Que vont devenir les marbres du Parthénon pillés par le Royaume-Uni ?

Que vont devenir les marbres du Parthénon pillés par le Royaume-Uni ?

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© William Edwards/Will Vassilopoulos/AFPTV/AFP

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Par Konbini avec AFP

Publié le , modifié le

La bataille est longue.

Les marbres du Parthénon pourraient “bientôt” être restitués à la Grèce dans le cadre d’un prêt à long terme en cours de finalisation entre le British Museum et Athènes, a rapporté le journal britannique The Telegraph. Selon le Telegraph, le président du musée et ancien ministre britannique des Finances George Osborne est en train de conclure un accord avec Athènes pour le retour en Grèce de ces trésors, dans le cadre d’un “échange culturel” qui permettrait de contourner une loi britannique empêchant le musée londonien de démanteler sa collection.

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“Nous avons déjà dit publiquement que nous cherchons activement un nouveau partenariat concernant le Parthénon avec nos amis en Grèce et, alors que nous entrons dans une nouvelle année, des discussions sont en cours”, a réagi auprès de l’AFP un porte-parole du British Museum. Depuis le début du XXe siècle, la Grèce demande officiellement la restitution sans succès d’une frise de 75 mètres détachée du Parthénon ainsi que d’une des célèbres cariatides provenant de l’Érechthéion, petit temple antique également sur le rocher de l’Acropole, toutes deux pièces maîtresses du British Museum.

Londres affirme que les sculptures ont été “acquises légalement” en 1802 par le diplomate britannique Lord Elgin qui les a revendues au British Museum. Mais la Grèce soutient qu’elles ont été l’objet d’un pillage alors que le pays était sous occupation ottomane. L’accord négocié entre le musée et la Grèce serait, selon les sources citées par le Telegraph, un accord de prêt pour que la frise retourne en Grèce rapidement. Mais ce “geste” ne mettrait pas fin à la querelle, Athènes entendant bien continuer à exiger une restitution totale.

Les médias grecs avaient déjà rapporté en décembre que des négociations secrètes étaient en cours depuis un an entre George Osborne et le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis. Le gouvernement britannique avait alors rappelé que le British Museum était soumis à une loi de 1963 qui l’empêche de céder ou de vendre des objets de sa collection, à part dans des conditions très limitées.

Mise à jour du 3/01/2024 : Le gouvernement britannique avait tenté au début des années 2000 de favoriser un prêt à la Grèce des frises du Parthénon, en échange du soutien d’Athènes à l’accueil des Jeux olympiques de 2012 à Londres, ont révélé des archives rendues publiques. Une correspondance datant de 2002 et 2003 montre que les deux gouvernements s’étaient alors rapprochés d’un accord. La Grèce proposait le retour des frises sous la forme d’un prêt à long terme pour les exposer à Athènes dans un nouveau musée au pied de l’Acropole, dont l’ouverture devait coïncider avec les Jeux olympiques de 2004 organisés dans la capitale grecque. Au même moment, le gouvernement travailliste de Tony Blair se mobilisait pour défendre la candidature – finalement victorieuse – de Londres à l’accueil des JO de 2012.

Dans ce contexte, la conseillère à la culture de Tony Blair, Sarah Hunter, avait écrit dans un mémo au Premier ministre que les frises pourraient être “une monnaie d’échange efficace” lors des votes du Comité international olympique. Elle suggérait que le gouvernement “encourage publiquement et en privé” le British Museum “à trouver un arrangement sous douze mois”. Dans son mémo, la conseillère jugeait favorablement la solution d’un prêt de long terme proposée par Athènes, et dénonçait “l’intransigeance” du musée britannique. Elle défendait l’idée d’un traité bilatéral pour encadrer ce prêt.

Tony Blair, visiblement convaincu, avait annoté d’un “oui” manuscrit le mémo, suggérant de confier la mission de “négocier cela” à David Owen, ancien ministre des Affaires étrangères. L’initiative n’a pas abouti, le British Museum, déclarant quatre mois plus tard, en août 2003, que ses responsables “ne peuvent envisager aucune circonstance dans laquelle ils pourraient accéder à la demande du gouvernement grec”.

