Pourquoi Thierry Marx milite pour une gastronomie moins chère

Pourquoi Thierry Marx milite pour une gastronomie moins chère

"On ne consomme plus de la cuisine, on consomme des chefs".

“On ne sait plus faire à manger de façon peu chère”, déplore le chef étoilé Thierry Marx, regrettant que la gastronomie française ait perdu la bataille face à l’industrie pendant la crise sanitaire. C’est en mettant “la cuisine dans du pain” qu’on peut renverser la tendance, assure le chef médiatique, qui a investi dans des boulangeries pour y proposer des sandwiches de qualité.

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Il lance le 21 juin une série de podcasts Sound Chef, avec comme première recette le “Ceasar Bread Maki”, hybride de sandwich au pain de mie et de salade César en forme de maki. Avec la fermeture des restaurants pour cause du Covid-19, “nous, les chefs, on a disparu pendant un an et qu’est-ce qui est resté ? Tout ce qu’on dénonçait : les chiffres d’affaires positifs n’étaient que dans la cuisine industrielle”.

“Burger King, McDo ou Pizza Hut ont fait des records de ventes. Et nous, la gastronomie française, on ne sait plus faire à manger de façon peu chère. Il y a un véritable intérêt de démontrer que les chefs sont capables de faire une cuisine bonne à manger, agréable à payer”, souligne Thierry Marx. “Les Italiens le font merveilleusement bien” et les Français sont à la traîne comme s’ils “n’avaient jamais su faire de pâtes, de sandwichs de qualité ou de ravioles pour manger dans la rue“, ajoute-t-il.

“Je suis souvent ulcéré de voir qu’il y en France Eataly” (un concept italien présent partout dans le monde réunissant dans un même lieu vente de produits alimentaires, restaurants et dimension terroir et pédagogique), mais rien de tel en version française, dit Thierry Marx. Reste que son restaurant Marxito, un fast-food sur les Champs-Élysées autour du sandwich au sarrasin bio inauguré en 2018, a définitivement fermé.

“Il y a eu une succession d’erreurs, un loyer excessif et un an de fermeture les week-ends” en raison des manifestations des “gilets jaunes” avant la pandémie, énumère-t-il. “Du point de vue gastronomique, cela a très bien marché, mais dans ces endroits, vous ne pouvez pas développer. Cela va renaître sous une autre forme”, assure Thierry Marx. En attendant, il a racheté des boulangeries pour y proposer “une grande partie de snacking”. “Si je mets de la cuisine dans du pain, cela peut faire des sandwichs gastronomiques. C’est ça qui m’intéresse aujourd’hui, un bon boulanger, une bonne cuisine”.

Dans un format audio, où il guide pendant près d’une heure pour chaque recette de sa voix posée et rassurante, Thierry Marx parle de “la cuisine de pain” et celle de rue “qu’elle soit française, japonaise ou américaine”. “C’est un moteur d’inspiration et d’intégration absolument incroyable”. “J’ai choisi les recettes les plus simples possible. On ne peut pas avoir quinze gestes compliqués“, souligne-t-il. Pour le bread maki, on fait la sauce César, on coupe la sucrine en morceaux, on cuisine le poulet avant de rouler ces préparations dans un pain toasté.

Cet outil avec lequel le chef s’invite de façon intimiste dans les cuisines des auditeurs est une autre façon de rendre la gastronomie “attractive”, à l’ère des images omniprésentes sur les réseaux et à la télévision, dans des émissions de cuisine devenues presque un passage obligé pour les grands chefs et les débutants. “On ne consomme plus de la cuisine, on consomme des chefs”, résume-t-il. “Si vous regardez en détail la cuisine, elle n’a pas évolué depuis les années 80. Mais il y a tel chef avec des dreadlocks, des tatouages, il revendique de sauver la planète, etc. Instagram, c’est la profusion d’images avec les mêmes postures. Place à la voix !”, conclut-il.

Konbini avec AFP