Et si le véritable héros de l’histoire, c’était lui ?
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On ne va pas y aller par quatre chemins : Danny Rand est un super-héros ennuyeux et un personnage sans aspérités, là où son frère d’adoption offre au public une vraie trajectoire de rédemption. De connard égoïste et toxico, Ward Meachum va opérer un changement de cap, qui se dessine déjà en saison 1, et se confirme en saison 2. Pourtant, au début de son histoire, il y avait tous les ingrédients pour faire de lui un super vilain. L’origin story de la future némésis de l’Iron Fist était là, sous nos yeux. Mais son parcours, fait d’apprentissage, de rechutes, de moments de bravoure comme de lâcheté, nous fait aimer ce personnage secondaire bien plus que le héros vertueux, lisse et un brin condescendant qu’on essaye de nous imposer.
D’abord associé aux agissements obscurs de son père, oppressé par le retour de l’enfant prodigue qu’est Danny et la menace qu’il fait peser sur sa compagnie (qu’il estime être le seul candidat valable pour la diriger), Ward est un antihéros tel que les comics aiment nous en offrir. Mais pour décider de changer, de devenir meilleur et de s’autoriser à être heureux, il doit d’abord toucher le fond, et tuer le père. Littéralement. Sorti de l’ombre de son géniteur, il aurait pu virer tyran et perpétuer le règne de terreur d’Harrold. Il n’en fera rien, et ce choix est tout sauf facile, comme on le verra par la suite. Les voies de la rédemption sont pavées d’obstacles.
Interprété avec justesse par Tom Pelphrey, Ward est un personnage multidimensionnel, plus réaliste (en dépit des milliards de dollars qui dorment sur son compte en banque) que Danny, le héros quasi indestructible. Il ne prétend pas être autre chose qu’un homme riche et privilégié. Il essaye même, maladroitement et de façon un peu paternaliste, d’aider sa sœur. Joy veut couper les ponts avec Rand Enterprises et surtout sa famille. Lui veut au contraire renouer le lien, un lien sérieusement abîmé par son père et son implication dans sa sombre entreprise. Comme il ne connaît que ce langage, c’est avec son argent qu’il espère regagner le cœur de sa sœur. Il reste coi quand celle-ci refuse son aide.
Abandonné et haï par celle qui était autrefois son alliée et la seule à avoir percé sa carapace, il se tourne vers Danny pour tenter de reconstruire un semblant de famille. Il se rapproche aussi de sa marraine des narcotiques anonymes, Bethany, ce qui nous permet de voir un aspect plus attendrissant du golden boy aux mâchoires serrées. Ward est aussi la seule touche d’humour d’une série qui se prend déjà beaucoup trop au sérieux. Ces eye rolls sont déjà légendaires. En clair, he doesn’t give a fuck. C’est à travers lui qu’on perçoit le plus le ridicule de la destinée de Danny. Il ne manque jamais une occasion de se foutre de son poing qui brille ou de ses capacités de maître shaolin.
Il est toujours plus intéressant de voir une histoire de rédemption que celle d’un super-héros dont la plus grande peur est de perdre son pouvoir. Ironiquement, Danny n’aime pas qu’on le réduise à son statut d’héritier milliardaire. En saison 2, il pousse même le vice jusqu’à se trouver “un vrai travail”. Mais cette crise d’humilité, dont on essaye par tous les moyens de nous faire croire qu’elle est sincèrement ancrée en lui, sonne désespérément creux. Danny ne renonce pas à ses privilèges d’homme blanc et riche, mais il refuse tout autant d’admettre qu’il en a.
Même Luke Cage, dans The Defenders, a tenté de lui mettre le nez dedans, sans succès. Il va même jusqu’à jouer les white saviors auprès de la communauté de Chinatown, faisant passer les habitants du quartier pour des faibles ou des lâches, et les membres de la pègre locale pour des tyrans pratiquant tous les arts martiaux niveau sensei. Danny n’évolue pas sur la question de ses privilèges, qui constituent pourtant l’essentiel de son identité : son pouvoir, qu’il soit matériel ou surnaturel.
Ward, lui, est un outsider auquel il est facile de s’identifier. Que celui ou celle qui n’a jamais voulu voir la victoire par KO d’un challenger, aux dépens du champion en titre, me jette la première pierre. Là où la destinée d’”élu” de Danny Rand vacille en saison 2, et tandis que Joy fomente un complot machiavélique dont les motivations nous échappent parfois, la guérison de Ward permet aussi à la série de garder les pieds sur terre.
On a envie de croire en cet antihéros, on a envie qu’il gagne, qu’il trébuche, puis se relève. Pour Danny, en revanche, on aimerait qu’il se prenne une bonne grosse leçon d’humilité dans la face. Un personnage plus réaliste qui tente de se racheter une conscience tout en restant ultra-sarcastique et dont on sent qu’il peut flancher à tout moment pour retomber dans ses vieux travers… ça, c’est une histoire qu’on a envie de voir !
La saison 2 d’Iron Fist est désormais disponible en intégralité sur Netflix.