RIP 5 Pointz
J’ai pleuré ce matin, je vous jure.
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David pleure, Jerry confirme son amour pour le graffiti : “Je vous le dis, je n’ai pas aimé ce qu’ils ont fait – j’ai adoré“. Et une question se pose : que manque-t-il à cette situation initiale, où tout le monde semble s’accorder sur l’intérêt de l’initiative, pour arriver à un dénouement heureux ?
Réduit au silence
C’est le plus grand manque de respect dans l’histoire du graffiti […]. Ils ont repeint les oeuvres de plus de 1500 artistes.
Un jour noir pour le graffiti ?
Et s’il est difficile de faire des funérailles autre chose qu’un moment d’apitoiement (cf. la déferlante de messages de soutiens, de dépits, de haines et d’incompréhension sur les différents réseaux sociaux), on peut pour autant tirer plusieurs conclusions. Pas de joie donc mais de la lucidité.
Dans un premier temps, les détracteurs se sont exprimés, à l’image du journaliste Taylor Woolford. Contre le mouvement de sympathie à l’égard de 5 Pointz, il rappelle son article publié sur le site The Gothamist plusieurs éléments clés. D’abord 5 Pointz n’a jamais été un lieu d’expression totalement libre (il fallait proposer au comité d’organisation un projet qu’il était en droit d’invalider ; des règles étaient imposées aux peintres) et surtout il retirerait à ce type d’expression artistique son essence : illégalité et caractère éphémère.
Ce que confirme le old-timer Jay aka. J.SON, Terror 161, et Tarantula 235 interrogé par le journaliste :
Le graffiti légal me déprime. Même s’il est esthétiquement beau, c’est comme valoriser un tigre dans une cage plutôt qu’un tigre courant à travers à la jungle (…). Les “matériaux” utilisés à la fois dans le graffiti et le street-art ne sont pas faits pour durer. De la peinture en aérosol, de l’encre et du papier appliqué sur un mur ne passe pas l’épreuve du temps quand ils vivent à l’extérieur. Le graffiti suppose de créer uniquement sur le spot.
En résumé, le graffiti n’avait pas besoin de la protection de 5 Pointz pour la figure new-yorkaise. Il conclut, acerbe :
Si Meres One et ses supporters sont si scandalisés par la destruction de leur “palace de légalité”, je leur suggère d’attendre que les bâtiments soient construits et d’aller les défoncer. Ils ont mon aval pour ça !
- 5 Pointz n’a pas vu ses murs être abbatus : seuls les murs du bâtiment de Long Island ont été repeints. Les autorités en charge du dossier ont conscience que le nerf de la guerre n’est plus vraiment l’occupation du bâtiment mais bien plus son utilisation par les artistes comme support de leur expression. On a traité 5 Pointz en lieu de culture, pas en squat, le graffiti en art, pas en vandalisme.
- Les oeuvres de Banksy volées, les peintures recouvertes : si le graffiti accède peu à peu à une reconnaissance muséale, il n’en est qu’à la jeunesse de sa légitimité artistique. Il reste indubitablement une forme d’expression spontanée à situer dans le présent (en raison de sa gratuité, et de sa spontanéité) à qui on refuse toute protection. Même sous couvert de préservation du patrimoine d’une société donnée à un instant donné.
Voilà tout.