Une étude qui portait sur les messages d’avertissement sur les publicités a démontré leur inutilité totale. Au fond, ses résultats ne sont pas très surprenants. Notre journaliste Olivia Cassano vous explique pourquoi.
Être humain dans la société d’aujourd’hui, c’est être traversé par ce sentiment constant de ne pas être assez bien — ou de ne pas être assez beau. Les médias nous bombardent sans cesse d’images léchées sur lesquelles s’étalent des corps parfaitement foutus, sans rien qui dépasse. Conséquence : une image de soi désastreuse pour tous ceux qui ne ressemblent pas à l’enfant illégitime de Gisele Bündchen et de Photoshop.
Plusieurs marques — comme Aerie ou la chaîne de magasins Selfridges avec sa campagne #everybody — l’ont bien compris, et ont fait du très bon boulot pour faire preuve de diversité et montrer des vrais corps non retouchés. Ce qui a d’ailleurs eu pour conséquence de faire grimper leurs ventes. D’autres préfèrent coller des messages d’avertissement sur les pubs trop retouchées, un peu comme les photos de poumons sur les paquets de cigarettes. Mais, est-ce que c’est efficace ? Le bon sens disait déjà que non, mais maintenant, c’est la science qui s’y met.
Une nouvelle étude de la Chapman University (Orange, Californie) confirme ce que les femmes, et de plus en plus d’hommes, disent depuis presque toujours : les messages d’avertissement sur les pubs n’ont aucun effet sur l’image de soi.
Le docteur en psychologie David Frederick et son équipe ont conduit deux études pour savoir si les “subvertissements” que collaient les militants défendant la diversité des corps — des avertissements et détournements ironiques pour contrer les messages blessants des images — avaient un quelconque effet sur le public. Résultat : même si ça part d’une bonne intention, c’est une perte de temps.
Les participants étaient divisés en trois groupes. On a présenté au premier groupe des publicités originales avec des mannequins maigres. Au second groupe, on a fait voir la même photo avec un avertissement en rouge : “ATTENTION, cette photo a été photoshoppée” et, au troisième groupe, on montrait l’image détournée, l’avertissement étant remplacé par des phrases comme “Photoshop m’a déchirée” ou “Pourquoi ne pas montrer une personne avec un visage plutôt qu’un bout de corps sexualisé” ou encore “Je pense au dernier cheeseburger que j’ai mangé… c’était il y a cinq ans”.
Les résultats ont montré que les femmes qui avaient été exposées aux images avec les avertissements ou avec les “subvertissements” éprouvaient le même niveau d’insatisfaction vis-à-vis de leur corps que celles qui avaient été exposées aux photos originales. C’est très surprenant. Encore plus surprenant : plutôt que de demander plus de diversité des corps sur les panneaux publicitaires, le Dr Frederick a proposé de s’attaquer à ce problème par la thérapie individuelle et par des cours de décryptage des images.
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“Aucune recherche précédente ne s’est demandé si les images subverties amélioraient l’image de soi, réduisaient l’instinct de comparaison ou le désir d’être maigre, a-t-il déclaré, nous avons trouvé que la vue des images subverties n’avait aucune d’efficacité.”
Peut-être parce que les femmes ne sont pas des paquets de cigarettes sur lesquels il suffit de coller une étiquette pour s’en débarrasser. Combien de fois doit-on le répéter pour que la mode change quelque chose à ses critères ?
Ashley Graham a été le premier mannequin grande taille à avoir le droit à la couverture du numéro spécial maillot de bain de Sports Illustrated, Candice Huffine a posé pour le calendrier Pirelli, la France a banni des podiums les mannequins trop maigres et, au Royaume-Uni, l’Advertising Standards Authority a interdit une publicité Gucci dans laquelle se trouvait un mannequin rachitique. Si, pour moi, la solution n’est pas d’interdire les modèles trop maigres — je pense que tous les types de corps devraient être représentés —, cette liste nous montre bien que la diversité dans les publicités ne peut s’obtenir que par le combat. Pour l’instant le seul moyen d’améliorer l’acceptation de soi consiste à proposer une véritable diversité dans les médias.
Traduit de l’anglais par Dario