Enlightened
Cocréée par Laura Dern et Mike White, Enlightened s’inspire du vrai burn-out de ce dernier. En 2004, éreinté par la préparation d’un pilote de sitcom, le scénariste touche le fond et envoie un fax enragé à tous les cadres de la chaîne (sans surprise, sa série ne verra jamais le jour). C’est aussi comme ça que démarre Enlightened, sortie sur HBO en 2011. Après un spectaculaire pétage de plombs à son bureau, Amy Jellicoe, cadre dans une entreprise sans âme, part faire une retraite de méditation. À son retour, la jeune femme tente d’appliquer une nouvelle philosophie à sa vie d’avant. Mais sa sérénité frôle parfois le déni, et Amy va découvrir que réparer ses relations passées et progresser vers une forme de paix intérieure ne se fera pas sans difficultés.
À voir aussi sur Konbini
© HBO
Volontairement lente et anti-glamour, rythmée par les interrogations d’Amy sur le sens de l’existence, la série fait preuve d’une sincérité désarmante et presque repoussante pour un public alors peu habitué à ce genre de narration. Unique dans le paysage télévisuel de l’époque, Enlightened met en scène une femme souvent naïve et moralisatrice, en proie aux pires impulsions… Bref, une héroïne complexe, en lutte permanente avec sa santé mentale et son rapport au monde. Après deux courtes saisons, la série sera annulée faute d’audiences, mais elle mérite d’être revisitée, car sa volonté d’aborder des sujets encore profondément tabous la rend aujourd’hui précurseuse.
À voir sur : OCS
This Way Up
© Channel4
Lorsque This Way Up démarre, Áine, jeune Irlandaise installée à Londres, sort d’un centre de désintoxication après avoir fait une dépression nerveuse. C’est à partir de là que la vraie réhabilitation commence. Épaulée par sa grande sœur Shona (l’incomparable Sharon Horgan, cocréatrice de la série Catastrophe), Áine doit réapprendre à vivre au quotidien, et ne pas se laisser déstabiliser par les nombreux doutes et crises d’angoisses qui accompagnent sa guérison.
Derrière son sujet sérieux, This Way Up se révèle aussi une des séries les plus drôles de ces dernières années. Grâce à l’écriture et au charisme de sa créatrice et interprète principale, l’humoriste Aisling Bea, ainsi qu’à son alchimie avec le reste du casting, les six courts épisodes se dévorent avec joie. On attend avec impatience la saison 2.
À voir sur : Canal+
I May Destroy You
© HBO
Jeune autrice londonienne en panne d’inspiration, Arabella voit son univers se fracturer lorsqu’elle est droguée et violée dans un bar, la veille d’une deadline. Plus grosse claque télévisuelle de l’année 2020, I May Destroy You est le chef-d’œuvre de Michaela Coel, une série kaléidoscopique et bouleversante, inspirée par le viol subi par la créatrice pendant l’écriture de son autre série, Chewing-gum.
À travers l’expérience d’Arabella mais aussi celles de ses amis les plus proches, Kwame et Terry, I May Destroy You creuse avec une finesse rare les multiples enjeux du consentement et de la culture du viol. Mais c’est aussi un récit foudroyant sur le traumatisme et son effet ricochet : même en faisant tout ce qu’il “faut faire” (porter plainte, en parler à ses amis), Arabella découvre que la guérison est longue, douloureuse et tout sauf linéaire. Malgré son sujet très sombre, I May Destroy You sait aussi faire preuve d’un humour salvateur, et se révèle de plus en plus lumineuse, tissant au fil des épisodes une superbe histoire de reconstruction à travers l’art.
À voir sur : OCS
BoJack Horseman
© Netflix
C’est un des miracles de la Peak TV : avoir réussi à produire l’une des plus belles et bouleversantes œuvres sur le poids de la dépression, de l’anxiété et de l’addiction… qui se trouve aussi être une comédie animée sur un cheval qui parle. Dans cette série Netflix créée par Raphael Bob-Waksberg, BoJack est un acteur has been rongé par l’alcoolisme, qui se réfugie derrière sa cruauté et son humour cynique pour masquer une profonde haine de soi. Au fil de la série, il noue ou renoue des liens avec des personnages aussi attachants qu’excentriques, eux aussi en proie à leur lot de questionnements et de démons.
Bourrée de répliques hilarantes, de jeux de mots animaliers et de claques émotionnelles dignes de The Leftovers, BoJack Horseman est une série ambitieuse qui n’a cessé de s’améliorer au fil des saisons. Sans se limiter au portrait, remarquablement fin, de son personnage principal, la série explore aussi à travers princesse Carolyn, Todd, Diane et les autres, les affres de la dépression, l’angoisse de la maternité, la fragilité des liens amicaux ou encore la difficulté du coming out. Une des meilleures comédies de son époque, dont on se souviendra autant pour ses excellentes blagues que pour ses épisodes emprunts de poésie.
À voir sur : Netflix
Crazy Ex-Girlfriend
© The CW
Avocate dans un cabinet new-yorkais de renom, la très ambitieuse Rebecca Bunch décide pourtant sur un coup de tête de partir s’installer à West Covina, une petite ville médiocre de Californie. Pourquoi West Covina ? Parce que c’est là que vit Josh Chan, son ex-petit ami de colonie de vacances, que Rebecca va tenter de reconquérir. Série musicale brillante et irrévérencieuse, Crazy Ex-Girlfriend annonce dès le départ son intention de subvertir et parodier les codes de la pop culture (surtout ceux de la comédie romantique), avec des chansons hilarantes qui décortiquent les doubles standards entre hommes et femmes, l’obsession romantique ou les triangles amoureux.
Au départ, la série avance sans révéler ses cartes, se présentant surtout comme une romcom loufoque et féministe. Mais au fil des épisodes, les créatrices Rachel Bloom et Aline Brosh McKenna dévoilent une réflexion profonde et très nuancée sur la santé mentale de leur héroïne. Toujours en chanson et avec humour, Crazy Ex-Girlfriend explore ainsi la douleur de la haine de soi, le tabou des antidépresseurs, mais aussi le soulagement que l’on peut ressentir en recevant enfin le bon diagnostic. Un récit d’émancipation bien plus complexe que le titre de la série aurait pu laisser croire.
À voir sur : Netflix