Diam’s nous manque et tout est dépeuplé. Tous ceux de la “génération nan nan” s’en souviennent. Le 3 février 2006, Mélanie Georgiades, alias Diam’s, sortait Dans ma bulle, son troisième album solo. “La Boulette”, “Jeune Demoiselle”, “Confessions nocturnes”… de véritables tubes émergent du projet, les chiffres de ventes explosent et un indiscutable engouement se crée autour de la rappeuse, une des rares femmes dans cette industrie à l’époque. Quinze ans plus tard, plus qu’un effet de mode passager, Dans ma bulle a prouvé qu’il est en fait un véritable phénomène musical et social. Retour sur la plus grande prouesse de Diam’s, et l’un des meilleurs albums du rap français.
Après le succès de son dernier album Brut de femme, qui la révéle au grand public, l’artiste d’origine chypriote confirme son talent et sa place dans le monde du rap avec Dans ma bulle. De nombreux artistes participent à l’opus, notamment Tefa et Masta, qui en ont réalisé la plus grosse partie. Le musicien Luke vient donner un peu de ses talents de guitariste sur “Jeune Demoiselle”, Jacky Brown du groupe Nèg Marrons accompagne la rappeuse sur “Me revoilà” et, bien sûr, la chanteuse Vitaa qui compose le duo de “Confessions nocturnes”.
Encore plus intime que le précédent, ce projet est une réelle confession de Mélanie, plus que de Diam’s. Chacun des quinze morceaux de l’album commence par une introduction parlée, dans laquelle elle se dévoile peu à peu, avant de reprendre son flow puissant là où elle l’avait laissé. Avec “T.S.”, un morceau coup de poing sur sa tentative de suicide à l’âge de 15 ans, l’artiste se livre à cœur ouvert à son public. Diam’s n’a pas peur de parler de l’amour dans “Car tu portes mon nom”, mais aussi de quand il n’est plus là, avec “Feuille blanche” et “Jeune Demoiselle”, et du moment où, parfois, il fait mal, comme dans “Confessions nocturnes”.
Et si elle peut manquer d’amour, elle ne manque jamais de mots. Avec le titre “Dans ma bulle”, Diam’s raconte sa jeunesse dans une banlieue de l’Essonne. Une vie à la réalité compliquée et parfois pervertie qu’elle explique dans “De cause à effet”, avant de nous redonner espoir avec “Ma France à moi”, un message vibrant sur la beauté de sa France “qui se mélange”, de sa France “arc-en-ciel”. Avec “Petite Banlieusarde”, “Me revoilà” et “La Boulette” l’artiste exprime sa rage, mais aussi le mal-être de toute sa génération.
Des textes qui résonnent comme une révolte, une envie de dire (de crier plutôt) : “On est jeune, on est là pour tout casser et on n’est pas près de disparaître, que cela vous plaise ou non;” Le message est reçu 5 sur 5. Pour ceux qui n’auraient pas entendu, Diam’s s’adresse directement à la gent politique. À Marine Le Pen et au Front national surtout, dans le titre “Marine”, que l’artiste accuse sans filtre de “prôner la guerre quand nous voulons la paix” (et qu’elle emmer*e par la même occasion). Nicolas Sarkozy lui, se prend quelques balles perdues dans “La Boulette”.
Rappelons que Dans ma bulle sort près de deux mois après les violentes émeutes qui ont eu lieu dans les banlieues françaises fin 2005. Le racisme et les inégalités sont plus que jamais dénoncés, et la rappeuse se positionne comme une sorte de porte-parole avec ce projet aux textes engagés.
Et le public est réceptif. En 2007, Diam’s reçoit un disque de diamant pour cet album qui s’est vendu à plus de 750 000 exemplaires en seulement dix mois. La plus célèbre chanson de l’album, “La Boulette”, reçoit un disque d’or et de platine. Selon la SNEP, Dans ta bulle est l’album le plus vendu de l’année 2006 en France, il est aussi troisième en Belgique et dix-neuvième en Suisse. Il restera surtout le plus grand projet de l’artiste, ouvrant ainsi la voie à toutes les femmes souhaitant se lancer dans le rap.
Diam’s est le diminutif de diamant. Un diamant brut, pur, qu’on ne cesse de regretter depuis son retrait de l’industrie musicale au début des années 2010. Pour toujours, les fans resteront dans sa bulle, et pour les autres, il est grand temps d’y entrer.
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