De la vase à la splendeur : comment les jardins de Monet à Giverny ont fleuri

De la vase à la splendeur : comment les jardins de Monet à Giverny ont fleuri

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© Arterra/Universal Images Group via Getty Images

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Par Konbini avec AFP

Publié le , modifié le

"C’était une friche. Il n’y avait plus de fleurs mais des ronces. Les berges de l’étang s’effondraient à cause des ragondins."

Un bassin des nymphéas rongé par la vase, des fleurs jadis foisonnantes disparues sous les ronces : les jardins de Monet à Giverny étaient à l’abandon avant que des travaux titanesques essentiellement financés par des Américain·e·s ne soient engagé·e·s en 1976 pour les reconstituer.

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“C’était devenu une friche. Il n’y avait plus de fleurs mais des ronces. Les berges de l’étang [construit par Monet pour les nymphéas] s’effondraient à cause des ragondins. Tout était à l’abandon”, explique Gilbert Vahé, 73 ans, recevant l’AFP sur les lieux dont il fut jardinier en chef jusqu’en 2018.

“Pour tout remettre en état, il a fallu quatre ans. Le jardin a commencé à être très beau en 1985, presque dix ans après”, raconte le jardinier qui a participé à cette renaissance pendant plus de quarante ans. Son récit fait aussi l’objet d’un livre (Le Jardin de Monet, histoire d’une renaissance) sorti en 2021. Le résultat est une profusion de fleurs qui submergent les visiteur·se·s.

Malgré le Covid-19, ce lieu qui fut à la fois le domicile, “l’atelier et le centre de recherche” de Claude Monet de 1883 à sa mort en 1926, accueille sur ses deux hectares environ 2 000 visites par jour, contre 3 000 en 2019. Dans ses allées étroites parfois engorgées, les langues étrangères foisonnent comme les couleurs des rosiers grimpants, des capucines, des tournesols et autres dahlias géants. En 2019, la moitié des visiteur·se·s étaient étranger·ère·s.

Pour redonner vie au “chef-d’œuvre” horticole du célébrissime peintre-jardinier, il fallut le “génie” de Gérald Van der Kemp (1912-2001), ex-conservateur du Domaine de Versailles, “un super caméléon, aussi à l’aise dans les hautes sphères que dans le milieu ouvrier”, souligne M. Vahé. “Même moi, au début, je n’y croyais pas du tout”, confie l’ex-militant communiste aujourd’hui consultant permanent des jardins de Monet.

Mais avec sa générosité, son carnet d’adresses et son épouse d’origine américaine, Gérald Van der Kemp parvient, de 1976 au début des années 1980, à récolter 20 à 25 millions de dollars de l’époque auprès de collectionneur·se·s américain·e·s, selon une source à la direction des jardins. Pour Gérald Van der Kemp, il était “indéniable” que l’ouverture des jardins en 1980 a ensuite contribué à augmenter la cote des tableaux de Monet, selon cette même source.

Entre-temps, l’inspecteur général honoraire des musées, peintre et jardinier à ses heures perdues, a suggéré une exposition Monet à New York, un succès en 1978, puis à Paris en 1980. Surtout, il a fallu reconstituer les plans des jardins, sur la base des tableaux, de quelques photochromes, de témoignages ou de la correspondance de Monet.

“Pollution de l’eau”

Le maître impressionniste “était collectionneur de plantes, il en créait et avec ses amis, comme Caillebotte ou Clemenceau, ils en échangeaient”, souligne Gilbert Vahé. Mais le jardinier et son “presque père spirituel” ne sont pas au bout de leur peine. “Il y avait une pollution de l’eau parce qu’il y avait une papeterie [à proximité] et l’agriculture avait changé”, poursuit M. Vahé.

Après avoir consolidé les berges avec des palplanches métalliques, “il a fallu isoler l’étang” du cours d’eau pollué qui l’alimentait. Le “combat pour l’eau claire” indispensable aux nymphéas demeure quotidien. Et puis, les variétés de fleurs sont moins nombreuses que du temps de Monet.

Le marché horticole actuel privilégie les variétés “petites pour en vendre plus. Les chimistes emploient des nanifiants alors que Monet, c’était l’exubérance. Et lui pouvait récupérer ses graines. Aujourd’hui, on est tributaire” de celle et ceux qui les vendent, regrette le jardinier devant le millier de géraniums hauts et rares planté au pied de la maison de Monet.

Autre changement, “au moment de la restauration, on avait une cuve de 300 litres et on traitait régulièrement. Aujourd’hui, ils ne traitent plus”, assure M. Vahé. Du temps de Monet, les pesticides entamaient leur essor, précise le retraité.

Avec AFP.