’arriver à 30 % en cinq ans, en instaurant la parité dans le recrutement.
Une campagne de sensibilisation est également prévue, avec des salariées d’Alpine mais aussi “des partenariats avec d’autres femmes de l’industrie spatiale, de l’armée de l’air, pour faire passer le message que ces carrières sont possibles pour les jeunes filles”.
Et Claire Mesnier de rappeler le mantra du sport : gagner. “Ce qu’on souhaite pour le projet Alpine, c’est d’avoir le meilleur pilote dans le baquet mais aussi les meilleurs ingénieurs qui vont designer les meilleures voitures. Et aujourd’hui, je ne suis pas certaine de pouvoir dire qu’on a exploré l’ensemble du pool de talents, sachant que 50 % de l’humanité sont des femmes.”
Konbini Sports avec AFP