Le photojournaliste Yan Morvan revient sur son travail sur la guerre du Liban.
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En 1982, suite à l’invasion du Liban par l’armée israélienne, le photojournaliste Yan Morvan est envoyé sur place par l’agence Sipa pour le journal Newsweek. Il suit ce conflit pendant trois années, armé de son appareil photo, et raconte la guerre, comme il la voit : celle d’un pays déchiré.
Face à une situation complexe, il tente de ne jamais prendre parti en privilégiant des acteurs du conflit et essaie de restituer le plus fidèlement possible les moments importants de cette guerre majeure de cette fin du XXe siècle.
Pour cela, il a réalisé un reportage à la chambre photographique sur la “ligne verte”, c’est-à-dire la ligne de démarcation qui séparait les quartiers musulmans de Beyrouth-Ouest des quartiers chrétiens de Beyrouth-Est dans la capitale libanaise. Son nom fait référence à la végétation qui a poussé tout le long de cette séparation puisque la zone était inhabitée. La plupart des bâtiments sur la ligne ont été endommagés et cet endroit était devenu une sorte de no man’s land. Yan Morvan explique :
“La ligne verte est une frontière. Une ligne de front qui sépare Beyrouth en deux parties depuis maintenant plus de dix ans. La partie ouest où vivent les populations à majorité musulmane et la partie est où vivent celles qui sont à dominance chrétienne.
Cette brisure s’étend des faubourgs lointains, le village de Karamé au-delà de l’aéroport, point de jonction entre les milices chiites Amal et les Druzes venant de la montagne, jusqu’au port de Beyrouth, théâtre de la guerre civile des années 1975-1976. Au total près de 15 kilomètres.”
Il raconte que si le côté chrétien n’est habité que par des francs-tireurs ou des soldats, dans le secteur ouest, la population civile est mélangée aux miliciens du Amal et du Hezbollah. Ces civils sont d’ailleurs la cible d’obus, et le bilan des victimes ne cesse de s’alourdir.
Au fil des images de Yan Morvan on découvre des paysans attirés par la ville lors du boom économique des années 1960 à présent pris au piège sans moyens de fuir. On rencontre aussi des artisans et ouvriers trop pauvres pour quitter le pays qui témoignent d’une existence assiégée. Des images fortes, qui documentent la réalité et montrent l’absurdité de la guerre.
Un reportage nécessaire qui illustre la montée du chiisme libanais mais aussi l’échec de la politique des États-Unis au Moyen-Orient. Il en résulte aujourd’hui un ouvrage intitulé Liban — Chroniques de guerre 1982-1985, publié aux éditions Photosynthèses, à découvrir pour mieux comprendre notre histoire mais aussi notre monde actuel.
Liban — Chroniques de guerre 1982-1985, de Yan Morvan, publié aux éditions Photosynthèses.