À l’occasion d’un débat sur “le pouvoir de redessiner les stéréotypes”, le festival Cannes Lions a mis à l’honneur les œuvres du photographe Campbell Addy, qui prône la diversité à travers son art.
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Chaque année, le Festival international de la créativité Cannes Lions rassemble des milliers de professionnels de la communication, du divertissement, du design et de la tech afin de discuter de l’évolution de leurs domaines d’expertise et d’évaluer des œuvres publicitaires (films, affiches, annonces, etc.) du monde entier. Si le festival est centré autour de la publicité, il laisse aussi aux participants la possibilité de discuter de ce que celle-ci représente aujourd’hui, de son futur, de ses obstacles et de ses perspectives d’avenir.
C’est dans cette optique que le Britannique Campbell Addy a présenté ses portraits, réalisés à la demande de Getty Images, célébrant l’individualité. La banque d’images bien connue affirme en effet une volonté de “développer et proposer des photos qui représentent toujours plus la diversité”. Si le géant de l’image a fait appel à la collaboration du photographe, c’est parce que le sujet n’est pas inconnu de ce dernier, bien au contraire.
Le pouvoir de la photo pour transmettre des idées
Campbell Addy n’est pas qu’un simple photographe. À 24 ans, il a déjà fondé le Nii Journal et la Nii Agency : deux entités qui veillent à protéger un idéal de diversité et à mettre en avant différents physiques et personnalités. Nii Journal explore les thèmes de “la sexualité, la couleur de peau et la religion”. L’artiste nous confie :
“J’ai mis en place le journal après avoir rendu visite à ma mère au Ghana, elle venait de faire une fausse couche. C’était une période bizarre de ma vie, je voulais créer un projet qui rendrait honneur à mon frère disparu, donc j’ai commencé à prendre des photos pour le simple plaisir de l’image, sans marques de mode, sans contraintes de format, juste une façon de prendre du plaisir avec la photo.”
En commençant à chercher des modèles pour son journal, l’artiste se rend compte du manque de diversité pesant dans la plupart des agences : “Je ne trouvais pas les histoires que je voulais raconter et les gens que je voulais photographier via les méthodes classiques, donc j’ai cherché à créer ma propre agence.” Campbell Addy espère voir ses initiatives grandir, afin qu’elles ne soient plus vues comme une approche parallèle, mais bien comme la normalité du métier.
Si sa passion pour la photographie lui est tombée dessus comme par magie (il devait aider un professeur à ranger des livres et de l’équipement photo lors d’une heure de colle et a “eu un coup de foudre” pour le travail d’Irving Penn, Richard Avedon et Nick Knight, entre autres), il a rapidement pris conscience du pouvoir de la photographie pour transmettre des idées et une certaine vision du monde.
Discuter ensemble du pouvoir de l’image
Ce 22 juin 2017, Campbell Addy a pu exposer ses méthodes de travail, ainsi que sa façon de voir le pouvoir de la communication visuelle, lors de la table ronde organisée au festival Cannes Lions sur le thème “Voir c’est croire : le pouvoir de redessiner les stéréotypes”. Les 42 images qu’il a shootées pour Getty étaient aussi mises à l’honneur.
Ses portraits, qu’il pense comme des peintures, représentent des amis ou des connaissances mis en scène de façon puissante, déterminée, voire presque régalienne, dans des compositions aux nuances travaillées. Selon lui, afin de parvenir à plus de diversité dans les domaines de la création visuelle, il est nécessaire d’arrêter “de donner tant de pouvoir aux stéréotypes et aux discriminations” et de réagir de façon conditionnée à ce qu’on entend ou ce qu’on voit :
“En brisant les stéréotypes et les notions préconçues de comment ‘l’autre’ existe et en éduquant les autres, même en dehors de leur juridiction, je suis persuadé qu’on arrivera à se rapprocher de nos semblables sans simplement les voir tels qu’ils sont décrits par les médias.”
Selon lui, la diversité devrait faire partie intégrante de tout projet artistique, qu’elle devienne la normalité sans faire figure d’exception. Pour le moment, il souligne que ce sont davantage de jeunes plateformes indépendantes qui portent de l’attention à cette problématique. Le chemin est long, mais pas infranchissable.
Il suffit que “de la production à l’exécution, l’idée de diversité soit présente” et, surtout, le chemin doit venir de derrière la caméra : “Photographier une personne de couleur pour une campagne c’est très bien, mais ce n’est pas assez. Je trouve ça fallacieux.” Du haut de ses 24 ans, Campbell Addy a encore beaucoup à faire, autant du côté de la photographie que du côté de l’édition. En espérant que son travail et ses belles initiatives donnent des idées au reste du monde.