Plusieurs centaines de mètres carrés de tissu recyclable en polypropylène argent bleuté, prévus pour ondoyer au gré des éléments, ont été déroulés dimanche 12 septembre sur l’un des côtés de l’Arc de triomphe, opération lançant la dernière ligne droite de l’empaquetage du monument parisien.
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Du 18 septembre au 3 octobre 2021, le rêve de jeunesse de Christo (décédé en mai 2020) et de Jeanne-Claude (décédée en 2009) sera réalisé : haut lieu des commémorations françaises, l’Arc de triomphe, haut de cinquante mètres, sera intégralement transformé en gigantesque paquet-cadeau, maintenu par 3 000 mètres de corde rouge. En 1985, Christo et Jeanne-Claude avaient déjà empaqueté ainsi à Paris le Pont-Neuf, enjambant la Seine.
Après des semaines de préparatifs, une équipe de 95 cordistes s’est lancée dimanche matin depuis le sommet de l’Arc de triomphe pour déployer, côté avenue de Wagram, un premier rouleau de tissu. L’empaquetage (25 000 mètres carrés de tissu) se poursuivra jour et nuit pour être fin prêt le 18 septembre 2021, jour de l’inauguration.
“Aujourd’hui, c’est un des moments les plus spectaculaires de l’installation. L’Arc de triomphe empaqueté commence à prendre vie et se rapproche plus encore de la vision de ce qui a constitué le rêve de toute une vie pour Christo et Jeanne-Claude […] Le 18 septembre au matin, une fois que nous aurons fini de disposer les cordes et d’apporter les dernières touches, les grilles de protection du chantier en cours seront retirées pour permettre gratuitement au public de venir, de voir et de toucher l’œuvre d’art”, a confié Vladimir Yavachev, neveu de l’artiste, qui supervise le projet.
L’empaquetage de l’Arc de triomphe “sera comme un objet vivant qui va s’animer dans le vent et refléter la lumière. Les plis vont bouger, la surface du monument devenir sensuelle”, expliquait Christo en présentant cet ultime projet, deux ans avant sa mort.
Des questions environnementales
Dès 1962, Christo et Jeanne-Claude avaient signé un photomontage avec l’Arc de triomphe empaqueté, une idée survenue en regardant le monument depuis leur premier appartement parisien, avenue Foch.
D’un coût de 14 millions d’euros, le projet est entièrement autofinancé, sans subvention publique, grâce à la vente d’œuvres originales de Christo et Jeanne-Claude, dessins préparatoires, souvenirs, maquettes et lithographies. Le financement de l’œuvre avait fait couler beaucoup d’encre : sur Twitter, une rumeur disait que le contribuable avait payé pour cette installation et que l’argent aurait dû aller à la restauration de l’Arc de triomphe.
Samedi, dans le quotidien Le Monde, l’architecte Carlo Ratti, l’un des amis du couple, a cependant appelé dans une tribune à abandonner “l’esthétique des emballages à haut gaspillage”.
“Je propose que l’on arrête d’emballer l’Arc de triomphe, tant pour des raisons environnementales qu’intellectuelles. Sur le plan environnemental, pouvons-nous nous permettre de gaspiller 25 000 mètres carrés de tissu pour l’emballage d’un monument ? L’industrie de la mode est responsable de 10 % des émissions mondiales de carbone”, écrit Carlo Ratti.
Sollicité par l’AFP, le neveu de Christo n’a pas souhaité réagir.
L’invisibilisation de Jeanne-Claude
De plus, d’autres voix (dont celle de Margaux Brugvin) fustigent l’invisibilisation de Jeanne-Claude Denat de Guillebon, moitié du duo “Christo et Jeanne-Claude” sans cesse oubliée par les institutions, les musées et même le hashtag officiel de l’événement. N’oublions pas que lors de la grande exposition organisée sur le travail du couple au Centre Pompidou en 2020, le musée n’avait au départ retenu que le nom de Christo. Une énième preuve de l’invisibilisation volontaire des femmes dans l’histoire de l’art.
Avec AFP.