Un photographe et un scientifique ont créé une application qui bouleverse les codes des réseaux sociaux habituels, en contraignant les utilisateurs à ne partager que la réalité de leur quotidien.
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Minutiae a décidé de prendre le contre-pied des réseaux sociaux existants et de leurs caractéristiques premières en obligeant ses utilisateurs à partager les moments les plus banals de leur quotidien, sans retour de la part des autres utilisateurs : “Minutiae est une application anonyme, anti-réseaux sociaux. Pas de profils, pas de likes, pas de commentaires”.
La plateforme est issue de la collaboration entre le photographe Martin Adolfsson et l’artiste et neuroscientifique Daniel J. Wilson. Défini comme un “projet artistique participatif de 1 440 jours célébrant les moments ordinaires de la vie, qu’on ne conserve pas”, Minutiae propose de se libérer des carcans dans lesquels nous enferment les réseaux sociaux (qui nous poussent à publier des mises en scène du quotidien) en nous obligeant à poster du contenu “vrai” auquel nous n’avons pas réfléchi auparavant et sur lequel nous n’avons pas apposé trois filtres différents.
Le chemin de la liberté est pavé de contraintes
Pour cela, l’application envoie chaque jour aux participants une alerte les pressant d’immortaliser ce qui se trouve devant eux. Comme le précise le site Wired, l’utilisateur dispose alors d’une minute pour ouvrir Minutiae avant que l’alerte ne disparaisse, et de 5 secondes afin de capturer ce qui se trouve en face de lui, soit sa vie à cet instant T, sans filtre : “On n’a pas le temps de penser à la composition. Pas l’opportunité de trouver quelque chose de plus cool à photographier.”
Si l’interaction n’est certainement pas le maître mot du projet, chaque utilisateur se voit tout de même attribuer un autre participant anonyme, dont il peut faire défiler les photos pendant une minute (et pas une seconde de plus) sans apporter de commentaire ni aucune réaction. 60 secondes dans la platitude de la journée d’un inconnu, peut-être situé à des milliers de kilomètres de vous. Après les minutes imparties, impossible de rentrer de nouveau dans l’application, accessible seulement lors de la première alerte.
Par la contrainte établie, Martin Adolfsson et Daniel Wilson souhaitent détourner la pression insidieuse des réseaux habituels : “On voit cela comme un moyen de liberté par la contrainte – il n’y a pas la pression de proposer une curation intéressante et dynamique de soi-même puisque le lien entre votre photo et la personne a été effacé”. De plus, la limite d’une minute empêche les participants de perdre trop de temps sur Minutiae, aux antipodes du scroll incessant sur Twitter ou Instagram. Ce chemin vers la liberté pavé de contraintes est assez paradoxal, mais une dernière chose l’est encore plus : la liberté a un prix, 16,99 euros sur l’App Store.