L’incroyable épopée de celle qui a testé (tous) les sièges du métro parisien

L’incroyable épopée de celle qui a testé (tous) les sièges du métro parisien

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Par Robin Panfili

Publié le

"Une belle moquette, ça ne se décide pas. Ça ne se conceptualise pas. Ça s’impose à vous. Elle est, c’est tout. Elle est là, et elle existe."

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L’internet est merveilleux. Et pas forcément besoin d’aller jusqu’à l’autre bout du monde pour le faire rayonner. Pour preuve, ce week-end, à Paris, deux internautes se sont lancés dans une expérience assez inédite dont on ne se lassera pas de sitôt. Durant tout un dimanche, Charlie et deux amis se sont aventurés dans les sous-sols de la capitale afin de tester… l’intégralité des moquettes des sièges de chaque ligne du métro parisien. Pourquoi ? Comment ? Dans quel but ? On a glissé dans les DM de la protagoniste de cette épopée – documentée dans un thread Twitter incroyable – pour qu’elle nous dévoile les coulisses et les secrets de ce drôle de périple. Interview exclusive, ou presque.

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Konbini | Bonjour, Charlie. Pour commencer, qui es-tu ?

Charlie | Je suis Charlie Medusa, une humble personne obsédée par le métro, les grenouilles et la ponctuation, qui raconte sa vie sur Twitter à des fins thérapeutiques. Mon vrai nom, c’est Capucine Delattre, mais pitié, je déteste ce prénom, je ne vous autorise à m’appeler comme ça que si vous payez mon salaire ou m’avez mise au monde.

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Et tu fais quoi dans la vie, à part passer ton dimanche dans le métro parisien ?

Dans la vie, d’après certaines personnes pas contentes qui ont commenté mes tweets, je suis une chômeuse qui a beaucoup de temps à perdre. Sinon, en réalité, je suis écrivaine et éditrice, ce qui tombe bien car je suis extrêmement bavarde et que j’ai des choses à évacuer.

On a besoin de comprendre. Quand as-tu eu l’idée de tester toutes les moquettes des sièges de métro ?

À la base, j’ai eu l’idée de tester les moquettes des sièges de métro principalement comme prétexte pour marathoner l’ensemble des lignes du réseau parisien en un minimum de temps. Pour justifier ma lubie, j’ai dit que je ferai ça pour célébrer le cap des 20 000 abonnés sur mon compte Twitter. Et puis comme les gens sont fous et que j’ai eu des trucs à faire entretemps, notamment vivre, j’ai laissé passer deux mois (ressenti un quart d’heure) et maintenant, il y en a 32 000, des abonnés, du coup, c’est raté.

“Je suis sortie grandie de cette expérience, principalement parce que je me suis fait regarder très bizarrement par les gens qui me voyaient surgir dans une rame, m’asseoir sur un strapontin et quitter les lieux à la hâte à la station suivante.”

Comment t’es-tu organisée pour choisir l’itinéraire de métro parfait ?

Je suis ambitieuse mais aussi lucide, j’ai donc très vite reconnu que je serais incapable de calculer l’itinéraire idoine, alors j’ai demandé à ma copine qui est ingénieure si c’était dans ses cordes, car j’ai du respect pour ses compétences. Elle a tapé la question dans Google et il s’avère que des gens plus intelligents que moi avaient déjà fait tous les calculs et proposé le parcours parfait étape par étape. Du coup, je dirais qu’en tout, ça a pris 0,081 seconde (d’après ladite recherche Google).

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Tu t’es basée sur une méthodologie et des critères précis pour évaluer ces moquettes ?

Quand il s’agit d’une entreprise aussi exigeante, éprouvante et technique que l’évaluation des moquettes de métro, je pense qu’on doit être humble et avouer qu’on n’aura pas la rigueur pour le faire de façon objective, rigoureuse et scientifique. Alors, j’ai laissé l’endroit me parler plutôt que d’imposer mes préjugés sur l’endroit. Je me posais sur le siège et je laissais sa vérité infuser en moi. Je suis sortie grandie de cette expérience, principalement parce que je me suis fait regarder très bizarrement par les gens tout autour qui me voyaient surgir dans une rame, m’asseoir sur un strapontin et quitter les lieux à la hâte à la station suivante. Ma consolation, c’est qu’ils regardaient encore plus bizarrement mon ami Karim qui me prenait en photo.

“Une belle moquette, ça ne se décide pas. Ça ne se conceptualise pas. Ça s’impose à vous. Elle est, c’est tout. Elle est là, et elle existe.”

Pendant cette expérience, quelles ont été tes plus grandes surprises et découvertes ?

Ma plus belle surprise, ç’a été de voir que mes amis m’ont suivie de bout en bout alors que vraiment, à leur place, je ne sais pas si j’aurais été capable d’un tel geste. Plus grande surprise encore : non seulement ils sont restés, mais je crois qu’ils ont apprécié. Quant à ma plus grande déception, elle réside bien évidemment dans le fait que la ligne 9 m’a honteusement fermé ses portes au nez, m’empêchant de conclure la boucle que j’avais si bien commencé à boucler.

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Quels enseignements tires-tu de ce périple ?

Je ressors de ce périple avec la confirmation du fait que oui, mon intérêt spécifique pour le métro est bel et bien inépuisable (un intérêt spécifique, c’est le nom d’un centre d’intérêt très précis et très de niche chez une personne neuroatypique, notamment autiste comme moi, qui va se passionner durablement et profondément pour ce sujet à un degré qui va souvent étonner les personnes non autistes). En arpentant les couloirs du lieu pendant quatre heures avec mes deux amis, j’ai passé un des plus drôles après-midi de ma vie. Et ça, ça veut dire que tant qu’il y aura des métros, je serai heureuse. Ce qui est plutôt cool quand on y pense.

“La meilleure moquette de siège, c’est celle de la ligne 2, parce qu’on a beaucoup lutté pour dénicher une place enfin libre.”

Alors, c’est laquelle la meilleure moquette de siège ?

La meilleure moquette de siège, c’est celle de la ligne 2, parce qu’on a beaucoup lutté pour dénicher une place enfin libre. Quant à la pire moquette, c’est bien évidemment celle de la ligne 3, rongée comme les ongles d’un lycéen prébac, qui témoigne à elle seule du cruel traitement financier subi aujourd’hui par la RATP.

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C’est quoi le secret d’une belle moquette de siège de métro ?

Une belle moquette, ça ne se décide pas. Ça ne se conceptualise pas. Ça s’impose à vous. Une belle moquette se moque d’être moderne ou vintage. Elle est, c’est tout. Elle est là, et elle existe.

Et sinon, à quand la même épopée dans les RER parisiens, ou même les TER de France ?

Tout dépendra du degré de motivation de mes amis à repartir pour un tour, et de la volonté des président·e·s des régions de notre pays à me financer les trajets TER. Moi, en tout cas, je suis prête.

Si vous en voulez davantage, vous pouvez suivre les aventures de Charlie ici.