La plateforme Hulu a lancé en décembre 2016 un petit ovni sériel qui s’intéresse aux médiums et à la communauté des Roms.
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Malgré quelques longueurs, Leslie Bohem parvient à maintenir une certaine tension dans son univers. La série passe aisément du thriller au drame familial sur un rythme soutenu. Le twist surnaturel concernant le personnage de Charlie est suffisamment en retrait pour qu’on apprenne d’abord à connaître les personnages et à ressentir de l’affect pour eux avant de se poser des questions sur l’existence ou non de ce don de Nostradamus. Ainsi, à la manière de Game of Thrones, Charlie et tous les mafieux ont leurs bons et leurs mauvais côtés, si bien qu’on ne sait jamais qui tient plus de l’ange ou du démon.
Après les premiers épisodes, Leslie Bohem creuse en profondeur la psychologie tourmentée de ses personnages. Si Charlie représente un antihéros plutôt banal, façon mauvais garçon qui se tourne finalement vers la justice, sa femme Linda (KaDee Strickland) suit plutôt une philosophie type “la fin justifie les moyens”. Les deux acteurs forment un couple plutôt convaincant, qui n’échappera pas à la comparaison avec le duo Skyler/Walter de Breaking Bad. Sauf qu’ici, c’est la femme le danger du couple et l’homme qui essaie de sauver les meubles.
Mais ce qui frappe le plus dans Shut Eye, c’est le sous-texte de la série qui s’intéresse à la communauté des Roms. Elle fait d’eux les dirigeants, n’échappant cependant pas aux stéréotypes. Fonso et ses acolytes représentent une forme de mafia très claire dans sa forme : ils sont tous méchants et attaquent les gentils gaje, comprenez les non gitans. Si ce cliché bête et méchant vient gâcher les premiers instants de la série, il faut persévérer pour apercevoir une véritable critique sociale derrière ces personnages et leurs mœurs comme le bujo, soit cette emprise qu’ils ont sur des individus gaje. Celle-ci s’exprime par des scènes à la violence sous-entendue, comme cette marche de la honte façon Cersei où la sœur de Charlie se voit forcer de défiler devant la famille de Fonso en se faisant cracher dessus.
On regrettera toutefois que la série ne profite pas de son bon, voire excellent, casting. En effet, Isabella Rossellini illumine chaque scène de sa présence, quitte à manger les partitions de certains de ses petits camarades. Pourtant, elle est reléguée à un second rôle. Cela reste tout de même un point positif de plus de cette jolie surprise sérielle qui a vraiment du potentiel. Si son scénario tombe dans la caricature vers la moitié de la première saison, elle propose suffisamment de profils de personnages variés et expose un sujet fort et peu exploité pour se bonifier avec le temps. Et ça, on ne l’aura pas lu dans les cartes.