Débauchée de 9-1-1, Connie Britton illumine cette adaptation d’un podcast à succès sous les traits d’une femme piégée dans une relation nocive.
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Quand on est célibataire et qu’on débarque dans le monde (pas si) fabuleux des applis de rencontres, le premier date est souvent le plus chaotique. On tâtonne, on est mal à l’aise, on ne sait pas trop comment s’y prendre. Puis, rendez-vous après rendez-vous, tout devient plus simple, plus fluide. Et, surtout, on se laisse de moins en moins berner, notre détecteur de bullshit est enclenché et on sait à quel moment il vaut mieux prendre ses jambes à son cou. Car non, le milieu du dating n’est pas tout rose, a contrario de ce que les comédies romantiques américaines veulent bien nous faire croire.
Dans Dirty John, série fraîchement lancée aux US et adaptée du podcast éponyme, Connie Britton incarne Debra Newell, une décoratrice d’intérieur qui a vraisemblablement oublié d’enlever ses œillères. Après plusieurs rendez-vous foireux, celle-ci rencontre John. Dès lors, tout s’enchaîne très vite : premier baiser, première partie de jambes en l’air, première maison ensemble. En huit semaines et demi, montre en main, les deux se disent oui à Las Vegas. Le hic, c’est que quelque chose cloche avec John : les filles de Debra, Veronica et Terra, en sont certaines.
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Avant de me lancer tête la première dans le pilote de Dirty John, j’avais conscience que la série puisait son inspiration, en majeure partie, d’un fait divers. Celui d’une femme qui s’est laissée abuser et manipuler pendant des années par un homme rencontré sur Internet. Christopher Goffard, journaliste deux fois nommé au prix Pullitzer, s’est découvert une fascination pour cette histoire et a décidé d’en faire un podcast d’investigation qui, fort de son succès, s’est vu transposé sur le petit écran. Au-delà de ça, je n’en savais pas plus, et ce n’est sans doute pas plus mal pour mieux s’immerger dans l’atmosphère angoissante de la série.
En soi, Dirty John suit les codes de bon nombre de thrillers psychologiques. Pour le spectateur, les pions sont placés en évidence sur l’échiquier : il y a la victime, inconsciente du danger qui la guette, et son bourreau, tantôt sympathique, tantôt bien flippant. Autour d’eux, il y a les personnages méfiants, ici les filles de Debra, qui sentent que tout ne tourne pas rond chez le nouveau prétendant de leur génitrice. On est alors dans une attente constante, persuadé que tout peut partir en vrille à chaque instant pour notre protagoniste, ici considérée comme une proie. En d’autres termes, c’est le jeu du chat et de la souris, sauf que la souris n’a pas conscience que le chat s’apprête à faire d’elle son quatre-heures.
En une cinquantaine de minutes, l’épisode inaugural de Dirty John couvre tout le début de relation de Debra et John, soit de leur premier rendez-vous au repas de Thanksgiving avec la famille au grand complet. Oui, voir une relation amoureuse éclore en si peu de temps, ça fait peur. Mais ça a l’effet escompté : on est d’emblée suspicieux de voir cette idylle prendre forme aussi hâtivement, et cela nous pousse à prendre le parti de Veronica, la fille aînée de Debra incarnée avec justesse par Juno Temple (Kaboom). D’abord exécrable sans raison apparente avec John, elle finit par nous rallier à sa cause, principalement à cause des sautes d’humeur de John et de zones d’ombre quant à sa profession, qui nous mettent la puce à l’oreille.
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Si Dirty John se veut une série à suspense – le fait divers dont elle s’inspire l’oblige un peu –, ce pilote est en réalité un brin avare en rebondissements. Il sert principalement à poser les bases et on suppose, du moins on espère, que les choses sérieuses vont commencer dès le volet suivant. Ce qui nous accroche tout de go, en revanche, ce sont les deux protagonistes. Connie Britton, qu’on a adorée aussi bien dans Friday Night Lights qu’American Horror Story, est excellente, voire peut-être un peu trop pour un rôle qui risque de limiter son jeu d’actrice pourtant étendu. En face d’elle, Eric Bana, mémorable dans Troie, incarne à merveille le charismatique mais très creepy John.
Dirty John fait écho à une autre série de la rentrée automnale, j’ai nommé You avec Penn Badgley recyclé en stalker névrosé. Les deux productions américaines semblent tout aussi addictives, avec le même message de sensibilisation : toujours se méfier des inconnus rencontrés sur des applications de rencontres. Si les personnages sont présentés et les décors plantés, il va s’agir maintenant pour Dirty John de nous maintenir en haleine. Bon, après tout, on pourrait mater cette série uniquement pour les beaux yeux de Connie Britton. Mais s’il y a une trame captivante derrière et une réflexion poussée sur les mécanismes de la manipulation, on ne dirait pas non.
La première saison de Dirty John est diffusée sur la chaîne Bravo aux States depuis le 25 novembre, et reste inédite en France.