Il y a quelques jours, le chef Mohamed Cheikh, gagnant de la dernière saison de Top Chef, est parti en Italie. Après une année chargée, avec notamment l’ouverture remarquée et saluée d’un restaurant éphémère, Manzili, c’était l’occasion de prendre un peu l’air. Pour Konbini, il nous raconte ce périple culinaire qui l’a amené de Rome aux Pouilles, en passant par Naples, Monopoli, Lecce et une multitude de petits villages.
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Konbini | Salut Mohamed. L’année qui vient de s’écouler a été particulièrement chargée pour toi. Comment ça va ?
Mohamed Cheikh | Écoute, très bien. Plein de projets, plein d’idées, c’est cool.
Entre mille projets, tu es récemment parti en Italie. Tu avais une idée derrière la tête ?
Ça s’est fait un peu au dernier moment, sur un coup de tête. Je suis parti avec Yacine Sadik, un ami photographe aussi connu sous le nom de Sadik Sans Voltaire. Depuis quelques mois, j’ai eu envie de me rapprocher encore davantage des produits et des richesses de la Méditerranée. C’est un axe que je souhaite encore plus travailler pour ma cuisine. Alors on s’est donné six jours pour sillonner l’Italie, avec pour objectif de découvrir des produits, un terroir…
De Rome à Lecce, dans les Pouilles, ça fait une trotte en seulement six jours.
Ouais (rires). On n’a pas chômé et on a bombardé. On roulait entre deux et trois heures par jour, en se levant tôt le matin afin de voir et de découvrir le plus de choses possibles. Les gens pensaient que j’étais en Italie pour un tournage, ou un truc du genre, mais c’était avant tout un délire avec un ami photographe.
Qu’est-ce que tu as découvert là-bas ?
On a la chance, en France, d’avoir des personnes qui importent des produits italiens de grande qualité. Mais j’y ai découvert des produits, des techniques et des usages que je ne connaissais pas auparavant. J’ai découvert les incroyables étals de marchés de Rome et de Naples, des gens qui nous faisaient goûter leurs pépites, un fromager qui avait des fromages qu’aucun Français ne doit connaître – il m’a d’ailleurs fait goûter son yaourt, le meilleur de toute ma vie.
Tu as eu l’occasion de cuisiner ?
Dans un petit village, à Polignano a Mare, on s’est rendus dans une pizzeria qu’on nous avait conseillée. On rigolait et mon ami m’a incité à aller parler au chef, afin de papoter et, pourquoi pas, de préparer une pizza moi-même. Au début, il pensait que je me moquais de lui quand je lui ai dit que j’étais aussi chef, donc j’ai dû me résoudre à lui montrer mon compte Instagram. Il a rigolé et il m’a fait entrer en cuisine. J’ai fini plein de farine, mais c’était un moment extraordinaire.
Est-ce que ce voyage a conforté des attentes ou, au contraire, fait tomber des préjugés ?
Je n’avais aucun préjugé sur les Italiens ou l’Italie en général. J’ai découvert que c’est un peuple très attaché à son terroir, à ses produits, au bien-manger. Là-bas, les gens sont récompensés pour leur travail dès qu’il vaut le détour, de la petite pâtisserie à la ricotta à la pizza. Dans le sud du pays, j’ai aussi trouvé que ça ressemblait beaucoup à l’Algérie, mais en Europe… Dans le sens où l’on retrouve dans l’architecture, les pierres ou les plages de certaines villes, une énergie similaire. Il y a, dans cette partie de l’Italie, une part de tradition encore très forte que l’on observe peu, ou plus beaucoup, en France.
Il paraît que tu as eu une aventure avec la police locale…
Oui, c’est vrai (rires). Dans certaines villes en Italie, tu as des radars de contrôle. Alors qu’on était à Bari, on s’est fait arrêter par une patrouille de police qui nous a demandé pourquoi notre véhicule avait été identifié dans cinq villes en l’espace de quelques jours. J’ai dû leur expliquer que j’étais chef, qu’on voyageait… Ils ont compris, mais j’en ai profité pour leur demander l’adresse d’une petite grand-mère qui fabriquait des orecchiette à la main dans la région. Ils ont décidé de nous y amener directement. On est donc arrivés chez elle, quasiment sous escorte policière, c’était marrant.
Il y a un produit qui t’a marqué plus qu’un autre ?
Franchement, j’ai été marqué par la manière dont la ricotta est omniprésente, dans de nombreuses préparations. J’en ai mangé en flan, en pâtisserie, en beignet, dans un croustillant, en cake, sur des pizzas… Mais après, je pourrais te citer mille choses : le gambero rosso à 7 euros le kilo, les fromages…
Tu me parlais aussi du café.
Ah, ouais, le café à la crème. Je n’avais jamais vu personne le préparer ainsi et le servir de cette façon. Dans mon prochain restaurant, c’est certain, je le servirai comme ça. Mais je veux vraiment potasser le sujet de la ricotta, aussi. Les pâtes, aussi. J’ai découvert qu’il y avait toute une culture derrière, et que ce n’était pas uniquement un vulgaire paquet qu’on achète dans un rayon de magasin. J’ai aussi flashé sur les beignets qui, là-bas, sont bien plus fins et plus légers que ceux qu’on a la chance d’avoir en France.
Tu as pris combien de kilos en quelques jours ?
4 kilos, presque 1 par jour (rires).
C’est quoi les projets pour le futur ?
Déjà, je compte partir dans d’autres pays de Méditerranée pour découvrir de plus près leurs richesses et leurs patrimoines gastronomiques. Je travaille sur des projets avec le groupe Bertrand, qui m’a accompagné pour mon restaurant Manzili et je sors un livre de cuisine début mars. Je prévois également de partir bientôt en Côte d’Ivoire, en voyage humanitaire, pour creuser des puits d’eau et rénover des écoles.
Retrouvez les aventures de Mohamed Cheikh ici.