Après le meurtre de Walter Scott, tué de huit balles dans le dos par un agent de police en Caroline du Sud, trois activistes de We The Protesters ont mis en ligne le site Mapping Police Violence, qui cartographie les 304 civils Noirs américains tués par les forces de l’ordre en 2014.
Michael Brown, et maintenant Walter Scott. Entre le meurtre de Ferguson et celui de North-Charleston, moins d’un an se sera écoulé. Dans les deux cas, un citoyen américain, Noir, abattu en toute innocence et en pleine rue par un agent de police Blanc. Aux États-Unis, le racisme porte trop souvent l’uniforme.
Partant de ce constat, trois jeunes activistes viennent de lancer le site Mapping Police Violence, qui collecte, analyse et diffuse des données liées aux 1148 civils tués par les forces de l’ordre sur le territoire américain en 2014 – trois morts par jour. Parmi eux, 1044 l’ont été pendant une arrestation, et 104 dans d’autres circonstances. À l’heure de faire les comptes, on dénombre 26% de Noirs, soit 304 victimes.
Outre cette carte interactive, qui nous renseigne sur le lieu, la date du décès et l’identité des 304 victimes, l’équipe de We The Protesters a pu faire émerger des tendances, dont certaines particulièrement révélatrices. Ainsi, un Noir américain a 7 chances sur un million d’être tué par un agent de police (soit trois fois plus qu’un Blanc) dans son propre pays ; au moins 100 de ces victimes tuées en 2014 ne portaient pas d’arme ; enfin, on apprend qu’en 2014, le nombre d’afro-américains tués par la police a augmenté de 5% par rapport à 2012, soit 16 personnes supplémentaires. Sur la même période, le taux de criminalité sur le territoire national aura lui diminué de 10%.
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Pour récupérer cette somme de données, les trois activistes derrière le projet sont passés par trois bases de données collaboratives : FatalEncounters.org, Killedbypolice.net et the U.S Police Shootings Database. Les deux premiers sont des sites d’information citoyenne, le troisième est un projet mis en place par Deadspin, un pure-player d’informations générales. Aucun des trois ne porte le sceau gouvernemental.
Aussi effarant que cela puisse paraître dans un pays qui compte 17000 “agences de maintien de la loi” et environ 800 000 agents (un chiffre que personne ne semble vouloir ou pouvoir estimer précisément), il n’existe aucune statistique comptabilisant le nombre de citoyens tués par les forces de maintien de l’ordre. Officiellement, le meurtre institutionnel n’existe pas.
Mais depuis le meurtre de Ferguson, les choses changent, au rythme balourd de l’administration. Le 17 décembre dernier, le Congrès américain a approuvé le Death in Custody Report Act, qui obligera tous les États américains à fournir le rapport de chaque décès intervenu en opération ou en détention, en précisant le sexe et l’appartenance ethnique de la victime. Ces rapports seront ensuite transmis au bureau du procureur général des États-Unis qui, à son tour, rendra un rapport au Congrès dans les deux ans.
Pour le moment, le décret n’attend que la signature d’Obama pour être mis en place et, si tout se déroule comme prévu (c’est-à-dire si les agences de police locales se plient à cette obligation), les premières données seront disponibles d’ici quelques années. Mais pour We The Protesters, la transparence ne peut plus attendre.