Partie de Rennes le 3 mai 2017, Tao a rallié Saint-Pétersbourg en skate en quatre mois. Une performance physique et artistique, captée par le réalisateur Mehdi Rondeleux, qui sera prochainement diffusée sur la plateforme KuB.
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Il y a des gens qui sont un peu fous, dans le bon sens du terme. La skateuse Tao en fait partie. Le 3 mai 2017, elle a entrepris de prendre sa planche à roulettes et de partir de Rennes pour se rendre à Saint-Pétersbourg. Sur Mappy, ça indique 3 104 km, mais Tao a pris des chemins de traverse, des routes perpendiculaires et très peu de raccourcis.
Son aventure, elle l’a partagée avec une équipe de vidéastes, notamment le réalisateur Mehdi Rondeleux, qui en a fait un documentaire, Tant qu’on ira vers l’Est. Superbe objet visuel et artistique, le film raconte certes cette odyssée, mais part aussi à la rencontre des cultures alternatives des pays traversés et de poètes improvisés, loin du sponsoring et des grands contests.
Prendre le temps
“Le skate a été un prétexte pour faire ce voyage, explique Mehdi Rondeleux. C’est un objet qui nous permettait d’avoir un déplacement assez lent. On voulait prendre le temps, se retrouver hors des capitales. Mais ça représente aussi un milieu. Il y a des contacts qu’on a eus dans plusieurs pays grâce à cela, pour en faire quelque chose de plus grand, autour de la jeunesse européenne, du voyage…”
Parmi ces pays, la France, bien sûr, mais aussi la Belgique, les Pays-Bas, l’Allemagne, la Pologne ou encore les pays baltes. Tout au long de ce parcours, Tao a rencontré beaucoup de monde : deux Belges vivant dans les bois près de Modave, des poètes qui récitent devant la caméra de Mehdi, des musiciens, des artistes et Louis, ce jeune qui vient d’achever la construction d’un skatepark mobile qu’il range dans un camion.
“Louis est quelqu’un qui dort très peu, qui a énormément d’énergie. Son but, c’est d’aller se greffer à des festivals, de musique ou non, et d’y organiser des contests ou des sessions. Il a aussi l’idée de partir dans des pays où le skate est très peu développé ou très peu accessible. Et ça s’inscrit aussi dans une volonté de maintenir cet aspect alternatif du skate, sans sponsors.”
Des galères et des pépins physiques
Tant qu’on ira vers l’Est montre des modes de vie alternatifs, comme l’explique Tao :
“Le skate est proche de ces milieux. Mais il y a aussi l’aspect huppé, avec les marques, les sponsors, les gros événements. Celui que je côtoie, c’est celui où les gens débarquent dans un lieu et construisent un skatepark avec quelques sacs de béton récupérés je-ne-sais-où. Construire ensemble, exister dans une communauté, avancer sans passer par des codes stricts… “
Avec son équipe, Mehdi Rondeleux a suivi les péripéties de Tao grâce à un camion dans lequel il a passé le plus clair de son temps. Mais un tel road trip comporte évidemment sa part de galères : le camion qui tombe régulièrement en rade, les pompes explosées au milieu de nulle part, le vol de matériel vidéo… Et bien sûr les blessures de Tao :
“J’ai eu de grosses douleurs aux pieds. J’ai fait une grosse chute et ai dû continuer ma journée de skate derrière. […] Chercher l’effort intense, ça permet de se pousser dans ses retranchements, de faire une introspection. Très vite, physiquement, le corps souhaite s’arrêter, et le mental doit prendre le dessus. C’est une recherche personnelle. Quand tu arrives devant les gens, tu es à pied, ça crée déjà un lien avant même la rencontre.”
Avec ses plans posés très oniriques, ses images de lotissements inertes, ses soirées au coin du feu, ses longues routes avalées en skate, Tant qu’on ira vers l’Est confronte la vie frénétique et parfois aseptisée de la ville à celle des gens rencontrés. Après être sorti dans quelques salles et avoir été présenté dans des festivals, notamment au Paris Surf & Skateboard Film Festival 2018, en septembre prochain, ce documentaire à ne pas rater sera prochainement disponible sur la plateforme bretonne KuB.