Parcourant les toilettes pour femmes du monde entier, Maxi Cohen réalise une série photo et vidéo qui aborde avec justesse le thème de la non-mixité.
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Véritable espace privé dans l’espace publique, les toilettes sont les seuls lieux où il est possible de s’isoler du reste du monde. Témoin de moments d’intimité ou de vulnérabilité, la porcelaine blanche regorge de secrets. C’est cette fonction de refuge qui a intéressé de près Maxi Cohen, artiste, photographe et réalisatrice américaine.
En 1978, alors que son premier long-métrage – Joe and Maxi, un film sur sa relation à son père – est en compétition au Miami Film Festival, elle décide de fuir l’interminable cérémonie de remise des prix. Elle se réfugie dans les toilettes d’un prestigieux hôtel et tombe alors sur des femmes octogénaires en train d’ajuster leurs corsets et de remettre leurs faux cils : elle décide d’immortaliser cet instant de coquetterie à l’aide de son appareil photo. C’est ainsi qu’est née Ladies Room Around the World, une série pour laquelle Maxi Cohen explore les toilettes pour femmes du monde entier, de l’Australie à la Zambie, de l’Inde à la Bosnie en passant par le Brésil et Israël. Sur son site Web, l’article explique sa fascination pour ces lieux rarement mis en avant :
“Durant mon enfance, les WC étaient ma cachette préférée, et le seul sanctuaire de la solitude dans un monde partout surpeuplé. Dans les toilettes pour femmes, je me motivais à être courageuse, je travaillais mon éloquence et je devenais invisible au reste du monde”.
La non-mixité, un moyen de libérer la parole
En explorant les cabinets du monde entier, l’artiste a commencé à se poser des questions qui l’ont conduite à une véritable prise de conscience féministe. Passant son temps à observer les femmes, elle a réalisé à quel point nous appréhendons le monde à travers les mots et les actions des hommes. Étant témoin de conversations passionnantes, de gestes de coquetterie, de pleurs, de moments graves, l’artiste a voulu montrer ces femmes souvent invisibilisées. Elle a décidé de se mettre à filmer, en plus de photographier les lieux, pour recueillir des témoignages. Pour elle, la non-mixité des toilettes est un moyen de libérer la parole, elle explique :
“Dans les années 1990, je suis entrée dans un bar autochtone dans l’arrière-pays australien. Deux femmes m’ont signalé le seul homme caucasien à s’asseoir avec nous. Craignant qu’on puisse nous entendre, elles m’ont entraînée dans les toilettes pour m’informer des viols de jeunes filles et garçons, courants dans la communauté. C’est la première vidéo que j’ai prise dans des toilettes pour femmes.”
Depuis, elle continue à photographier et à filmer les toilettes pour femmes du monde entier, enregistrant de nombreuses confessions, sur des sujets comme le sexe ou l’adultère mais aussi les violences, la mode, la gloire ou encore la contestation sociale. Une expérience humaine enrichissante dans un lieu pourtant si banal. À découvrir en images.
Vous pouvez retrouver le travail de Maxi Cohen sur son site personnel.