Le mid-season de la saison 7 de The Walking Dead est arrivé. C’est l’heure du bilan de cette première partie. Attention, spoilers.
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“Hearts Still Beating“. Derrière le titre de l’épisode 8 de la saison 7 de The Walking Dead se cache une subtile symbolique. Métaphoriquement, Rick a été sonné par la batte de Negan en même temps que Glenn et Abraham furent massacrés dans le season premiere. Les survivants ont réagi de différentes manières : Rick n’a pas réussi à se relever et a préféré respecter les conditions de Negan pour ne pas mettre en danger le peuple d’Alexandria. À l’inverse, Rosita, Maggie et Sasha fomentaient de leur côté un plan pour trouver un moyen de vaincre le leader des Sauveurs. Mais comme Rick prend les décisions depuis sept saisons, tout le monde a choisi de mener sa révolte individuellement plutôt que de lui en parler.
Pour tout dire, le monde de Rick s’est écroulé au cours des abominables exécutions de Glenn et d’Abraham. Pour la première fois, le shérif est devenu cette atrocité qu’il tente de vaincre depuis maintenant des années : un rôdeur. Dans son esprit, Rick était devenu un zombie, guidé seulement par la soif de se nourrir ou, dans son cas, de survivre à Negan. Le salut est apparu grâce à un personnage secondaire qu’on n’attendait pas, Aaron. Un ami profondément dévoué à Rick, qui lui a rappelé que même après s’être fait tabasser par les Sauveurs, même après la souffrance et la mort, il faut se relever, “parce que nos cœurs battent toujours”.
Le bordel monstre qu’a créé la visite inattendue de Negan à Alexandria ainsi que les morts violentes de Spencer et d’Olivia, et ce malgré l’importance mineure de ces personnages dans l’intrigue, ont réveillé quelque chose en Rick. Une fois de plus, une fois de trop. L’heure est à la rébellion, au soulèvement contre Negan et les Sauveurs. Une vengeance qui a mis du temps à se mettre en place. Et alors ?
Violence et clins d’œil aux comics
La violence a rarement fait autant polémique dans une série. La faute à une surenchère de spectacle assimilée à du torture porn, selon les détracteurs de The Walking Dead. Pourtant, la série n’a jamais délivré autant d’hommages, de clins d’œils et fait preuve d’autant de fidélité envers son œuvre de base. Le comic créé par Robert Kirkman et Tony Moore est bien plus violent et vulgaire que le show d’AMC. Même sur une chaîne câblée, les producteurs et les scénaristes ne peuvent se permettre d’employer toutes les “F-bombs” de Negan ou encore d’exploser Judith dans les bras de sa mère à coups de fusil à pompe pendant l’attaque de la prison par le Gouverneur.
La violence de The Walking Dead fait bien sûr écho aux événements de notre société IRL. Negan est un terroriste, au sens étymologique du mot, qui utilise une batte de baseball plutôt qu’une bombe pour se faire entendre et appliquer sa loi. Robert Kirkman a écrit ce personnage et ces passages d’une violence démesurée des années avant les tragiques événements perpétrés par Daech et consorts. Alors si la violence vous dérange, rappelez-vous qu’elle existe également pour rester fidèle au matériau de base, pas uniquement pour vous écœurer.
The Walking Dead introduit un monde où les hommes reviennent à leurs besoins primaires, font de nouveau appel à leur instinct de survie. Il est impossible de négocier avec des rôdeurs tout comme il est impossible d’empêcher la montée de tyrans comme Negan dans cet univers désolé. C’est la loi du plus fort qui règne dans ce monde austère, où jaillissent des préceptes aussi barbares que la Loi du Talion (en gros, “œil pour œil, dent pour dent”). Rick réemploie ce mantra à sa sauce dans les comics, avec son principe de juge et de bourreau “tu tues, tu meurs”. Tout est fait pour que ce monde se réduise à néant par lui-même : les rôdeurs dévorent les humains, qui eux s’entretuent pour survivre.
À travers les personnages de The Walking Dead, on essaie d’entrevoir une lumière, une porte de sortie, une nouvelle humanité à ce monde dénué de compassion. Si cette violence a une raison d’exister, c’est bien pour envoyer nos survivants au tapis et mieux les voir se relever, afin de leur faire comprendre que l’échec n’est pas une solution. Auquel cas, toute trace d’humanité disparaîtra à jamais. Cette notion d’échec apparaît fréquemment dans les histoires de super-héros de la pop culture comme Batman, qui la rencontre au quotidien à Gotham.
Un problème inhérent à la pop culture
En revanche, cette violence et ce trop-plein de références posent une autre question : les producteurs de The Walking Dead se contentent-ils seulement de réunir chaque semaine les lecteurs des comics ? Entre l’œil exorbité de Glenn dans l’épisode 1, la chanson de Carl dans l’épisode 7 ou encore l’éventration de Spencer qui dévoile littéralement ses tripes à Negan, le fan service est de rigueur. Le rythme très lent et le rallongement de certains épisodes jouent en faveur de cette hypothèse. On prend son temps pour montrer que Negan a foutu en l’air l’espoir et la notion de solidarité.
Tout comme les nombreux cliffhangers, dont celui du season finale de la saison 6, qui invitent de nombreux curieux à découvrir le sort des survivants, avant de lâcher l’épisode post-révélation. En d’autres termes, la série zombiesque semble évoluer sur deux rythmes de croisière différents, ce que les audiences décevantes de cette saison 7 confirment.
