Impayable. Ce matin, Robert Ménard a persévéré sur les statistiques religieuses, remis en cause le vivre-ensemble et prétendu que la France est un pays de race blanche et de confession catholique.
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“Dans une classe du centre-ville de chez moi, 91 % d’enfants musulmans, évidemment que c’est un problème, il y a des seuils de tolérance.” Vous avez reconnu l’auteur de cette phrase : il s’agit de Robert Ménard, l’inénarrable maire de Béziers. Il était invité ce lundi 5 septembre à la matinale de LCI. L’élu d’extrême droite s’est notamment plaint de la proportion d’élèves de confession musulmane à Béziers, mais ce n’est pas tout.
Tout d’abord, l’élu proche du Front national s’est fait une spécialité de catégoriser les élèves selon leur religion – surtout s’ils sont musulmans. En mai 2015, Robert Ménard a suscité la polémique en annonçant “64,6 % d’enfants musulmans scolarisés dans les écoles publiques de Béziers”. Il justifiait ce compte si précis car “les prénoms disent les confessions. Dire l’inverse, c’est nier une évidence”.
Il convient de rappeler que présumer de l’orientation religieuse de ses concitoyens pour les “ficher”, c’est se mettre hors la loi. La loi dite “informatique et libertés” du 6 janvier 1978 interdit la collecte et l’exploitation de données portant sur “les origines raciales ou ethniques, les opinions politiques, philosophiques ou religieuses ou l’appartenance syndicale des personnes, ou qui sont relatives à la santé ou à la vie sexuelle de celles-ci”.
“Européen, blanc et catholique”
Or ce matin le maire de Béziers a repoussé ses propres limites. Il a campé sur ses positions favorables à la théorie conspirationniste du “grand remplacement”, dont il a encore donné un écho dans un tweet le 1er septembre dernier :
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Pas de problème, Robert Ménard assume. Quand, dans la matinale de LCI, la journaliste Audrey Crespo-Mara lui demande si “être français, c’est être blanc”, l’élu biterrois acquiesce :
“Être français, c’est aussi, comme le disait le général de Gaulle, être européen, blanc et catholique.”
Il s’inscrit dans les pas de Nadine Morano qui, il y a presque un an, s’était cachée derrière la (grande) silhouette de Charles de Gaulle pour prétendre que “la France est un pays de race blanche” – autrement dit, si vous n’êtes pas blanc, vous n’êtes pas un Français à part entière. C’est comme ça.
Mais l’instigateur de la Cinquième République a-t-il vraiment tenu ces propos ? Franceinfo rappelle que si l’extrême droite reprend cette phrase depuis plus de vingt ans, la citation date de 1959 et est extraite de l’ouvrage C’était de Gaulle par Alain Peyrefitte, qui fut ministre de l’Éducation nationale entre 1967 et 1968 pendant le mandat du général. Il ne l’a donc ni prononcée publiquement, ni écrite. Aussi, d’après l’historien Jean-Paul Bled, directeur de la revue Etudes gaulliennes, contacté par Les Inrocks, “cette phrase a été prononcée à l’emporte-pièce dans une conversation privée, mais il n’y a aucune trace écrite dans ses mémoires ou ses discours […], il ne peut donc en être comptable”.
“Vous n’êtes pas musulmane […] Ça se voit sur votre visage”
Mais ce matin, Robert Ménard pétait le feu. Comme relève Le Lab d’Europe 1, d’après lui, la cohabitation entre Français catholiques et musulmans n’existe pas. “Le vivre-ensemble, c’est une invention”, a-t-il déclaré, ajoutant “mais bien sûr que les gens ne veulent pas vivre ensemble, madame !”.
Mieux encore, l’édile ne s’est pas caché de savoir reconnaître les musulmans des catholiques… d’un simple regard. D’ailleurs, pour lui, si vous êtes arabe, vous êtes forcément musulman – et vice-versa. Voilà ce qu’il a dit à Audrey Crespo-Mara, qui s’en étonne :
“Attendez, pardon, je sais que vous n’êtes pas musulmane. Écoutez, c’est drôle, vous n’êtes pas arabe. Qu’est-ce que vous voulez que je vous dise : ça se voit. Ça se voit sur votre visage. Pardon.”
Une dernière pour la route ? Non ? Désolé, il en reste un peu, on vous le met quand même. Robert Ménard n’a pas peur des paradoxes : il s’est appuyé sur le principe de laïcité pour déclarer sans gêne aucune son hostilité envers l’islam :
“La laïcité n’est pas l’ennemi de l’histoire de ce pays. Je pense qu’aujourd’hui l’islam et la chrétienté n’ont pas le même statut dans notre pays et ne doivent pas l’avoir. Pardon, je suis ravi quand je vais dans un village de l’Hérault de voir des églises dans chacun de ces villages. Je n’ai aucune envie de voir des mosquées.”
Pour rappel, et si par hasard Robert Ménard nous lisait, voici un lien vers la définition du mot laïcité dans le Larousse.