Comment Jane The Virgin a rendu cool la telenovela

Comment Jane The Virgin a rendu cool la telenovela

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Par Delphine Rivet

Publié le

Sous ses airs innocents, la douce comédie Jane The Virgin opère en fait une petite révolution dans le paysage sériel. Elle parvient à faire aimer aux sériephiles les plus intraitables un genre que l’on aura vite fait de trouver indigent.
Adaptée du format vénézuélien Juana la Virgen, Jane The Virgin, créée par Jennie Snyder Urman, a débarqué en octobre 2014 sur The CW. Quelques mois auparavant, les sériephiles restaient un peu dubitatifs devant le pitch : Jane (Gina Rodriguez), qui vit avec sa mère Xiomara (Andrea Navedo), et sa grand-mère Alba (Ivonne Coll) – ou Abuela, qui veut dire mamie en espagnol, est fiancée à Michael (Brett Dier) et a décidé de rester vierge jusqu’au mariage.
Mais une visite chez la gynéco va bouleverser ses plans. Elle se retrouve inséminée par accident, avec le sperme de son patron et ancien crush de la fac, Rafael (Justin Baldoni), et la responsable n’est autre que la sœur de ce dernier, déprimée par sa rupture avec l’actuelle petite amie de son père. Vous suivez ?

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Jane The Virgin, redonne aussi des couleurs au petit écran. Ici, les personnages blancs sont relégués aux seconds rôles. Et, au-delà de la couleur de peau de nos héroïnes, c’est aussi toute une culture qu’elles représentent.
Les adaptations, dès lors qu’elles traversent la frontière, sont quasi systématiquement nivelées, “white washée”, pour qu’elles ressemblent davantage, paraît-il, au public américain (donc majoritairement blanc, selon ces mêmes déductions absurdes). Mais Jane The Virgin a conservé sa famille vénézuélienne, et se permet même des lignes de dialogues en espagnol.
Entre deux intrigues folles, la série aborde le sujet, pour le moins sensible aux US, de l’immigration. Abuela est en effet sur le sol américain illégalement. Quand elle craint pour sa “green card”, ce petit bout de papier qui a le pouvoir de détruire ou non tout ce qu’elle a créé ici, on prend la mesure de son angoisse et de la fragilité de sa situation.
Son entrevue aux services de l’immigration est un rite de passage bien tardif pour Alba, mais c’est une étape essentielle. La scène est marquée par le fait que, pour la première fois dans la série, elle parle anglais. Pour montrer son assimilation, comme si l’intégration ne tenait qu’à cela. Alba comprend parfaitement l’anglais mais a toujours tenu a parler dans sa langue d’origine, l’espagnol.
Et mine de rien, une série télé de network avec de nombreux passages sous-titrés, c’est rare, et c’est un pied de nez à la culture blanche dominante pour qui l’on doit systématiquement arrondir les angles, aplanir le plus possible les spécificités culturelles d’ethnicités différentes. Jane The Virgin, fait le chemin inverse : si on veut connaître Alba, il faut faire l’effort de lire ses sous-titres, elle ne renoncera pas à qui elle est pour si peu.

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