C’est dommage, car les fans moins hardcores finissent par s’ennuyer, malgré l’ajout intéressant de la communauté des Oceanside par exemple, composée uniquement de femmes martyrisées dans le passé par Negan. C’est l’effet pervers de cette volonté de surenchère, trop souvent utilisée et défendue par les créateurs de The Walking Dead, surtout au niveau de la promotion de la série. Les cliffhangers induisent dans l’esprit des spectateurs un épisode événement, unique, où ils ont l’habitude d’assister à un étalage de violences et de twists majeurs.
Un épisode qui devient presque détaché de la saison tellement il dénote avec le reste en terme de rythme. Certains avancent alors que Robert Kirkman et consorts tentent de manipuler le spectateur. Sauf qu’à la fin, ces derniers risqueraient de tout perdre. Il ne faut pas oublier qu’on parle quand même d’un mec qui a su réinventer le genre du zombie sans employer ce mot dans son œuvre.
D’un point de vue plus large, cette colère envers le show zombiesque est aussi une conséquence de l’état actuel de la pop culture, où les extrême s’affrontent. L’exemple le plus flagrant étant l’éternel combat entre DC Comics et Marvel, dont les fans des franchises défendent avec véhémence leur amour inconditionnel pour leur écurie du cœur.
Ce parallèle se répète au sein des adeptes de The Walking Dead : il est impossible de trouver le juste milieu et les fans semblent constamment insatisfaits. S’il y a trop d’action, de zombies et de morts, c’est trop violent. À l’inverse, on s’ennuie quand les zombies disparaissent, laissant place à des plans contemplatifs, des discussions intimistes entre des personnages qui cherchent pourtant à nous faire partager leurs tourments.
Le shérif est de retour en ville
La dernière partie de “Hearts Still Beating” respecte le schéma narratif cyclique de The Walking Dead. L’heure est venue pour Rick de reprendre du poil de la bête, de réunir les forces en présence que représentent la Colline et le Royaume et d’aller affronter Negan. En gros, on se situe dans la partie où d’habitude les survivants viennent trouver un sanctuaire, infesté de rôdeurs (la prison) ou de cannibales (le Terminus).
L’intrigue tourne en rond, c’est vrai, car l’objectif final est loin d’être acquis : fonder une nouvelle civilisation. D’ailleurs, depuis la saison 5 et la révélation du mensonge d’Eugene, les survivants ont complètement oublié de chercher une réponse, voire une solution à l’épidémie zombie. Preuve que Robert Kirkman et consorts se concentrent davantage sur les relations de leurs personnages plutôt que sur leur situation.
Ces personnages justement, parlons-en. Les dernières scènes de “Hearts Still Beating” tombent presque dans le soap. Tout le monde s’embrasse, les anciennes chamailleries sont oubliées, le tout sur une musique digne des mélos de TF1. C’est franchement ni subtil ni sexy, mais la sauce prend. Elle convainc surtout lorsqu’un Daryl soulagé mais à bout de forces s’écroule dans les bras de Rick. Cette séquence, au-delà d’être particulièrement émouvante, marque un changement radical.
D’abord parce que Daryl rend à Rick son Colt Python 357 Magnum. Un artefact qui représente plusieurs symboliques : sa première arme de défense à son réveil dans la saison 1, son arme de service en tant que shérif et donc son devoir de protecteur envers la société, son effet Pygmalion, oserais-je dire, de mener les autres vers une vie meilleure, et surtout un raccord à son passé, à la réalité.
En lui prenant, Negan l’avait métaphoriquement violé (dois-je vous rappeler cette superbe punchline de Negan à son attention : “Je viens d’enfoncer ma b*** dans ta gorge ?”), violé son autorité et détruit tous ses espoirs de trouver enfin un sanctuaire durable.
Ensuite, parce que quelque chose s’est brisé en Daryl. Lui et Rick ont toujours éprouvé un amour fraternel l’un envers l’autre. Une profonde amitié qui se passait de mots pour s’exprimer. Pourtant, sous le coup de l’émotion et de la joie de retrouver la liberté, Daryl a craqué. On parle du mec le plus badass, le plus solide et le plus fermé à toute émotion de The Walking Dead.
Cet étalage de sentiments est une preuve qu’une nouvelle ère est arrivée avec Negan et que le monde post-apocalyptique a fait un bond en avant. Pas pour le meilleur, mais les rôdeurs sont finalement passés en arrière-plan. C’est de cette manière que la série évolue, démontrant une fois de plus que les “marcheurs morts” ne sont pas toujours ceux que l’on pensait être.
Cette recette, bien qu’utilisée à de multiples reprises, fonctionne toujours et se rapproche des intrigues de super-héros. Normal me direz-vous, la série est inspirée d’un comic. De la même manière que Superman défend Metropolis contre Lex Luthor, Spider-Man New York contre le Bouffon vert et ainsi de suite, Rick et son groupe tentent de trouver une forme de paix en éliminant leurs opposants. Sauf que pour une fois, les justiciers sont humains et dénués de pouvoirs.
C’est d’autant plus dérangeant qu’ils cherchent à appliquer leur propre justice, quitte à dépasser la limite du meurtre. Aimer et suivre The Walking Dead, accepter toute la violence et les odieuses tragédies qui ponctuent la série, n’est pas une question d’être un Bisounours ou pas. Il y a ceux qui ont préféré, devant tant de déshumanisation, lâcher l’affaire. Et il y a ceux qui ont consenti à se laisser torturer pour comprendre viscéralement les personnages, leurs tourments et leur véritable nature. Alors, laissez-nous apprécier et réfléchir à notre manière sur l’univers de The Walking Dead.
La saison 7 de The Walking Dead est diffusée en France sur OCS Choc