Deux ans après son départ de Community, Donald Glover revient par la grande porte avec Atlanta, plongée drôle et poétique dans le monde du hip-hop et dans la psyché torturée du rappeur.
À voir aussi sur Konbini
Cet été, la série The Get Down nous transportait dans le Bronx des 70’s, aux racines d’un mouvement qui brille plus que jamais aujourd’hui. Avec Atlanta, Donald Glover aborde aussi le hip-hop avec une vision plus personnelle et contemporaine.
Il faut dire que depuis son passage inoubliable dans Community, l’acteur cultive en parallèle son autre passion : le rap, et avec succès. Deux albums (Camp en 2011 et Because the Internet en 2014) et plusieurs mixtapes lui ont assuré une street cred’ dans le milieu, sous le pseudo de Childish Gambino. Ce qui ne l’a pas empêché de poursuivre sa carrière d’acteur, notamment dans des gros films US comme Seul sur Mars ou Magic Mike XXL.
Avec Atlanta, il réunit ses deux métiers : l’acting et la musique. Dans cette dramédie qu’il a créée et écrite, Donald Glover incarne Earn Marks, un jeune papa un peu loser, en décalage par rapport au monde qui l’entoure. Il se met en tête de devenir le manager de son cousin Alfred, mi-gangsta mi-rappeur underground, qui est en train de se faire connaître sous le pseudo Paper Boi. Il tente aussi maladroitement de sauver sa relation avec la maman de sa fille, Vanessa (Zazie Beetz), qui en sa claque de cet adulescent toujours fauché.
“Stop being weird !”
Œuvre très personnelle, Atlanta possède tous les attributs de la dramédie portée par la vision de son auteur. À l’instar de Lena Dunham avec Girls ou Louis C.K. avec Louie, le show nous plonge dans l’univers de Donald Glover, son humour, sa musique, ses questionnements.
Et on a envie d’y rester le plus longtemps possible dans ce monde, où se mêlent réflexions philosophiques, moments surréalistes, comiques, et sous-texte sociétal fort. Deux scènes en particulier marquent les esprits en tapant dans le mille. Dans le premier épisode, ce mec blanc très irritant qui prononce le “N word” sans complexe en racontant une blague à Earn, puis ne le prononce plus quand il doit à nouveau la faire devant trois de ses amis.
Puis dans le deuxième épisode, il y a cette scène géniale au poste de police, pendant laquelle tout le monde se moque d’un homme noir un peu dingo. Jusqu’au moment où ce dernier recrache de l’eau sur l’un des flics présents. On passe d’un innocent, “How’s it going buddy ?” (“Comme ça va mon grand ?”), à un énorme coup de matraque dans la tête du pauvre homme, le tout sous les yeux d’une assemblée composée majoritairement d’Afro-Américains, qui baisse les yeux au sol. Dans cette même séquence au poste de police – vraiment très réussie –, un homme se rend compte que son ex est une femme trans. Cette dernière subit sans un mot les remarques vexantes, avant que le mec hurle à qui veut l’entendre qu’il n’est pas une “tapette”.
En deux épisodes seulement, Donald Glover aborde des sujets aussi sensibles et importants que la transphobie et les violences policières envers les personnes noires, sans oublier de se poser des questions existentielles façon crise de la trentaine (se caser, avoir un boulot, lâcher ses rêves ou pas) ou encore de porter un regard amusé sur la célébrité, à travers les pérégrinations du personnage de Paper Boi, incarné avec flegme par Brian Tyree Henry.
Sur la forme aussi, Atlanta est une réussite. Soignée visuellement, elle suit ses personnages à la trace, de façon organique, tout en s’autorisant de très jolis plans décadrés. Donald Glover supervise évidemment la bande son hip-hop. Le titre “Paper Boi” que l’on entend dans les premiers épisodes a d’ailleurs été écrit par son frère, Stephen Glover, et composé avec le producteur Christopher Cobb. “J’essayais de capturer l’essence d’Atlanta”, a-t-il expliqué au site Thrillist. Car la série ne porte pas ce nom pour rien. L’idée est aussi de nous plonger dans l’ambiance d’Atlanta, de sa scène hip-hop, de la vie de ses habitants.
Vous l’aurez compris, on est sous le charme de l’univers que nous propose le jeune showrunner. Il surfe habilement avec les clichés liés au hip-hop (le côté gangsta) en proposant un univers à la fois réaliste et décalé. Un vrai coup de cœur.