S’il est tout petit et tout mignon, le lapin ne fait pas que manger des carottes : au Japon, il est aussi une figure folklorique très populaire.
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Le lapin est très présent dans la culture japonaise, que ce soit dans les anime, les mangas, les peluches, les figurines les porte-clés ou encore les accessoires de mode qui ravissent les lolitas. Plus surprenant : on retrouve dans les différents lieux sacrés, sanctuaires et temples, des statues de lapins qui sont les gardiens des lieux.
Si le lapin marque tant la culture japonaise, ce n’est pas parce que sa frimousse est au summum de la mignonnerie, mais parce qu’il tient une place importante dans la mythologie du pays du Soleil-Levant. Tout commence par sa rencontre avec Ôkuninushi, l’un des grands héros du folklore nippon…
L’histoire du lapin blanc d’Inaba
Ôkuninushi est l’un des nombreux descendants de Susanô, l’une des divinités principales de la mythologie japonaise. Devant se rendre dans la province d’Inaba pour demander la main de la princesse Yagami, les 80 frères d’Ôkuninushi lui demandent de les accompagner pour porter leurs sacs. En chemin, ils rencontrent sur une plage un lapin écorché vif.
L’animal leur raconte qu’il a traversé la mer depuis l’île voisine, sur laquelle il s’ennuyait. Afin de rejoindre Inaba, il s’est joué des requins (ou des crocodiles, ça dépend des versions) en leur demandant de s’aligner dans l’eau pour les compter en sautant sur leur dos, et enfin résoudre l’une des plus grandes énigmes au monde : savoir qui des lapins ou des requins sont les plus nombreux. Le malin lapin réussit ainsi à traverser la mer, mais en arrivant sur le dernier requin, il avoue les avoir trompés et ne pas savoir compter. Vexé, le requin arrache la peau du lapin, qui réussit quand même à s’enfuir de justesse.
Les 80 frères d’Ôkuninushi conseillent au pauvre animal de se jeter dans la mer, puis de laisser sécher sa peau au vent pour soigner ses blessures. Seulement le sel contenu dans l’eau attaque la chair à vif du lapin, qui se tord de douleur sous les rires de la fratrie. Ôkuninushi lui conseille alors de se plonger dans l’eau d’une source, puis de se rouler dans du pollen de jonc. Le lapin s’exécute, sa peau guérit, et il retrouve son pelage blanc. En remerciement, il prédit à son sauveur que c’est lui qui épousera la princesse Yagami – ce qui, bien évidemment, se réalise.
Les sanctuaires du lapin blanc
La province d’Inaba est aujourd’hui la préfecture de Tottori, situé sur Honshu, l’île principale de l’archipel japonais. Dans la ville de Tottori, capitale éponyme de la région, se trouve un sanctuaire shintoïste qui célèbre ce chapitre de la mythologie nippone : Hakuto-jinja.
Hakuto-jinja est dédié au lapin blanc et à son bienfaiteur, Ôkuninushi, depuis considéré comme un dieu de la médecine. Les abords du sanctuaire sont décorés de statues plus mignonnes les unes que les autres et représentant des lapins. L’on y trouve même une statue à l’effigie d’Ôkuninushi, qui porte un sac, symbole de son rôle de porteur dans le voyage de ses frères.
On vient prier dans le sanctuaire pour guérir de maladies de peau – à l’instar du lapin qui a été soigné grâce aux conseils avisés du dieu guérisseur. Mais c’est aussi un lieu où des jeunes couples viennent afin de faire bénir leur relation, la légende du lapin étant aussi associée à l’union de Yagami avec Ôkuninushi. On peut également s’y procurer tout un lot de “kawaiieries” à l’image du lapin blanc, de petites statuettes à des peluches, en passant par des gâteaux fourrés à la pâte de haricot.
Et comme rien n’est jamais trop mignon quand il s’agit d’amour, le sanctuaire a mis en place une boîte aux lettres rose, ornée de lapins craquants, dans laquelle on peut poster des billets doux à destination de son âme sœur.
Le culte du lapin ne se restreint pas à la province de Tottori. À Nagoya, capitale de la préfecture d’Aichi (toujours sur l’île de Honshu), se trouve un autre sanctuaire dédié au lapin : Miwa-jinja. Celui-ci est décoré d’une statue de lapin que les passants caressent pour se porter chance. Une coutume si ancienne et pratiquée, que la pierre est usée au sommet de son crâne. Tout comme à Tottori, Miwa-jinja a développé un marketing kawaii autour du lapin afin d’entretenir le sanctuaire, et on peut donc y trouver des amulettes et divers porte-bonheur à l’effigie du lapin gardien des lieux.
Le lapin sur la Lune
On retrouve l’animal dans une autre légende japonaise : celle du lapin lunaire (qui fait également partie du folklore chinois). Un jour où il ne savait pas quoi faire, un dieu descendit sur Terre en prenant la forme d’un homme affamé. Et comme il s’ennuyait vraiment beaucoup, il se rendit dans une forêt pour mettre à l’épreuve les capacités des animaux à vivre dans les bois. Bien gentilles, les braves bêtes se démenèrent pour trouver de la nourriture pour le mendiant : le singe grimpa aux arbres afin de lui apporter des fruits, tandis que le renard chassa pour lui du petit gibier.
N’ayant pas les capacités de trouver de la nourriture pour le vieil homme, le lapin ne trouva pas meilleure solution que de se jeter dans la marmite qui chauffait sur le feu, faisant don de sa propre chair à l’affamé. Le dieu révéla alors sa véritable identité, sauva le lapin des flammes, et l’envoya vivre sur la Lune pour le remercier.
Depuis, les Japonais s’amusent à voir un lapin se dessiner parmi les cratères de notre satellite. Il semble y avoir appris à cuisiner, car on le voit en train de préparer des mochi, des gâteaux faits à base de pâte de riz pilonnée, que l’on fourre souvent de pâte de haricot.
Le lapin lunaire se retrouve dans la culture populaire, notamment dans les anime : le nom japonais de l’héroïne de Sailor Moon est ainsi Tsukino Usagi, soit “Lapin de la Lune” (et c’est pour ça qu’elle s’appelle “Bunny” en VF). Dans le neuvième épisode de Dragon Ball, “Les Carottes sont cuites”, un gang de brigands dirigé par Toto le lapin est vaincu et envoyé sur la Lune par Son Gokû où… ils finissent par faire des mochi en forme de lapins.
Ôkunoshima : l’île aux lapins
Impossible de parler du lapin au Japon sans présenter Ôkunoshima, une petite île (2,5 kilomètres de circonférence seulement) de la mer intérieure, au large d’Hiroshima, sur laquelle vivent des centaines de lapins en liberté. On peut donc se balader au milieu de ces adorables animaux, qui ne craignent pas les humains et qui viennent sans peur grignoter quelques friandises dans les mains des milliers de visiteurs chaque année.
On ne sait pas comment sont arrivés les premiers lapins sur cette île qui a accueilli une usine de gaz mortels pour l’armée impériale au XXe siècle. Mais quelques sources indiquent qu’il pourrait bien s’agir de sbires envoyés par un lapin géant sur la Lune…
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