Au collège, Wilfried n’aimait pas les maths, ni la chimie. “Il fallait que je m’oriente vers quelque chose de manuel.” C’est lors de son premier stage dans un restaurant étoilé, Chez Michèle, aux côtés du chef Bruno Poiret, qu’il a un déclic : il sera cuisinier. Il apprendra les bases du métier dans un restaurant au Luxembourg avant de partir en Australie pendant un an, une expérience culinaire qui l’a “ouvert au monde”. Depuis, Wilfried travaille avec les plus grands. Auprès de Thierry Marx au Mandarin Oriental en tant que demi-chef de partie puis au Burgundy en tant que chef de partie, il perfectionne sa cuisine, avant d’intégrer l’illustre Boragó à Santiago de Chile.
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Fort de ses voyages en Thaïlande, en Indonésie, et, plus tard, en Amérique du Sud, le candidat aime découvrir de nouvelles cultures, de nouvelles saveurs : “Toutes ces expériences m’ont énormément marqué et ont influencé ma cuisine.” Après avoir disputé une épreuve de la dernière chance sous tension face à Louise, le jeune homme a été contraint de quitter l’aventure… Retour sur son parcours dans Top Chef.
Konbini food | On te voit très serein dans l’émission mais tu dis que ça n’a pas toujours été le cas… Qu’est-ce que la cuisine t’apporte au quotidien ?
Wilfried | Quand j’étais au collège, j’avais pas mal de problèmes de comportement car je n’étais pas épanoui. Depuis, la cuisine est devenue mon métier, ma passion. Je me sens apaisé dans mon boulot et chanceux de vivre de ce que j’aime. Je suis un mec assez calme et posé. Les mecs violents en cuisine, ce n’est pas ma tasse de thé, on n’a pas besoin de ça pour réussir. J’ai bossé vite fait dans des restos comme ça et je trouve ça inhumain, surtout maintenant, après la pandémie, après tout ce qu’on a traversé.
C’est-à-dire ?
Je trouve le management de la peur super naze. On est ni pompiers ni urgentistes, on ne fait que de la cuisine, on ne sauve pas des vies. Si la pièce de bœuf est cramée, on en refera une autre. Il y a toujours une solution.
C’est pour ça que je me suis bien senti chez le chef Thierry Marx, il n’a pas un mot plus haut que l’autre. C’était limite reposant de travailler dans cet établissement. C’est un exemple pour moi, je me suis nourri de lui. Il a deux étoiles Michelin, il a fait un très bon bout de chemin. Ça prouve bien que son management fonctionne. C’était une belle expérience.
Tu peux nous parler de la cuisson en croûte de cendres ?
J’ai découvert cette technique de cuisson au Chili. C’est exactement la même technique que j’ai faite sur le plateau. En gros, on cuit à l’étouffée. J’avais déjà fait un essai avec une mangue et je me disais que ça fonctionnait bien.
Cette recette doit être millimétrée car la mangue risque d’être réduite en purée si elle est trop cuite. D’un autre côté, il ne faut pas un goût trop fumé, etc. J’ai voulu peut-être trop en faire car j’ai aussi voulu fumer l’huile de piment. Au final, il y avait sans doute trop ce goût de fumée. C’est ça que j’ai aimé avec l’émission : avoir le ressenti des gens m’a permis d’avancer dans ma cuisine.
Comment as-tu vécu l’épreuve de la dernière chance face à Louise ?
Louise et moi, on s’apprécie beaucoup. On était de la même brigade. C’était compliqué car chacun veut sa place dans le concours. J’aurais préféré affronter quelqu’un qui n’était pas dans ma brigade mais c’est le jeu. Je ne lui en veux pas.
Devoir retravailler le blanc de dinde, ce n’est pas super cool. Je trouvais que ce n’était pas un thème très inspirant, contrairement à l’épreuve des fruits rouges, par exemple. C’est assez compliqué d’imaginer un truc dans l’air du temps et un peu gourmand avec du blanc de dinde. À un moment, je me suis carrément dit que j’allais faire un cordon bleu. Je voulais prendre l’épreuve au contre-pied. Mais ça m’a paru trop bancal, comme idée.
En plus, sur cette épreuve, on était jugés sur une bouchée. Autant sur une assiette, tu te dis que les chefs peuvent y revenir, autant là, tu as intérêt à être bon du premier coup. Il faut maîtriser les assaisonnements immédiatement.
Avec le recul, qu’est-ce que tu retiens de Top Chef ?
J’en garde un super souvenir. Tu ne vis ça qu’une fois dans ta vie. Le plateau est une salle de jeu : il y a tout le matos que tu veux, le garde-manger est super fourni… C’est une expérience de fou à vivre, je souhaite à tout le monde de le faire. Humainement, c’était juste génial. Tu rencontres plein de cuisiniers très différents. Par exemple, avec Mickaël et Ambroise, on ne se serait jamais rencontrés dans la vraie vie.
Avec Thibaut, par exemple, on n’a pas du tout le même parcours de vie. J’ai 28 ans, il en a 35 ans. Je n’ai pas de resto, il a une étoile. On est très différents : c’est quelqu’un de très drôle et très ouvert. Cette brigade rouge était super chouette. On ne s’est jamais engueulés. Même quand on perdait, on acceptait la défaite.
Il y a beaucoup d’entraide sur Top Chef. Sur une épreuve, Arnaud m’a enlevé un truc du feu qui avait cramé alors qu’on était en compétition l’un contre l’autre !
Ça s’est passé comment, la guerre des restos ? Vous avez eu quelques petites galères…
Physiquement, à la fin de l’épreuve, j’étais lessivé. Autant sur les épreuves, tu me demandes ce que tu veux, je peux tout faire en une heure et demie, autant là… Je n’étais pas bien. Entre les chutes, les coupures de gaz et ma coupure vener au doigt… C’était terrible. J’ai dû aller à la pharmacie parce que je pissais le sang !
On avait un joli concept mais on doutait un peu de l’idée de la saucisse. C’était une idée de Mickaël de base. Quand on a conçu notre menu, on s’est dit qu’on devait absolument faire du boudin blanc en dessert. Ce n’était pas le meilleur au monde, on n’a pas eu le temps de faire les trucs à fond, mais l’idée était là.
Mickaël a mis cinq heures à faire les saucisses. Arnaud a fait une déco de dingue. On avait fait un boulot monstre. On ne pensait pas gagner avec les complications qu’on a eues. Mais la victoire est d’autant plus belle. Souvent, je pense que la guerre des restos est l’épreuve la plus mythique de Top Chef. Je me souviendrai très longtemps de ce truc-là. À la fin, quand on a gagné et qu’on a relâché d’un coup la pression, c’était juste ouf.
Le menu de Philo Saucisse a été livré dans neuf villes de France ?
Tous les chefs des restaurants d’Île-de-France qui distribuaient le menu de Philo Saucisse sont venus à Paris. On leur a transmis le savoir de la saucisse en leur expliquant comment on a fait le truc, comment dresser l’assiette, etc. La recette s’est exportée. Bientôt, le resto éphémère Philo Saucisse ouvrira au public, pour ceux qui n’auraient pas eu l’occasion de se le faire livrer. Je ne peux pas en dire plus pour l’instant…