Einstein n’en reviendrait pas : une collaboration internationale d’astronomes a prouvé en image la présence d’un trou noir supermassif au cœur de notre galaxie, le Sagittarius A*. Cette découverte intervient trois ans après le premier trou noir (M87*) photographié dans la galaxie Messier 87, située à 55 millions d’années-lumière, et confirme les prédictions de la relativité générale.
À voir aussi sur Konbini
“Je peux vous présenter l’image du trou noir Sgr A* au centre de la galaxie”, a annoncé sous les applaudissements Huib Jan Van Langevelde, directeur du projet EHT, lors d’une conférence de presse à Garching en Allemagne. Techniquement, on ne peut pas voir un trou noir car l’objet est si dense et sa force de gravité si puissante que même la lumière ne peut s’en échapper.
Mais on peut observer la matière qui circule autour, avant d’y être avalée. “Nous avons une preuve directe que cet objet est un trou noir”, a expliqué ensuite Sara Issaoun, du Centre d’astrophysique d’Harvard, en décrivant “le nuage de gaz [autour du trou noir] qui émet des ondes radio”.
Des années de recherche
“Nous avons deux types de galaxies complètement différents et deux masses de trous noirs très différents, mais près de leurs bords, ces trous se ressemblent étonnamment”, a dit Sera Markoff, coprésidente du conseil scientifique de l’EHT, dans un communiqué. “Cela nous indique que la relativité générale [avec la théorie de la gravitation] régit ces objets de près”, a-t-elle ajouté.
L’image présentée est le fruit de plusieurs heures d’observation réalisées essentiellement en 2017, et suivies par cinq ans de calculs et de simulations, ayant impliqué plus de 300 chercheur·se·s de 80 instituts. Elle a été beaucoup plus difficile à obtenir que celle de M87* parce que le trou noir au centre de la Voie lactée est beaucoup plus petit.
Le nuage de gaz l’entourant, avant d’y être avalé, met à peine douze minutes pour en faire le tour, contre plus de deux semaines pour M87*. La luminosité et la configuration du gaz changeaient donc rapidement pendant l’observation : “C’est un peu comme si on essayait de prendre une photo claire d’un chiot qui court après sa queue”, a commenté Chi-Kwan Chan, un scientifique de l’EHT.
Les deux images et leur comparaison vont permettre d’étudier plus en détail le comportement de la matière dans l’environnement le plus extrême qui soit de l’Univers, “avec des gaz chauffés à des milliards de degrés, de puissants courants magnétiques et de la matière circulant à une vitesse proche de la lumière”, a expliqué à l’AFP le Pr. Heino Falcke, ex-responsable du conseil scientifique de l’EHT.
Cet environnement devrait permettre d’observer les déformations de l’espace-temps à proximité d’un objet supermassif et le comportement de la gravité, prédites dans la théorie générale de la relativité qu’Albert Einstein a postulée en 1915.
Stellaire ou supermassif ?
Les trous noirs sont “stellaires” quand ils ont la masse de quelques soleils, ou “supermassifs” quand ils ont une masse de plusieurs millions voire milliards de soleils. Sagittarius A* (Sgr A*), qui doit son nom à sa détection dans la direction de la constellation du Sagittaire, a une masse d’environ quatre millions de soleils et se trouve donc être un trou noir supermassif.
Avec ses quatre millions de masse solaire, Sgr A* est lui un poids plume dans le bestiaire des trous noirs supermassifs. Se trouvant à 27 000 années-lumière de la Terre, cet objet céleste est suspecté depuis la détection d’une source radio inhabituelle au centre de la galaxie, en 1974.
Konbini arts avec AFP