Depuis plusieurs années déjà, la réputation de McDonald’s aux États-Unis se voit écornée, voire carrément entamée, par un petit scandale qui lui colle aux basques, et dont la chaîne de restauration peine à se dépêtrer. Une série de dysfonctionnements qui lui ont valu des remontrances, des enquêtes gouvernementales et une intervention de la Commission fédérale du commerce face à l’étendue dudit désastre. Le problème en question ? Les machines à McFlurry qui tombent en panne, régulièrement et très facilement, sans qu’on ne sache vraiment anticiper ou contrôler ces arrêts incontrôlables.
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Il y a quelques années, en 2020, un ingénieur s’était d’ailleurs amusé de cette incongruité industrielle et commerciale en lançant un site, McBroken, qui répertorie et cartographie, en temps réel, les machines à McFlurry qui ne fonctionnent pas à travers les États-Unis. Une façon de mettre en lumière l’ampleur de ces dysfonctionnements et la guerre intestine à laquelle se livrent le fabricant des machines à McFlurry qui garde secrètes les techniques et astuces de réparation, et des petits génies de l’informatique qui tentent depuis de nombreuses années d’infiltrer le système pour mettre fin à ce monopole d’entretien et de maintenance auquel sont soumis les franchisés.
Les petits génies en question étaient parvenus à créer des boîtiers, nommés Kytch, à installer directement sur la machine à McFlurry, permettant aux franchisés d’accéder à plusieurs fonctionnalités essentielles à la bonne utilisation de la machine, et de décrypter les messages d’erreur. Une manière de contourner l’accord conclu entre McDonald’s et Taylor, le fabricant des machines à glace et le seul à être habilité à intervenir pour les réparer une fois défectueuses.
Aujourd’hui, un autre acteur vient s’attaquer frontalement au problème des machines à McFlurry aux États-Unis dont 10 % de la flotte, en moyenne, serait en panne à travers tout le pays : iFixit, une communauté de personnes réparties dans le monde et “qui s’entraident pour réparer les objets qui les entourent”, comme elle aime à se décrire. “À n’importe quel moment, environ 10 % des machines à glace de McDonald’s sont en panne. Cet été, nous avons eu pour mission de résoudre ce problème de deux manières différentes : nous nous sommes attaqués aux entrailles délicates des machines à glace commerciales et à la loi américaine sur le droit d’auteur qui les rend difficiles à réparer.”
“La machine surchauffe si elle est trop utilisée pendant un certain temps. Cela entraîne la sortie de substance pâteuse ou l’arrêt complet de la machine et le refus de fonctionner jusqu’à ce qu’elle se réinitialise et refroidisse.”
Après avoir lancé une pétition afin de sensibiliser l’opinion publique et de convaincre le gouvernement de lâcher du lest afin de donner l’autorisation – et la possibilité technologique – aux réparateurs indépendants d’intervenir sur les machines, l’organisme est passé à la vitesse supérieure. Quelques-uns de ses membres ont fait l’acquisition d’une machine à McFlurry utilisé par McDonald’s aux États-Unis et ont passé plusieurs heures à tenter de la faire fonctionner. En dépit de “pièces facilement interchangeables” et d’un système électronique pas nécessairement très alambiqué, la machine “a craché de nombreux codes d’erreur absurdes, contre-intuitifs et visiblement aléatoires, même si vous avez passé des heures à lire le manuel”, ont-ils témoigné.
En demandant au gouvernement américain d’intervenir sur la législation, iFixit espère avoir l’opportunité de développer un boîtier similaire aux petits génies de Kytch “capable de lire les codes d’erreur sur la machine”, ce qui est encore impossible “à cause de la loi sur le droit d’auteur”, regrette Elizabeth Chamberlain, directrice du développement durable d’iFixit. Une loi qui empêche les gens “de contourner les contrôles ou les verrous numériques pour accéder à une œuvre protégée par le droit d’auteur”.
Alors, pour s’affranchir de cet obstacle, iFixit s’est associée à l’ONG Public Knowledge et ont déposé ensemble une demande “d’exemption à la loi pour les machines à glace”. Un coup de poker, certes, mais qui a déjà fonctionné par le passé – iFixit a déjà obtenu gain de cause pour la Xbox, les tracteurs et des smartphones. Mais iFixit précise que cette bataille ne suffira pas, puisqu’en cas de victoire, il ne sera toujours pas autorisé à distribuer un outil, un boîtier, ou que sais-je encore, destiné à réparer les machines à McFlurry. Pour cela, le Congrès devra réintroduire la Freedom to Repair Act, une loi qui rendrait légal le contournement des obstacles technologiques et numériques pour réparer un produit. Et ça, c’est une autre paire de manches.