Barbie Savior est belle, mince et a un cœur pur. Pour s’en convaincre, elle est partie faire du tourisme humanitaire. La preuve sur son compte Instagram.
À voir aussi sur Konbini
Traduction de la légende : “Les orphelins prennent les MEILLEURES photos ! Trop. Mignons. #C’estQuoiDéjàTonNom #OùSontLesPotosOrphelins #LesBébésNoirsSontLesPlusMignons #DesÉtrangersIlYA2Secondes #PasUnZoo”
En juillet 2016, le média indépendant Matador publiait un article sur le tourisme humanitaire. Intitulé “Dear volunteers in Africa: please don’t come help until you’ve asked yourself these four questions” (“Chers bénévoles en Afrique : s’il vous plaît, ne venez pas aider avant de vous être posé ces quatre questions”, ndlr), il tentait de mettre en évidence les risques de ce tourisme humanitaire, autant pour les bénévoles que pour les populations locales et les associations.
S’appuyant sur des études, telles que celles publiées sur le site de l’Human Sciences Research Council ou du Condé Nast Traveler, l’article établit aussi le lien entre le tourisme humanitaire (abrégé en “voluntourism” en anglais) et les dégradations d’économies locales, entre autres. Le journaliste de Matador propose aux aspirants bénévoles de se poser quelques questions afin de s’assurer qu’ils ne veulent pas partir pour gonfler leur CV, pimper leur image sur les réseaux sociaux ou venir “promouvoir une attitude néo-colonialiste”.
Ce papier conseille également aux bénévoles en puissance de se poser les questions suivantes : souhaiteriez-vous toujours partir faire de l’humanitaire si vous ne pouviez apporter aucun appareil photo avec vous ? L’agence avec laquelle vous voulez travailler partage-t-elle les mêmes intentions et les mêmes valeurs que vous ? Allez-vous apporter plus de bien que de mal ? Vous feriez-vous assez confiance pour faire ce travail dans votre propre pays ?
Un compte Instagram satirique
Le compte Instagram Barbie Savior a mis en images ces problématiques en mettant en scène une poupée Barbie en pleine expérience humanitaire. Déniché par Slate, le compte de Barbie la présente pleine de bonnes intentions. Elle partage sur son Instagram tous ses moments merveilleux en Afrique (qu’elle semble voir comme un seul pays), ses prouesses de bonne samaritaine et ses selfies avec des enfants qu’elle adopte le temps d’une photo, poussant le vice jusqu’à apposer le hashtag “Black babies are the cutest” (“Les bébés noirs sont les plus mignons”, ndlr) sous ses photos.
Le compte prête à sourire, mais soulève un débat réel. Nombreuses sont les personnes à vouloir partir “faire de l’humanitaire” afin d’aider des pays vus comme “sous-développés”. Si l’intention est louable, toute aide n’est pas bonne à prendre et ce tourisme humanitaire pose parfois problème, au niveau économique comme au niveau social. En effet, les bénévoles occupent parfois des postes qui auraient pu revenir à des locaux, empêchant ainsi l’économie du pays de fonctionner de façon fluide, ou contribuent – sans le vouloir – à entretenir des stéréotypes sur certains pays.
Barbie Savior se moque du “complexe du sauveur” néo-colonialiste de certains bénévoles. Elle aurait peut-être dû lire l’article de Matador. La poupée, qui immortalise chacune de ses actions et s’improvise institutrice, aurait peut-être réfléchi à deux fois à ses motivations. Cet Instagram n’a pas pour vocation de railler pour le plaisir le travail humanitaire, il loue au contraire la contribution des professionnels et des bénévoles investis dans l’humanitaire.
Traduction de la légende : “Qui a besoin d’avoir suivi une formation pour enseigner en Afrique ? Pas moi ! Tout ce dont j’ai besoin, ce sont des craies et une bonne dose d’optimisme. C’est trop triste qu’ils n’aient pas assez de professeurs diplômés ici. Je ne suis pas diplômée non plus, mais je suis occidentale donc ça se vaut bien. Coucou les élèves !”