Le premier épisode de Titans ravira les haters de l’Arrowverse et ses personnages édulcorés.
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Vous trouvez que le petit et le grand écran, voire plus généralement le monde de l’entertainment, sont saturés de super-héros ? Eh bien, malgré toute la haine que leur portent James Cameron et Steven Spielberg, ces êtres surpuissants sont loin d’être en voie d’extinction. En vérité, les justiciers vont continuer à éclore massivement dans les séries comme en témoigne l’arrivée de la plateforme Disney Play (qui a les licences Marvel avec elle et déjà des concepts super-héroïques en route) ou encore de DC Universe, le service de streaming entièrement dédié aux œuvres de la maison de comics concurrente.
Cette dernière, uniquement disponible aux États-Unis pour le moment, a inauguré son lancement avec une série originale : Titans. Comme son nom l’indique, il s’agit d’une adaptation de l’équipe des Teen Titans menée par Dick Grayson, aka Robin, premier du nom, et créée au milieu des années 1960. Dans la série, elle réunit leur leader, Raven, Starfire ou encore Beast Boy dans une version live action vendue comme sombre et sanglante. Et DC Universe ne s’est pas plantée, quitte à aller un peu trop loin dans la surenchère avec son pilote prometteur mais bourré de défauts.
F*ck Batman
Au cinéma, le DC Extended Universe est régulièrement critiqué pour son manque d’humour et de luminosité, en opposition à la recette miracle de Marvel. Titans s’inscrit dans la veine de Man of Steel et autre Batman v Superman dès les premières minutes du pilote : une photo bleutée et obscurcie rappelant presque le polar nordique, des personnages torturés (et assez cliché : Raven est une gothique malheureuse, Dick un détective solitaire peu souriant) et une intrigue tragique, lancée par la mort un peu random de la mère de Rachel. Jusqu’ici, rien de très surprenant pour cette intro banale mais efficace, où on comprend vite que les deux ados sont connectés par des forces supérieures.
Les parties centrées autour de Robin sont mieux traitées et plus captivantes, d’autant que Brenton Thwaites profite de la partition franchement horripilante de sa jeune camarade Teagan Croft, sortie un peu trop tôt de l’école d’art dramatique. Le Dick Grayson de Titans a clairement entamé sa transformation en Nightwing, vigilante de la Batfamily bossant en solo dans les comics, après un profond désaccord avec son mentor. Ainsi, le Chevalier noir et son fidèle acolyte sont en froid, et Dick a quitté Gotham pour les quartiers chauds de Détroit. On appréciera également la scène d’intro sur la tragédie des “Flying Graysons”, qui revient sans trop de subtilité mais avec une bonne dose de dramaturgie sur les origines du personnage.
Cette situation donne lieu à quelques punchlines cinglantes et un peu provoc (le fameux “fuck Batman” du trailer) mais surtout à une bonne dose d’incohérences. Au commissariat, Dick explique à sa nouvelle équipière que son ancien partenaire (sous-entendu Bruce Wayne, même si elle l’ignore, le spectateur n’est pas dupe) avait tendance à régler ses problèmes uniquement grâce à la force de ses poings, chose à laquelle le détective a cessé d’adhérer. Dans ce cas, pourquoi diantre Robin s’acharne-t-il à coups de pied sur la poitrine d’un criminel désarmé et à terre deux secondes plus tôt ?!
La séquence de combat en question, mise en scène de façon intense et plutôt fluide par Brad Anderson (The Machinist), chose rare dans une série du genre pour le souligner, était pourtant saisissante jusqu’ici. On retrouvait cette patte gritty qu’affectionnent les fans de super-héros et en particulier de l’écurie DC. Mais pourquoi tomber dans une forme de brutalité gratuite juste après, sous prétexte que le vilain tabassé est un violeur d’enfants ? Titans déclenche son propre cycle de violence dans lequel elle se retrouve piégée, et souffre d’incohérences d’écriture quant à la psyché de ses personnages.
Un scénar écrit au batarang
Si on aborde Titans au premier degré (comprendre en laissant son cerveau de côté) ou en tant que lecteur novice des comics, l’ambiance dark, les répliques énervées de Robin et ses lancers de batarang tranchant sont assez jouissifs à voir. Grâce à son style graveleux, la série embrasse parfaitement son matériau de base avec quelques clins d’œil au Joker, des ruelles enfumées et poisseuses qui rappellent la Gotham City du Batman de Tim Burton et bien entendu ses costumes un poil cheesy, mais clairement plus badass que leurs cousins éloignés de l’Arrowverse.
Le véritable problème du pilote de Titans est son manque de consistance et surtout son scénario écrit à l’arraché. L’épisode est perdu entre l’exposition de la situation et la volonté d’accélérer le mouvement pour rendre le tout addictif. Le showrunner Geoff Johns confond malheureusement vitesse et précipitation, si bien que l’introduction de Starfire est un bordel monstre. Dommage, puisque son interprète, Anna Diop, très convaincante dans son rôle avec un jeu bien personnel, justifie amplement son casting, alors même que son personnage est blanc dans les comics – de quoi faire taire les détracteurs racistes qui l’ont trashée sur les réseaux sociaux.
Inutile de se prononcer sur Beast Boy, qu’on aperçoit rapidement dans les dernières secondes et qui sert uniquement de cliffhanger pour la suite de la saison. Cela dit, on sent un premier manque de moyens chez DC Universe à travers les effets spéciaux médiocres de sa transformation en tigre, même si les fans apprécieront une forme de sincérité de la part des scénaristes pour respecter l’ADN des super-héros. Et il faut reconnaître que l’aspect road trip qui s’annonce à la fin du pilote, décidément en vogue depuis Logan, est assez intrigant, en tout cas suffisamment pour donner envie d’y retourner la semaine d’après.
En France, la première saison de Titans sera diffusée prochainement sur Netflix.