À 68 ans, l’ancien membre des Black Panthers et photojournaliste s’est éteint ce vendredi 19 mai, des suites d’une maladie.
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Le photographe Stanley Greene est décédé ce matin à Paris. Avant même que la nouvelle n’ait été confirmée par les proches de l’artiste, le petit monde des amoureux de la photographie avait commencé à s’émouvoir de la disparition de ce grand homme, sur les réseaux.
Fort d’une carrière militante à travers le monde, Stanley Greene a marqué le monde avec ses images documentaires des moments forts du XXe siècle. Afin de lui rendre hommage, voici un retour sur sa carrière.
“Plus on est civilisé, plus on devient barbare”
Né à New York en 1949, Stanley Greene s’intéresse très jeune aux mouvements militants et rejoint le parti révolutionnaire afro-américain des Black Panthers. Il participe également aux scènes minoritaires et avant-gardistes, en produisant une “documentation unique de la scène punk de San Francisco dans les années 1970 et 1980”, précise le site de Noor, l’agence photo qu’il a cofondée en 2007.
Après sa rencontre avec le photographe William Eugene Smith, dont il devient l’assistant, il commence à travailler dans divers magazines, en tant que photographe. La trentaine déjà bien entamée, Greene a la bougeotte et déménage à Paris où il officie comme photographe de mode, au moment où l’Europe est secouée par le déclin du bloc soviétique et la chute du mur du Berlin, qu’il part immortaliser dès qu’il entend la nouvelle :
“J’avais l’impression de faire partie de l’Histoire, et j’ai toujours le même sentiment quand j’y repense aujourd’hui. La chute du Mur signifiait la liberté pour tant de personnes, mais cela a aussi créé tant de guerres et de morts. Ce que j’ai appris, c’est que plus on est civilisé, plus on devient barbare.”
“Je me suis dit que si j’allais mourir, autant documenter tout ça”
Après cette expérience, il quitte définitivement la mode pour se consacrer aux conflits internationaux. Bien que membre de l’agence française Vu de 1991 à 2007, il s’installe à Moscou en 1993 et travaille pour le compte de nombreux journaux internationaux tels que Libération, Time, The New York Times Magazine, Newsweek ou Le Nouvel Observateur.
Son métier le mène parfois à des situations dangereuses, notamment lors de la crise constitutionnelle russe en 1993, puisqu’il se retrouve coincé à l’intérieur de la “Maison-Blanche” russe au moment où le parlement et l’armée assiègent le bâtiment et le président d’alors, Boris Eltsine. Seul journaliste occidental restant au milieu de ce bain de sang qui fait 187 morts et 437 blessés, Greene documente l’événement et reçoit des prix au World Press Photo Awards pour deux de ses images. A posteriori, il raconte avoir vu sa mort venir :
“Un journaliste originaire de Sibérie a été touché par l’explosion et moi j’étais allongé là, couvert de sang et de fumée. Son sang. Je pensais que c’était le mien. Tout l’étage était en feu et les rebelles sont venus et ont sorti le jeune journaliste. J’allais mourir. Ils sont revenus et m’ont sorti des décombres.
Je me suis dit que si j’allais mourir, autant documenter tout ça.”
Photographie issue de la série Plaie ouverte, consacrée au conflit Tchétchène
Continuant à travailler pour la presse française, Stanley Greene, part au Soudan du Sud afin de couvrir la guerre et la famine sévère qui y font rage, pour l’hebdomadaire français Globe Hebdo. Le photographe n’en finira alors pas de parcourir la Terre afin de documenter les affres du monde. Il part en Inde, puis plusieurs années en Tchétchénie, afin de couvrir le conflit entre les forces armées russes et les rebelles, au Rwanda et au Zaïre aux côtés de Médecins sans Frontières ainsi qu’en Irak, au Soudan, au Darfour, en Afghanistan, au Cachemire et au Liban.
Récipiendaire de nombreux prix et honneurs, l’artiste quitte Vu en 2007 pour Noor, agence photo qu’il cofonde la même année et qui rassemble les photographes qui documentent “la désobéissance civile et politique, les problématiques environnementales, les guerres, les famines et les catastrophes naturelles dans le monde entier.”
De ses jeunes années à sa mort, bien qu’ayant perdu le combat contre la maladie, on se rappellera de Stanley Greene comme un battant, un rebelle qui a utilisé son art pour témoigner des injustices de notre monde et documenter ses évolutions. Rest in Peace, Stanley.
Liban, 2015.
Alep, Syrie, 2013.
Saint-Pétersbourg, Russie, 2001.
Paris, France, 2008.
Irak, 2004.
Sibérie, Russie.
Porto Rico, 2005.
Tchétchénie, 1996.
Cannes, 2010.