Récupérer les invendus de nos restos préférés à moitié prix ? C’est ce que propose l’application Too Good To Go lancée en juillet 2016 en France.
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Une histoire de start-up comme on les aime
Après un brillant parcours étudiant, Lucie, ingénieure, intègre le graduate program d’une grande entreprise d’agroalimentaire où les jeunes recrues sont formées pour devenir cadres dirigeants. Elle passe par une multitude de postes, notamment pour y découvrir les processus de production.
Après quelques temps passés dans les usines, Lucie prend conscience que ce début de carrière au sein de la multinationale est en décalage avec ses valeurs. Elle y voit une nourriture pensée pour être standardisée, produite à grande échelle avec finalement peu de considérations pour la santé et l’environnement. Promise pourtant à une belle carrière, elle claque la porte de l’entreprise “dans l’incompréhension totale de son entourage professionnel“, raconte-t-elle.
Elle se rend alors en Norvège rejoindre son petit ami pour prendre le temps de réfléchir à un projet professionnel. Elle y découvre les joies de la sérendipité sur Internet : “J’allais de liens en liens et, très vite, j’ai découvert de belles initiatives collaboratives et d’autres manières de penser l’entreprise.”
Elle se passionne notamment pour l’idée d’”entreprise libérée”, formalisée par l’universitaire Frédéric Laloux qui prône une philosophie de travail où les salariés sont libres et responsables des actions et de leurs initiatives dans l’entreprise.
Longtemps animée par la volonté de lutter contre le gaspillage alimentaire, elle pense à un système permettant de collecter les invendus des restaurants avant leur fermeture. “J’ai repris mes cours de code pour tenter de développer moi-même mon application, dit-elle, avant de me heurter à de vrais soucis de faisabilité et de délais“. Elle décide alors de lancer un appel à collaboration sur le site Ouishare et rencontre une développeuse motivée par son initiative.
Alors que son projet se concrétise, elle apprend qu’un projet similaire au sien nommé “Too Good to Go” se lance au Danemark. Loin d’être découragée, elle prend contact avec l’entreprise qui l’accueille à bras ouverts : “Pour moi, collaboration is the new competition“, dit-elle.
L’équipe danoise, qui avait la volonté de s’ouvrir au marché norvégien, propose à Lucie d’y développer l’application sur place. Elle frappe à la porte de nombreux restaurateurs norvégiens et constitue petit à petit un réseau solide.
Comment ça marche ?
“Le principe de l’application est simple, explique-t-elle, l’utilisateur a la possibilité de se géolocaliser et de voir tous les restaurants participants. Il peut acheter un panier de denrées invendues qu’il paiera 2 à 3 fois moins cher et s’engage à venir le récupérer à un horaire communiqué par le restaurateur.” Et si, par chance, le commerçant a réussi à tout vendre avant la fin de la journée ? “Dans ce cas, bonne nouvelle, pas de risque de gaspillage, l’utilisateur qui a réservé un panier reçoit un message le prévenant qu’il n’aura pas besoin de se déplacer.”
Le contenu du panier dépend bien évidemment de ce qui reste au commerçant à la fin de la journée. “C’est un peu un panier surprise, mais il faut garder en tête qu’il ne s’agit pas d’un acte de consommation habituel, c’est un acte de consommation engagé“. Un acte de consommation anti-gaspi qui permet au commerçant de percevoir un complément de revenu sur lequel Too Good Too Go reçoit une commission.
Un projet en croissance
En 2016, Lucie décide de rentrer en France pour y développer l’application. Seule au départ, elle est vite rejointe par des bénévoles qui deviendront salariés à Paris et dans plusieurs villes de France. Ce petit groupe, composé par hasard de jeunes femmes majoritairement, démarche tous les jours de nouveaux commerces et restaurants.
Présent dans quatorze villes (Paris, Lille, Lyon, Bordeaux, Aix-en-Provence, Marseille, Strasbourg, Nantes, Toulouse, Rennes, Montpellier, Poitiers, La Rochelle et Niort), fort de 250 000 utilisateurs et de 700 commerçants partenaires en France, Too Good to Go poursuit sa croissance. En parallèle, Lucie se donne pour défi de créer une véritable entreprise libérée où vacances, et même salaires, sont décidés par les employés eux-mêmes.
Une histoire à suivre donc.