Narcos revient sur Netflix pour une saison 2 qui enterre son roi, Pablo Escobar.
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Les créateurs de Narcos, Chris Brancato, Carlo Bernard et Doug Miro, avaient bien tenté d’être clairs depuis le début : leur série devait narrer la naissance des narcotrafiquants en Colombie dans les 70’s puis suivre son développement, de cartels en cartels, de pays en pays. Sauf qu’aux origines se trouve la figure du baron de la drogue la plus mythique et romanesque de l’histoire : Pablo Escobar.
Le plan des showrunners n’était certainement pas de laisser ce personnage en vie durant deux saisons entières. Oui mais voilà, grâce à l’interprétation magistrale de Wagner Moura et à l’aura du personnage, Narcos est vite devenue mondialement culte. Et au final, si la série se poursuit en saison 3, les deux premières saisons pourront, avec le temps, se regarder indépendamment des autres. Car au-delà de la lutte contre le trafic de drogues, cette hydre aux têtes qui repoussent sans cesse, ces deux saisons constituent aussi un parfait “Rise and fall” de Pablo Escobar.
Après nous en avoir mis plein les mirettes par son insolent succès, par son immense fortune et sa paranoïa digne d’un Corleone, Pablo Escobar terminait la saison 1 par une évasion spectaculaire de La Catedral, prison qu’il s’était taillée sur mesure après avoir négocié avec le gouvernement colombien. Ce dernier, sentant qu’il était en train de se faire blouser, tentait de récupérer (trop tard) le boss du cartel de Medellín.
Jusqu’ici, tout va bien
Dans cette deuxième saison, l’ennemi revêt de multiples visages. L’homme est lentement mais sûrement cerné de toutes parts : ses ennemis (le cartel de Calí, Judy Moncada, des anciens collaborateurs déçus) forment une alliance, “Los Pepes” (acronyme de “Perseguidos por Pablo Escobar”, soit “Persecutés par Pablo Escobar”), aux méthodes aussi expéditives que celles du parrain. De quoi mettre la Colombie à feu et à sang.
Ajoutez à cela les actions du “Bloc de recherche”, dirigé en début de saison 2 par Horacio Carrillo et pour lequel bossent toujours nos deux gringos Murphy et Peña (incarnés par Boyd Holbrook et Pedro Pascal), et vous comprendrez les moyens absolument colossaux mis en place pour faire douter, affaiblir puis achever ce taureau increvable. Il en aura fallu des banderilles pour en venir à bout.
Les chiffres, hallucinants, on les connaît. Netflix en a même fait l’objet d’un des trailers de cette saison 2. Au-delà des moyens déployés pour faire tomber le patron, cette saison 2 montre aussi la patience et l’énergie qu’il a fallu à tout ce beau monde pour arriver à ses fins. Tout en restant à l’arrière-plan, nos deux flics en sont la preuve vivante. On les voit errer, espérer, franchir de nouvelles barrières morales dans le but d’attraper Escobar.
Narcos n’est plus seulement filmée du point de vue des flics. Il faut bien se l’avouer, ce serait chiant : la voix-off, celle de Murphy, est dispensable. Elle fonctionne bien car elle repose sur un ton ironique désormais bien rôdé, celui du flic qui en a vu de toutes les couleurs et partage ses souvenirs. Cette deuxième saison prend donc davantage le temps qu’en saison 1 de filmer au plus près Pablo Escobar, bête blessée et toujours terriblement dangereuse.
Les plus beaux plans sont contemplatifs. On l’observe se poser entre deux tentatives d’attentats et diatribes contre ce salaud de gouvernement colombien qui ne veut pas protéger sa famille. Quand il est sur le point de craquer, quand il ne supporte pas le regard de son père ou quand il se rêve en président de la Colombie.
Narcos aura su restituer toute l’ambiguïté de Pablo Escobar : impossible de pardonner ce déchaînement de violence, ces attentats meurtriers qui ont coûté la vie à des milliers de Colombiens. La série, loin d’être une hagiographie du baron de la drogue, s’en fait le juste reflet. Mais elle évoque aussi le père de famille aimant et les quartiers qu’il a construits à Medellín. Comment peut-on à la fois tendre la main à son peuple et l’assassiner à bout portant ? Ces contradictions, Pablo Escobar les a emportées dans sa tombe.
Le roi est mort, longue vie aux rois
Le moment tant attendu par ses ennemis finit par arriver dans le season finale de l’épisode 10. Les scénaristes ont fait monter la tension tout au long de ces dix épisodes, qui représentent une “chasse à l’homme” de quinze mois. Les fausses pistes et les dommages collatéraux se sont multipliés, chacun a perdu un peu de son âme, à l’image du gentil Límon, recruté par La Quica au début de la saison, qui finit par suivre “El Patrón” au bout de l’enfer.
Tout cela pour se retrouver sur ce toit, où Pablo Escobar finit ses jours. Pour la première et la dernière fois, Murphy croise le regard de celui qu’il pourchasse depuis si longtemps.
Au même moment, le cartel de Calí, qui fait transiter encore plus de coke que Pablo à la belle époque, fête la mort du vieux lion. La tête de l’hydre a repoussé avant même qu’on en coupe une. Murphy et Peña ont du pain sur planche. La porte est grande ouverte vers une évidente saison 3, centrée sur Pacho Herrera et Gilberto Rodriguez Orejuela, les deux hommes forts du cartel, qui finira lui aussi éventuellement par tomber… avant d’être remplacé par une autre organisation criminelle.
Et là est toute la question : aussi passionnantes, dramatiques et bien dosées en suspense soient-elles, ces futures intrigues sauront-elles capter autant l’attention, sans Wagner “Pablo” Moura ? À l’image des flics de la DEA, cette lutte sans fin –encore aujourd’hui, les autorités luttent contre le cartel mexicain de Sinaloa tenu un temps par El Chapo – pourrait finir par lasser. Reste que la thématique (l’exploration du trafic de drogue et comment il évolue au fil du temps) reste porteuse. Qui n’aime pas une bonne histoire de gangsters ?