Une série “so fetch” produite par YouTube qui détourne le stéréotype de la mean girl avec intelligence et pertinence. Attention, légers spoilers.
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Plus la réputation (et le chiffre d’affaires, duh) de Netflix grimpe en flèche, plus ses concurrents se multiplient pour lui barrer le chemin. Ces dernières années, ce fut au tour de YouTube d’essayer d’avoir sa part du gâteau tandis que la plateforme se lance doucement mais sûrement dans la production de fictions originales avec YouTube Red. Dans les mois à venir, le géant de la vidéo proposera par exemple Cobra Kai, dérivée de Karaté Kid, ou encore la prometteuse Impulse qui réimaginera l’univers du film de science-fiction Jumper.
En attendant, on peut d’ores et déjà se mettre Youth & Consequences sous la dent, une sorte de Lolita malgré moi en plus sérieux et plus engagé. Poussez les portes du lycée de Central Rochester, où la très stylée Farrah Cutney règne en maître du haut de ses stilettos. Jusqu’ici incontestée, cette (fausse) mean girl va être confrontée à de nombreuses embûches qui risquent de venir compliquer son année scolaire. Les embrouilles peuvent commencer.
Si plusieurs aspects font irrémédiablement penser à Lolita malgré moi, à commencer par le relooking complet d’une lycéenne lambda faisant écho à celui que subit Lindsay Lohan dans le film de 2004 (trope du genre que l’on retrouve également dans Clueless), Youth & Consequences est un melting-pot de différentes influences. On pense forcément à Gossip Girl, dans le sens où le lycée de Rochester est sous l’influence un blogueur surnommé The Crotch, lequel prend un malin plaisir à poster des infos compromettantes sur l’ensemble du corps étudiant comme enseignant.
Découpée en seulement huit épisodes (une session de binge-watching éclair, en somme), la première saison de Youth & Consequences étonne. A priori, on pensait tenir un énième fac-similé de comédie pour ados pas original pour un sou. C’est tout le contraire. Certes, la série de YouTube Red fait appel à de nombreux clichés habituels des teen dramas, du système de cliques en passant par le tant attendu bal du lycée. Cependant, au-delà de tout ça, elle ose s’aventurer hors des sentiers battus, notamment grâce à un protagoniste central rudement bien construit.
Incarnée par Anna Akana, youtubeuse vingtenaire qui carbure avec ses 2 millions d’abonnés, Farrah se dévoile au fil des épisodes comme un personnage fascinant et multidimensionnel. Pour la faire courte, c’est une social justice warrior déguisée en Regina George. Sous sa façade de peste bien sapée, la brunette est en réalité bienveillante et altruiste, utilisant son pouvoir pour favoriser les minorités qui n’ont pas les mêmes avantages qu’elle.
D’un point de vue critique, le personnage est d’autant plus intéressant qu’il est interprété par une actrice asio-américaine. “J’adore les séries pour ados, confie Anna Akana dans une interview pour The Daily Dot. En tant qu’Américaine d’origine asiatique, je n’aurais jamais pensé avoir l’opportunité d’être la tête d’affiche d’une série de ce genre. C’est tellement inhabituel”. En effet, son alter ego représente un véritable doigt d’honneur aux rôles stéréotypés dans lesquels on cloisonne trop facilement les comédien·ne·s d’origine asiatique.
Ce n’est pas le seul point où Youth & Consequences se montre progressiste. En peu d’épisodes, la série ne rechigne pas à aborder des thématiques sociétales dont on entend beaucoup parler présentement, comme le fait d’être gender fluid ou l’égalité femmes-hommes inexistante dans le domaine sportif. De par son mode de diffusion (YouTube privilégiant tout de même une cible relativement jeune), le show a conscience de son impact : c’est pourquoi on ne peut qu’apprécier le panneau en fin d’épisode rappelant au public l’existence de The Trevor Project, une hot-line dédiée à la jeunesse LGBTQ+.
En définitive, si Lolita malgré moi reste indétrônable (et un sacré plaisir coupable pour beaucoup), Youth & Consequences parvient à le moderniser avec brio. Sa saison inaugurale est un concentré d’influences efficaces, parmi lesquelles Faking It ou encore l’irremplaçable Veronica Mars. C’est presque un sans-faute pour YouTube Red, qui détient ici une dramédie sachant se montrer aussi jouissive que socialement pertinente. Ah, c’est aussi l’occasion de revoir Marcia Cross depuis ses années Desperate Housewives, et ça ne se refuse pas.
Les deux premiers épisodes de Youth & Consequences sont disponibles gratuitement juste ici.