Mise à jour du 12/01/2023 : Le gouvernement britannique a douché les espoirs d’un retour rapide en Grèce des frises du Parthénon, exposées au British Museum de Londres, y compris sous la forme d’un prêt à long terme évoqué récemment par la presse britannique. “J’ai été très claire à ce sujet : je ne pense pas qu’elles devraient retourner en Grèce”, a déclaré la ministre de la Culture Michele Donelan sur la BBC à propos de ce dossier épineux au cœur de tensions entre Londres et Athènes. “Nous ne devrions pas les renvoyer, et en fait, elles appartiennent au Royaume-Uni, où nous avons pris soin d’elles longtemps”, a-t-elle dit.

Le président du British Museum George Osborne “ne va pas les renvoyer. Ce n’est pas son intention. Il n’a aucun désir de le faire”, a balayé la ministre. Elle semble écarter le prêt à long terme qui avait été évoqué : “Ce n’est certainement pas ce qu’il prévoit non plus.” Dans le podcast News Agents, la ministre a estimé que l’idée de prêts sur 100 ans n’était “pas du tout dans l’esprit de la législation”. Un porte-parole du gouvernement grec a admis que les négociations avec le British Museum n’étaient “pas faciles”.

“Nous avons parcouru un long chemin, on a fait des pas [en avant] et les efforts continuent”, a-t-il dit. “L’objectif est le retour définitif” des frises, a insisté ce porte-parole, car la Grèce “ne reconnaît ni la possession ni la propriété par le British Museum”. La pression s’est accentuée ces dernières années, dans le sillage des mouvements contre le racisme, pour que les musées occidentaux rendent des œuvres, notamment obtenues en période coloniale, à leur pays d’origine. La ministre britannique a d’ailleurs dit craindre qu’un retour des frises du Parthénon n’ouvre “la boîte de Pandore”. “C’est une pente très glissante”, a-t-elle souligné.

En août, un musée de Glasgow en Écosse a remis à l’Inde sept objets d’art pillés dans des lieux sacrés pendant la colonisation au XIXe siècle, ce qui représentait une première pour une institution culturelle au Royaume-Uni. En revanche, des habitant·e·s de l’île de Pâques dans le Pacifique continuent de réclamer au British Museum la restitution du moaï Hoa Hakananai’a, un monolithe haut de 2,4 mètres pesant quatre tonnes. Il avait été retiré de l’île sans autorisation en 1868 par le navigateur Richard Powell qui l’avait offert à la Reine Victoria.

Mise à jour du 28/11/2023 : Londres est toujours opposé à un retour des marbres du Parthénon en Grèce. Le Premier ministre britannique Rishi Sunak, qui doit rencontrer son homologue grec Kyriakos Mitsotakis, n’a “pas l’intention” de faciliter le retour des marbres du Parthénon à Athènes, comme réclamé de longue date par la Grèce, a indiqué son porte-parole. Le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis a indiqué qu’il insisterait pour leur retour lors de sa rencontre avec Rishi Sunak, à l’occasion d’une visite de trois jours au Royaume-Uni. Mais le porte-parole de Rishi Sunak a affirmé à des journalistes que le Premier ministre a toujours été “constant” dans sa position, estimant que les marbres du Parthénon sont “un atout important” pour le Royaume-Uni, qui a “sauvegardé” ce patrimoine “depuis des générations”.

“Ils appartiennent légalement” au British Museum. “Nous soutenons fermement cette position, et le règlement du British Museum interdit le retrait d’objets de la collection du musée”, a-t-il ajouté. “Nous n’avons pas l’intention de changer la loi”, a-t-il insisté. Dans un entretien à la BBC, Kyriakos Mitsotakis a estimé que conserver une partie des frises du Parthénon hors de Grèce revenait à “couper Monna Lisa en deux”. Athènes tente de convaincre Londres d’aboutir à un accord pour que les marbres puissent retourner en Grèce sous la forme d’un prêt, a-t-il expliqué.